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 Venezuela : démocratie participative ou gouvernement comme

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mihou
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mihou


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23042006
MessageVenezuela : démocratie participative ou gouvernement comme

Venezuela : démocratie participative ou gouvernement comme un autre ? par Gregory Wilpert.

19 octobre 2005


Venezuela : démocratie participative ou gouvernement comme KIF_1
30 septembre 2005


Introduction

Le Venezuela est un pays complexe qui confond souvent l’observateur non averti. En conséquence, chacun tend à simplifier exagérément la situation, en particulier les médias, que l’on veuille soutenir le gouvernement actuel ou s’y opposer. Il est trop facile de taxer le gouvernement de Chávez de n’être qu’un exemple de plus de caudillisme latino-américain, notamment à cause du passé militaire du président. Et, dans la foulée d’une telle affirmation, on pourrait ajouter, vu son discours et son amitié avec Fidel Castro, qu’il entraîne son pays sur la voie du « castro-communisme » autoritaire (voire totalitaire). Par ailleurs, les observateurs de gauche (s’ils ne sont pas encore vendus à l’argumentaire de l’opposition, comme c’est le cas de certains) tombent trop facilement dans l’autre travers simpliste et affirment que Chávez représente les misérables, les parias de la Terre, une solide victoire des pauvres dans leur lutte perpétuelle contre les riches de ce monde. Les deux points de vue doivent être qualifiés, toutefois, si l’on veut tirer au clair ce qui se passe réellement aujourd’hui au Venezuela.

Dans les pages qui suivent, je tente de donner un sens à certaines évolutions récentes, notamment les causes de l’ascension de Chávez au pouvoir, ce qu’il a réalisé, les raisons de la férocité de l’opposition et pourquoi Chávez a pu se maintenir au pouvoir, en particulier à la lumière du référendum révocatoire [1]. qu’il a gagné.

Mon point de vue sur le mouvement de Chávez, connu au Venezuela sous le nom de Projet bolivarien (du nom de Simon Bolívar, héros andin de l’indépendance), est qu’il existe au sein du gouvernement de Chávez un élan fortement progressiste, de redistribution et de démocratie participative. C’est d’ailleurs la raison fondamentale de son récent succès au référendum. Cependant, le style émotif du leadership de Chávez et son culte de la personnalité, ainsi que la résistance externe, menacent de faire dérailler le projet. Pour que le gouvernement de M. Chávez réussisse à mettre en œuvre sa vision démocratique participative de la justice sociale, il devra trouver le moyen de surmonter ces écueils.


Le Venezuela, en bref

S’il n’était qu’une seule chose à savoir sur le Venezuela, ce serait que la production de pétrole y est l’industrie principale. Ce fait à lui seul pourrait expliquer bon nombre de tendances, comportements, patrons sociaux et préférences culturelles dans ce pays. Le pétrole au Venezuela a été découvert assez tôt dans la transition du monde industrialisé vers un système fondé sur l’énergie pétrolière. C’était au début du 20e siècle, bien avant que l’on en trouve au Moyen-Orient. C’est ainsi que le Venezuela devint rapidement le principal pays exportateur de pétrole dans le monde pendant la première moitié du 20e siècle. Toutefois, ce n’est qu’à la moitié des années 70, alors que l’importance du pays en tant qu’exportateur de pétrole avait déjà décliné, que le pétrole a commencé à avoir un impact notable sur les structures sociales et la psyché collective du pays.

Entre 1974 et 1976, l’industrie pétrolière vénézuélienne, jusque-là contrôlée par quelques transnationales, telles Exxon, Mobil, Shell et Chevron, fut peu à peu nationalisée. De plus, facteur important, le choc pétrolier provoqué par l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) dans les années 70 quadrupla les prix en très peu de temps. Ce qui entraîna une hausse proportionnelle des revenus de l’État vénézuélien en deux ans à peine. C’est cette affluence de revenus qui allait finir par mettre le pays sans dessus dessous.

