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 Togo: les enjeux des résultats de la Commune de Lomé

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brigitte
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brigitte


Nombre de messages : 65
Localisation : France/Togo
Date d'inscription : 24/11/2005

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28102007
MessageTogo: les enjeux des résultats de la Commune de Lomé

Togo: les enjeux des résultats de la Commune de Lomé Kpatcha%20vainqueur%20TOGO
Par Vénavino d’ALVES



La proclamation des résultats de la Commune de Lomé traine depuis que
la proclamation provisoire des résultats partiels des élections
législatives du 14 octobre 2007 est intervenue, le mercredi 17 octobre,
pour la majorité des préfectures du Togo suivie, le jeudi 18 octobre de
celle de la Préfecture du Golfe. Dans l’imbroglio qui s’est installé
autour de cette proclamation, on a pu noter divers incidents qui, mis
bout à bout, appellent interrogation et réflexion et qui, confrontés
aux informations qui filtrent des cercles mêmes du RPT permettent de
comprendre, après une analyse objective et approfondie que, derrière la
question apparemment anodine de cette proclamation, il y a de sérieux
et gros enjeux pour le RPT, d’une part pour les différents clans qui
s’affrontent en son sein, d’autre part dans ses rapports à l’UFC au
sein de la nouvelle assemblée. Sans la clarté sur ces enjeux il est
impossible de comprendre quoi que ce soit au blocage actuel qui
paralyse le processus électoral en cours d’achèvement au Togo.

Des incidents particulièrement révélateurs…

A propos des incidents survenus, il convient de rappeler d’abord ceux
qui ont failli conduire, le lundi 15 octobre, vers 17H 30, au lynchage
du président de la Commission électorale locale indépendante (CELI) de
la Commune de Lomé, le juge Bitassa Essozimna, par la foule de jeunes
surveillant les urnes entreposés, après leur centralisation, à la
Mairie de Lomé après qu’il ait été surpris en train de passer par la
fenêtre avec une enveloppe contenant les procès-verbaux des bureaux de
vote. Où allait-il avec ? On ne l’a jamais su. Cet incident conduisit
au transfert des opérations de centralisation des résultats de la
Mairie de Lomé au Palais des Congrès.

Il y eut ensuite les graves incidents du samedi 20 octobre dernier qui
se déroulèrent en deux volets. D’une part à l’intérieur même des locaux
de la CENI où le rapporteur de la CELI de Lomé, Edem Atantsi, a été
convoqué de façon cavalière pour signer un procès verbal portant, selon
les informations données par un communiqué de l’UFC, sur l’annulation
des résultats de 31 bureaux de vote ce qui aurait eu pour conséquence
l’octroi d’un siège au RPT. La suite est connue : il refusa, déchaînant
la fureur des coups de poings que lui ont porté les représentants du
RPT à la CELI qui l’ont mis en sang, notamment à l’œil, en présence
même du président de la CENI, Tozim Potopéré. D’autre part, en réaction
à ces faits, il y eut la marche de protestation spontanée qui est
partie du meeting de l’UFC à Fréau Jardin en direction de la CENI dès
que l’information est parvenue sur ce qui s’y tramait, marche qui fut
violemment réprimée et dispersée par la FOSEL sous les ordres du
Lieutenant-colonel Yark.

Discréditée par la légèreté de comportement dont témoignent ces
incidents particulièrement révélateurs et ébranlée par ces éléments de
résistance, la CENI, d’où les représentants de l’UFC ont démissionné le
jour même de la première proclamation des résultats, annonçait par une
déclaration sa décision « Face à cette situation délétère et aux
innombrables questions restées sans réponses, et dans un souci
d’apaisement permanent, (…) de ne pas procéder à la proclamation des
résultats provisoires de Lomé Commune. » Et la déclaration de
poursuivre : « La CENI transmettra un rapport complet à la Cour
Constitutionnelle sur le cas particulier de la circonscription
électorale de Lomé Commune et sur l’ensemble du processus électoral ».

Quels enjeux ?

En fait, le report de la CENI à la Cour constitutionnelle de la
proclamation des résultats de la Commune de Lomé cache des enjeux
absolument importants pour le RPT qui tournent autour d’une seule
question : la nécessité de faire annuler des bulletins de vote en
faveur de l’UFC pour faire élire la tête de liste de ses candidats pour
la Commune de Lomé : Kondi Agba, l’actuel ministre de la santé dans le
gouvernement dirigé par Yawovi Agboyibo. C’est la dernière des
machinations et manipulations concoctées de main de maître par les
laboratoires du RPT pour lui permettre de faire main basse sur la
nouvelle assemblée où elle compte dicter sa loi sans contestation. Il
convient de préciser que, dans sa stratégie de contrôle absolu sur la
nouvelle assemblée, le RPT table sur la complicité du CAR avec lequel
il a visiblement passé un pacte secret. Pour comprendre le tout, il
faut partir de l’analyse de la configuration qui serait celle de la
future assemblée en cherchant d’abord à mieux comprendre pourquoi les
laboratoires du RPT ont planifié les trucages appropriés tant dans le
Nord que dans le Sud du Togo pour imposer les résultats préfabriqués
qui ont été annoncés par la CENI.

