Le Collectif des Antillais, Guyanais, Réunionnais et Mahorais
à M. Patrick de Carolis ,
Président de France Télévisions
Paris, le lundi 18 décembre 2007
Monsieur le Président,
Comme vous le savez, le Collectif Dom a confié à son avocat, Me Gilbert Collard , le soin d’engager une plainte contre Pascal Sevran suite aux propos révoltants que ce dernier a tenus lors d’une interview retranscrite par Var Matin et publiée le 2 décembre dernier.
Nous avons pris acte de la mise en garde adressée par France 2 à Pascal Sevran et surtout de votre volonté d’ajouter dorénavant aux contrats des animateurs de France Télévisions une clause les invitant à surveiller les propos tenus publiquement en dehors de l’antenne. Sachez que le Collectif Dom ne doute pas un seul instant des principes antiracistes et républicains qui vous animent.
Ceci étant, l’attitude de France Télévisions dans cette affaire s’est principalement appuyée sur les excuses que Pascal Sevran aurait publiquement exprimées. Permettez-nous de douter de la sincérité de ces excuses et même de leur réalité.
M. Sevran n’a jamais renié ses propos ni déploré de les avoir tenus. Il a simplement regretté qu’ils aient pu choquer. Il a retiré le mot de stérilisation, mais il a clairement développé l’idée en s’appuyant - malencontreusement, c’est le moins qu’on puisse dire - sur l’exemple chinois, lequel est loin de faire l’unanimité parmi les défenseurs des Droits de l’homme parmi lesquels j’ai l’honneur de figurer.
Les prétendues excuses de Pascal Sevran n’ont été accompagnées d’aucune proposition concrète de nature à réparer sa faute, puisque ladite faute n’a pas été reconnue par l’intéressé.
Il y a plus. Pascal Sevran s‘est excusé auprès de tout le monde, c'est-à-dire auprès de personne. La moindre des choses eût été que l’animateur présentât au tout premier chef des excuses aux plaignants, c'est-à-dire à nous mêmes. Il n’en a rien été.
Le témoignage récent et accablant de Claudy Siar www.alert2neg.com/article-4905450.html démontre par ailleurs de la manière la plus claire, pour ceux qui en auraient encore douté, que Pascal Sevran est inscrit dans le racisme le plus primaire. Non seulement dans les propos, mais aussi dans le comportement, y compris dans le cadre de ses activités à la télévision. « En 1984, alors que j’étais danseur figurant pour la SFP, explique Claudy Siar , je n’ai pu participer qu’à une seule émission de Pascal Sevran, La croisée des chansons, parce qu’aux dires de l’assistante qui a mis un terme à ma collaboration et à celle d’un autre danseur noir, Pascal Sevran ne souhaitait pas avoir de noirs sur son plateau. Cela est facilement vérifiable. A ce titre, Pascal Sevran est probablement le dernier dans le PAF à avoir intégré des chanteurs et danseurs noirs dans son émission ». Et Claudy SIar de préciser : « En mars dernier, dans le cadre de l’Eurovision, j’ai animé six quotidiennes sur France 3, dans lesquelles étaient notamment présentés les candidats issus de la sélection de Pascal Sevran. Le 14 mars, j’ai co-présenté avec Michel Drucker la finale française de l’Eurovision. Et le 20 mai, toujours aux côtés de Michel Drucker, j’ai commenté depuis Athènes l’Eurovision 2006. Avant et après le 14 mars et jusqu’au 20 mai, Pascal Sevran s’est évertué à dire que ces programmes étaient présentés par…Michel Drucker ! Il n’a jamais mentionné mon nom et lorsque des images de la finale du 14 mars étaient diffusées dans son émission, il s’est arrangé pour que l’on me voie le moins possible et que surtout on n’entende jamais ma voix. Ce que j’affirme est une nouvelle fois facilement vérifiable. Et à France Télévisions beaucoup de professionnels, sans jamais rien dire, ont été choqués par cette attitude à mon égard, par ce véritable ostracisme. »
Ces accusations, Monsieur le président, sont extrêmement graves. Nous connaissons, tout comme vous, l’honnêteté et le professionnalisme de Claudy Siar. Il n’est pas homme à s’exprimer à la légère sur cette question. Puisque les faits qu’il relate sont, d’après lui, « facilement vérifiables », vous en aurez sans doute confirmation sans la moindre difficulté.
Nous comprenons l’attitude que vous avez adoptée en donnant en quelque sorte un sursis à Pascal Sevran, mais nous ne pouvons cependant l’approuver. Son maintien à l’antenne est incompatible avec la sévère réprobation qui a été exprimée, tant par la chaîne que par vous-même. Elle a amené le gouvernement du Niger à déposer une plainte. D’autres États d’Afrique et de la Caraïbe imiteront demain le Niger sans attendre le prochain sommet franco-africain prévu à la mi-février. Mais il y a plus grave. L’absence de sanction exemplaire expose à une radicalisation, non seulement du racisme visant les Africains et les Antillais, mais de l’attitude gesticulatoire de ceux qui ne manqueront pas de monter cette affaire en épingle pour tenter de faire parler d’eux. C’est ainsi que vendredi dernier, s’est présenté devant vos bureaux un groupuscule qui se dit porte-parole des « noirs » de France et dont un document annexé vous informera sur la réelle représentativité. Ce groupuscule prétendument représentatif, qui heureusement ne peut revendiquer que 80 adhérents (62 personnes physiques et 18 associations à jour de leur cotisation), affiche un racisme à rebours tout aussi condamnable dans le principe que celui de M. Sevran et peut être plus dangereux encore. La manifestation sauvage organisée devant France Télévision ne réunissait en tout et pour tout que10 personnes. Cela n’a pas empêché les « noiristes » du Cran, que vous avez été obligé de faire recevoir sous la contrainte du scandale, d’annoncer aussitôt dans un communiqué de victoire que vous aviez l’intention de leur accorder une entrevue, ce qui nous étonne. L’affaire a été récupérée par ceux qui voudraient utiliser politiquement ce qu’il faut bien appeler désormais l’affaire Sevran.
Demain, après les « noiristes » du Cran, ce sera la tribu Ka. Ces débordements entraîneront les réactions de ceux qui verront dans tout ce désordre un acharnement racial au motif que M. Sevran est un « blanc».
Il nous semble, Monsieur le Président, que vous pouvez très facilement mettre un point d’orgue à cette affaire déplorable. Si tel n’était pas le cas, nous sommes convaincus que l’affaire Sevran prendrait une ampleur démesurée et ouvrirait la porte à bien des dérives dont la France se passerait bien en ce moment. Au cas où vous en douteriez, je vous transmets un mail « humoristique » que je viens de recevoir et qui circule sur internet. Cela vous permettra de constater sur pièces que le maintien de Pascal Sevran à l’antenne est perçu par certains comme un encouragement à aller plus loin dans la voie obscène qu’il a tracée.
Nous nous permettons en tout cas, Monsieur le Président, de solliciter en urgence une entrevue afin de vous exprimer notre point de vue et tenter de trouver la meilleure solution avec vous.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de notre haute considération
Claude Ribbe,
Président du Collectif Dom
Mer 20 Déc - 14:50 par mihou