Le bonheur est bon pour la santé
HealthDay News
Les personnes heureuses sont en meilleure santé, soutiennent des chercheurs britanniques qui ont observé des preuves de lien biologique entre un sentiment de bien-être et un risque réduit de maladie chez les femmes et les hommes d'âge moyen.
Dans un récent numéro de Proceedings of the National Academy of Sciences, les auteurs soutiennent que le seul fait d'être heureux, au travail et dans les loisirs, est directement relié à des fonctions organiques spécifiques qui protègent de la maladie cardiovasculaire, du diabète, des déficiences auto-immunes et des maladies liées au stress.
" Il existe un lien direct entre notre humeur et les processus biologiques liés à la maladie et aux risques de maladie ", assure l'auteur de l'étude, le Dr Andrew Steptoe, professeur de psychologie au University College London. " La biologie est du côté des gens qui ont un état d'esprit plus positif et cela pourrait aider ces personnes à conserver une bonne santé au fil du temps qui passe. "
Le Dr Steptoe et ses collègues ont fait passer des tests de stress en laboratoire et des questionnaires normalisés de santé mentale à plus de 200 femmes et hommes de race blanche de la région de Londres dont l'âge variait de 45 à 59 ans.
Tous les participants étaient des fonctionnaires encore actifs et leurs revenus oscillaient entre faibles et élevés. Des examens médicaux ont pu déterminer que tous les sujets jouissaient d'une bonne santé relative, n'ayant jamais eu de maladie cardiaque ou d'hypertension.
Des échantillons de sang ont été prélevés avant et après les tests de stress. Les chercheurs ont ensuite suivi chaque participant au cours d'une journée de travail ordinaire en faisant appel à des capteurs portables qui enregistraient automatiquement la tension artérielle et le rythme cardiaque toutes les 20 minutes, depuis le début du travail jusqu'au coucher.
Tous les participants ont tenu un journal indiquant le lieu où ils se trouvaient et leurs activités pendant le suivi. Ils ont aussi noté s'ils se sentaient heureux, sur une échelle de un à cinq, au moment de chaque évaluation. Ils ont aussi noté un classement de sentiments momentanés de stress, de contrôle, de fatigue.
Les différents taux de cortisol (l'" hormone du stress ") ont aussi été mesurés grâce à des échantillons de salive que les participants devaient recueillir toutes les deux heures durant le même jour de travail, et également lors d'une autre journée consacrée aux loisirs.
Les chercheurs ont indiqué que l'âge, l'état matrimonial, le sexe et les revenus ne semblaient pas avoir d'influence sur le sentiment de bonheur que les participants disaient éprouver lorsqu'ils étaient au travail.
Le Dr Steptoe et son équipe ont aussi observé que les personnes qui avaient le moins de détresse psychologique lors de contrôles antérieurs touchant la santé mentale semblaient en général plus heureux.
Et ces personnes plus heureuses au travail semblaient aussi plus heureuses lors des journées de loisir, bien que chez tous les participants, le bonheur était plus souvent au rendez-vous dans les loisirs que sur les lieux de travail.
Parmi les marqueurs biologiques considérés, tous ne semblaient pas avoir de l'influence sur le bonheur. La tension artérielle n'a pas été associée à l'autoévaluation de bonheur faite par les participants, alors que le rythme cardiaque a semblé ne jouer que chez les hommes, ce rythme étant plus élevé chez les hommes les moins heureux.
Toutefois, les données sur le cortisol ont semblé appuyer fermement la notion voulant qu'il y ait un lien biologique entre le stress et le bonheur. Les chercheurs ont constaté que les sujets les plus heureux avaient les plus faibles taux de cortisol. En moyenne, les taux de cortisol étaient de 32 % plus élevés chez les sujets les moins heureux.
Les chercheurs ont insisté sur les dangers que présentent de forts taux d'hormone du stress à long terme, soulignant notamment l'association entre un taux élevé de cortisol et un risque plus grand d'hypertension, de diabète, d'obésité abdominale et d'une résistance moindre aux infections.
Sur un autre front biologique, les auteurs ont noté que les prélèvements sanguins ont révélé des taux 12 fois plus élevés de fibrinogène, une protéine produite par le foie, chez les hommes et les femmes les moins heureux.
Le fibrinogène aide à faire cesser les saignements en contribuant à la formation de caillots, mais des niveaux élevés de cette protéine ont été associés à un plus grand risque de maladie cardiovasculaire.
Les chercheurs ont conclu que le fait de nourrir un fort sentiment de bien-être et de bonheur pourrait contribuer à donner un coup de fouet aux systèmes biologiques, et aider à diminuer le risque de présenter différentes maladies. Ils ont aussi souligné que cette voie royale bonheur/santé semble indiquer un lien corps-esprit indépendant des choix de vie tels que l'exercice ou l'usage du tabac et de l'alcool.
" Pas de doute que les gens devraient adopter un mode de vie sain (demeurer actifs physiquement, s'abstenir de fumer et faire preuve de plus de prudence dans leur alimentation) indépendamment de ce lien biologique, soutient le Dr Steptoe. Mais nous devons aussi penser à des choses qui mènent à des états plus positifs. Faire des choses que l'on a envie de faire et trouver de la gratification à les faire. "
Mais le chercheur ajoute que la voie menant à davantage de bonheur et, par conséquent, à une meilleure santé peut être difficile à trouver.
" Je ne peux pas vraiment prescrire aux gens des méthodes pour les rendre plus heureux parce que les philosophes ont échoué dans ce domaine depuis des siècles, dit-il. Mais une grande partie de notre sentiment de bonheur semble lié aux bonnes relations que nous entretenons avec la famille et les amis, et cela ne peut pas être maintenu sans un certain effort, tout en gardant l'équilibre approprié. Et, bien sûr, cet équilibre est différent pour chaque personne. "
Des conseils
Le Dr Albert Ray est le coordonnateur régional de la promotion de la santé et des soins préventifs au Kaiser Permanente Southern California, à San Diego. Il dit: " Je tente de suggérer aux gens des choses concrètes à faire pour diminuer leur stress. Ayez un chien, ayez un chat, sortez, pratiquez des sports, fréquentez votre institution religieuse, faites du yoga, mariez-vous, ayez une relation, allez en vacances, faites des choses pour vous détendre. "
Le Dr Ray applaudit au succès qu'ont obtenu les chercheurs en mettant en évidence les preuves biologiques des effets du bonheur sur l'organisme, un phénomène qu'il a pu observer de manière anecdotique au fil des ans.
" Pas de doute que les gens qui ont une attitude positive ont une tension artérielle moindre, moins de maladies, ont en général un taux de cholestérol plus bas et résistent mieux à la plupart des infections, avance-t-il. Et lorsqu'ils tombent malades, leur attitude positive réduit généralement la durée de leur maladie."
" Et je crois que chaque médecin tente de dire à ses patients de prendre l'air et d'aller humer le parfum des fleurs, d'aller faire une promenade, de lire un livre, de regarder le bon côté des choses plutôt que de nourrir des pensées négatives. Ça semble tout simplement logique. Et pas besoin d'être médecin pour savoir ça. "
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Entretenir de bonnes relations avec la famille et les amis constitue une grande partie du bonheur.