Car une analyse attentive des résultats confrontée aux informations
provenant des militants sur le terrain montre qu’il y a effectivement
eu préfabrication de ces résultats pour les enjeux que voici.

Sur les 81 députés que devrait compter la prochaine assemblée, les
laboratoires du RPT ont fait les choix suivants, les préfectures ayant
été érigées en circonscriptions électorales par le Code électoral :

— 1°) de faire « rafler » au compte du RPT presque tous les députés de
l’ensemble des préfectures du Nord du pays qu’il présenterait
faussement, par esprit régionaliste, comme étant son « fief électoral »
où les partis de l’opposition, surtout l’UFC, auraient eu du mal à
avoir une solide implantation et un électorat conséquent, ce qui est
faux ! C’est ce qui explique que le RPT s’est octroyé tous les députés
de ces préfectures sauf un dans la préfecture de Tchaoudjo (chef lieu
Sokodé) où après avoir littéralement « inversé », par toutes sortes de
manipulations électorales, les vrais résultats marqués par un large
triomphe de l’UFC, il a dû faire le choix de laisser à ce parti un
siège.

— 2°) d’octroyer au RPT quelques sièges dans certaines circonscriptions
électorales du Sud du pays soigneusement choisis d’avance (Danyi,
Kloto, Est-Mono, Moyen-Mono, Ogou, Agou, Amou, Haho, etc.) pour faire
accroire que, contrairement aux partis de l’opposition, il est le seul
parti politique au Togo à disposer d’une implantation nationale.

— 3°) d’octroyer à son allié du CAR avec lequel il a conclu un pacte,
toujours par esprit régionaliste, les sièges du pays Ouatchi dont est
originaire son leader, Me Yawovi Agboyibo, c’est-à-dire les préfectures
de Yoto et de Vo. Sachant que l’UFC y a une très forte implantation,
surtout dans le Vo, la stratégie a consisté à organiser d’une part la
terreur contre les militants de l’UFC dans le Yoto pour arriver à
imposer une « inversion » des vrais résultats pour lesquels, selon des
sources dignes de foi, seul Me Yawovi Agboyibo aurait été élu sur les
trois députés de la circonscription électorale. Quant à la préfecture
de Vo, une autre stratégie a d’autre part été utilisée consistant à y
organiser un record d’annulation de bulletins de vote (12 414 bulletins
nuls !) exprimés surtout en faveur de l’UFC qui, normalement aurait dû
rafler les trois sièges en compétition. C’est dans ces conditions que
la proclamation de l’élection de Dodji Apevon a été imposée. C’est donc
au nom de ce pacte que, dès le vendredi 19 octobre, soit exactement
cinq jours après le scrutin du 14 octobre, Me Gahoun Hegbor,
vice-président du CAR, déclarait que son parti était disposé à entrer
dans un gouvernement d’union nationale avec le RPT, dans l’entretien
télévisé qu’il a eu sur le plateau de la chaîne publique de télévision,
la TVT (Télévision togolaise). Il convient par ailleurs de préciser que
le pacte CAR – RPT n’a pour autre fondement que la terrible haine
viscérale que vouent ces deux partis à l’UFC et qui s’est tout
particulièrement singularisée, en ce qui concerne le CAR, par les
terribles dénigrements qu’il a orchestrés contre ce parti allant
jusqu’aux voies de fait contre ses militants dans le Yoto et qui ont
fait l’objet d’une condamnation formelle même par les forces de
sécurité. Dans le contexte post électoral de la gestion conjointe de
l’Assemblée nationale (et du gouvernement !) sur la base du pacte CAR –
RPT, les responsables du CAR cacheront mal qu’ils prennent ainsi leur
revanche sur l’UFC qui, malgré sa victoire, ne peut qu’étaler à leurs
yeux son impuissance alors qu’eux prolongent leur contrôle commun sur
l’ensemble des institutions dont l’UFC est exclu.

A l’analyse, c’est à travers ces trois opérations que les laboratoires
du RPT ont dû avoir fait le calcul de mettre leur parti à l’abri de
tout blocage à venir à l’Assemblée nationale en permettant à la
coalition CAR – RPT d’y disposer d’une majorité qualifiée. Ainsi, sur
les 81 députés que compte cette assemblée, il faut au pacte CAR – RPT
54 députés pour avoir la majorité qualifiée des 2/3 qui lui permettrait
d’y imposer toutes ses décisions soit, avec les 4 députés du CAR qui
ont été « obtenus » dans les conditions que nous avons vues plus haut,
50 députés à « apporter » par le RPT.