On peut retrouver les effets sur le pays de la prééminence relativement soudaine du pétrole dans deux dimensions : l’économique et la culturelle. En termes économiques, la prééminence du pétrole a avant tout causé l’apparition d’un problème appelé « la maladie hollandaise » [2] . Un pays attrape cette maladie économique lorsqu’un produit de base entraîne une hausse de revenus dans un seul secteur de l’économie, sans que cette hausse ne soit correspondue par des revenus plus élevés dans d’autres secteurs. En fait, la hausse de revenus ne fait qu’accroître rapidement la demande de produits importés, puisque la production nationale ne peut satisfaire cette demande suffisamment vite. Cela augmente également la demande de services, que le marché national doit fournir, car les services ne peuvent être importés aussi facilement que les marchandises. Autrement dit, les revenus pétroliers ont entraîné une croissance anormale des services et d’autres produits non commercialisables, tout en décourageant la production nationale de biens commercialisables, tels que les produits industriels et agricoles. Une demande accrue de biens importés et de services nationaux entraîne à son tour une hausse des prix, et ne peut susciter une croissance de la production nationale, car le flux de devises entrant dans l’économie entraîne une inflation généralisée des salaires et des prix.

Les symptômes de la maladie hollandaise dans l’économie vénézuélienne sont d’autant plus reconnaissables que la hausse de la production pétrolière et des revenus pétroliers a été suivie d’une baisse correspondante de la production agricole et de l’industrialisation. Dans les années 1920, la production agricole représentait environ un tiers du PIB du Venezuela. Dans les années 50, elle était tombée à un dixième du PIB. Aujourd’hui, elle n’en représente plus que 6%.

Outre le problème typique de la maladie hollandaise, la hausse soudaine des revenus pétroliers dans les années 70 a suscité de sérieux problèmes dans les politiques fiscales du gouvernement. Ainsi, les nouveaux revenus ont créé l’illusion que les recettes pétrolières pourraient servir à industrialiser le pays par de vastes projets d’infrastructure, à « semer le pétrole », comme avait l’habitude de dire M. Carlos Andrés Pérez, président à l’époque du boom pétrolier. Or, ces recettes pétrolières multipliées par quatre n’ont fait qu’augmenter rapidement les dépenses gouvernementales, qui ont fini par dépasser les montants des nouvelles recettes. Et lorsque les revenus pétroliers ont commencé à baisser, il n’a pas été aussi facile de réduire les dépenses publiques. Sur environ deux décennies (de 1982 à 1998), les prix du brut ont commencé à baisser, de $ 15,93 le baril (en dollars de 1973) en 1982 à $ 3,19 le baril en 1998 [3]. La conséquence en a été que, peu à peu, le gouvernement s’est de plus en plus endetté.

Plusieurs facteurs se sont ainsi combinés au Venezuela dans le courant des vingt dernières années environ, à savoir :

1. Une baisse des revenus pétroliers par habitant (47% de 1963 à 1997)
2. Une population qui a doublé (de 12 millions d’habitants en 1975 à 24 millions en 2000)
3. La « maladie hollandaise » (déclin des secteurs industriel et agricole)
4. Une hausse de l’endettement public (de 9% du PNB en 1970 à 53% en 1994).

Ces quatre facteurs se sont conjugués pour produire des conséquences diverses qui sont très importantes pour comprendre le Venezuela actuel.

Premièrement, baisse des revenus pétroliers par habitant et doublement de la population signifient une redistribution moindre de la richesse minérale du pays. Pendant la présidence de Chávez, le revenu pétrolier moyen par habitant n’a été que de 26% ce qu’il fut à l’époque dorée de la présidence de Carlos Andrés Pérez (1974-1978) [4]. Donc, même si le revenu pétrolier par habitant est resté relativement stable entre 1984 et 1998, la pauvreté a fortement augmenté, passant de 18% de la population en 1980 à plus de 65% en 1996 [5], la progression la plus forte de tous les pays latino-américains pour cette période de 16 ans. Une telle hausse de la pauvreté combinée à la stagnation des revenus par habitant signifie que l’inégalité a énormément augmenté au Venezuela entre 1984 et 1998 [6].

Deuxièmement, le déclin de la production agricole, résultat de la « maladie hollandaise », et la richesse pétrolière perçue ont entraîné un exode rural massif. Les nouveaux habitants des villes ont bien entendu formé le groupe principal des pauvres du pays, vivant dans des barrios de taudis fabriqués sur des terres occupées. Tout qui visite le Venezuela ne peut qu’être impressionné par les collines qui se succèdent, pleines de ces barrios, le long de l’autoroute entre l’aéroport et la capitale.