Tout l’enjeu de la bataille autour de la proclamation des résultats de
la Commune de Lomé se trouve en fait là car, pour l’instant, avec ses
49 députés, le RPT ne remplit pas son contrat pour la conclusion du «
pacte » pour la majorité qualifiée au niveau de l’Assemblée nationale.
C’est pourquoi il tente, sans succès jusqu’à présent, de faire annuler
un nombre conséquent de bulletins de vote en faveur de l’UFC dans la
circonscription électorale de Lomé Commune, la dernière dont les
résultats doivent être proclamés, pour y faire élire la tête de liste
RPT, Kondi Agba.

Une nouvelle phase de la guerre à l’intérieur du RPT

N’étant pas arrivé à faire proclamer au compte du RPT le siège qu’il
convoite pour la Commune de Lomé, le très RPTiste Tozim Potopéré a
refilé cette patate chaude à la Cour constitutionnelle où il espère que
Aboudou Assouma, qui était un conseiller juridique de Faure Gnassingbé
avant qu’il ne le nomme à la présidence de cette institution, le fera
d’autorité d’autant plus que les décisions de la Cour constitutionnelle
sont sans appel.

Pour le RPT en général et Faure Gnassingbé en particulier, la
proclamation de l’élection de Kondi Agba est d’autant plus impérative
qu’il s’insère comme une donnée de la guerre entre clans qui déchire
l’appareil RPTiste jusqu’au sommet de l’Etat où les deux frères, Faure
et Kpatcha, s’affrontent.

Or, il est de notoriété publique que Kpatcha convoite la présidence de
l’Assemblée nationale comme le confirme d’ailleurs un récent article du
journal français Le Monde du 20 octobre dernier dans les termes
suivants : « En août dernier, des bruits de coup d’Etat, qu’il (Kpatcha
- ndlr) aurait alors envisagé contre don demi-frère, le président, ont
étayé l’hypothèse d’une rivalité entre les deux héritiers. Le Togo
s’apprêterait-il à vivre une nouvelle tragédie shakespearienne ? (…)
Mais élu député, Kpatcha Gnassingbé pourrait chercher à défier son
frère en se faisant élire président de l’Assemblée nationale et devenir
ainsi le deuxième personnage de l’Etat, qui remplace le président en
cas d’« empêchement définitif » selon la Constitution. »

Depuis la proclamation des résultats des législatives tels qu’ils ont
été fabriqués au profit du RPT tout particulièrement dans le Nord du
pays, Faure Gnassingbé sait qu’il est « cuit », à la merci de son
demi-frère Kpatcha qui est très loin de ne lui vouloir que du bien. Et
c’est pour contrer la conquête de la présidence de l’Assemblée
nationale par Kpatcha que la fraction du RPT regroupé autour de Faure
aurait, selon les informations venant du sérail, décidé de le contrer à
ce poste en positionnant Kondi Agba, un proche de Faure qu’on
présenterait comme un « intellectuel » qui siérait mieux à la
présidence de cette institution que Kpatcha, présenté comme une « brute
». Nostalgique de faire retourner le Togo aux méthodes dictatoriale de
son père, ce dernier n’a, en effet, pas hésité à déclarer au
journaliste du Monde, auteur de l’article précité : « Je défends à 100
% l’héritage de mon père. (…) Comme lui, je n’aime pas le désordre ».

Kondi Agba finalement coopté à Lomé, parviendra-t-il à relever le
véritable défi : être porté à la présidence de l’Assemblée nationale ?
Ou bien le clan regroupé autour de Kpatcha arrivera-t-il, quitte à
faire perdre au RPT le bénéfice de la majorité qualifiée à l’Assemblée
nationale, à jouer de la terrible influence que lui confère la fortune
colossale que celui-ci détient pour le faire éliminer de la course pour
ouvrir la voie de la présidence de l’Assemblée à Kpatcha. Il est à
penser que ce dernier, qui a déjà beaucoup « investi » pour ces
élections législatives, ne l’a pas fait pour se voir souffler par un
autre « frère » le premier fauteuil d’une institution parlementaire qui
lui ouvrirait, si l’« empêchement définitif » prévu par la Constitution
venait à survenir (ou à être organisé ?), la voie d’un autre fauteuil,
encore plus prestigieux : celui de la présidence de la République.

On savait que la guerre au sein du clan des Gnassingbé entrerait dans
une nouvelle phase après les élections législatives mais on était loin
de penser qu’elle surviendrait aussi tôt. Elle peut avoir même avoir,
pour le Togo, des conséquences tout à fait imprévisibles pour
lesquelles les forces démocratiques devraient s’atteler à aider le
peuple togolais à se réorganiser dès à présent au lieu de le laisser
s’enfoncer dans la démoralisation comme c’est le cas actuellement.


La rédaction letogolais.com
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