Troisièmement, la combinaison de la pauvreté croissante et du fort endettement (quoique plus bas que dans d’autres pays latino-américains) a entraîné une succession de crises politiques, avec comme apogée les émeutes et les massacres de 1989 [7], les deux coups d’État manqués de 1992 et l’élection d’un président populiste [8] de gauche en 1998.

Ce ne sont là que certaines des conséquences économiques les plus importantes d’un pays dont l’économie se fonde exclusivement sur le pétrole, avec un système redistribuant la richesse de manière inéquitable et dysfonctionnelle. Toutefois, les recettes pétrolières ont également eu des conséquences sur la culture politique et économique du Venezuela, dont la plus importante est la perception généralisée auprès des Vénézuéliens d’avoir un État « magique » ou omnipotent. En outre, la distribution de la richesse pétrolière dépendant exclusivement de l’État, elle a contribué à nourrir un système rentier, clientéliste et corrompu.

La perception qu’ont les Vénézuéliens d’avoir un État magique est une observation formulée par l’anthropologue Fernando Coronil [9]. Ainsi, le recours aux dépenses publiques, héritage essentiellement de l’école « dépendantiste » de la théorie économique des années 60 et 70, a centré les investissements sur de vastes projets d’infrastructure. Selon Coronil, le résultat de ces politiques a été que :

« ... l’État vénézuélien étonne plus de par les merveilles de son pouvoir que de par le pouvoir de la raison, car la raison elle-même est mise au service du spectacle impressionnant de pouvoir. En fabriquant d’époustouflants projets de développement qui engendrent des phantasmes collectifs de progrès, l’État captive aussi bien son public que ses acteurs. Tel un ‘sorcier magnanime’, l’État tient ses sujets en leur induisant une condition ou un état de réceptivité à ses illusions-un État magique. » [10]

La seconde conséquence culturelle, qui liée à la première, est la combinaison relativement commune (dans les sociétés pétrolières du tiers-monde) d’un système rentier, du clientélisme et de la corruption. Autrement dit, comme presque toute la richesse du Venezuela provient de l’industrie pétrolière, une industrie d’extraction capable de générer d’immenses bénéfices, la meilleure source de richesse pour ceux ne participant pas à cette industrie a été de s’attacher à cette industrie ou, à défaut, à son propriétaire, c’est-à-dire l’État. Bien entendu, si le système rentier consiste à extraire la rente de l’État ou de l’industrie pétrolière, son versant direct est le clientélisme, par lequel les acteurs de l’État « extraient » la loyauté de ceux qui recherchent la rente pétrolière. Dans la pratique, cela a donné un système dans lequel deux partis politiques (Action démocratique et Copei) contrôlaient toute la bureaucratie gouvernementale et gagnaient régulièrement les élections grâce à leurs réseaux clientélistes et aussi par l’exclusion de tout autre parti des revenus pétroliers.

Ce système général limitant l’arène politique aux deux partis dominants a été cimenté par un pacte formel dit « de Punto Fijo ». Dans ce pacte, les deux partis principaux s’accordaient à se partager le butin pétrolier et à exclure activement tout autre acteur, en particulier venant de la gauche, comme les socialistes et les communistes. Avec le temps, le système a dégénéré, du point de vue des citoyens, en un modèle de plus en plus corrompu, entraînant la paupérisation de la population en général. C’est ce qui a permis à Chávez de finalement rompre le pacte.

Les niveaux croissants d’inégalité, les crises économiques périodiques et les niveaux de plus en plus évidents de production ont fini par donner naissance à un système politique plus instable que jamais. Les émeutes anti-FMI (Fonds monétaire international) et les massacres qui ont suivi, en 1989, où la police et l’armée ont tué entrer 300 et 1 000 personnes, puis les deux tentatives de coups d’État de 1992, l’élection en 1993 d’un ex-président inscrit par un nouveau parti, et finalement l’élection en 1998 de Hugo Chávez, ex-putschiste et outsider politique, tous ces éléments sont symptomatiques de la crise politique au Venezuela. Mais si ces événements des années 1990 étaient des symptômes de la même crise, l’élection de Chávez représente l’apogée de cette crise, ainsi qu’un tournant important.
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