Le programme de versements égaux: Hydro exploite-t-elle les consommateurs?
Girard, Michel
Le tiers des clients résidentiels d'Hydro-Québec, soit 1 300 000 foyers, optent annuellement pour le programme " Mode de versements égaux ", surnommé MVE, lequel programme échelonne la note annuelle d'électricité sur 12 paiements mensuels égaux. Compte tenu des augmentations de tarifs subies au cours des 12 derniers mois, la majorité des clients se retrouvent de ce temps-ci aux prises avec une révision à la hausse de leur note mensuelle de MVE.
Hydro-Québec a haussé ses tarifs de 3 % le 1er janvier dernier et d'un autre 1,4 % le 1er avril.
Craignant d'être victimes d'une entourloupette de la part d'Hydro-Québec, des lecteurs se demandent si le programme MVE n'est pas devenu un moyen ratoureux pour Hydro-Québec de faire de l'argent sur le dos des consommateurs.
D'ailleurs, voici le courriel d'un lecteur (Guy P.) qui résume bien la méfiance que l'on peut avoir envers le programme MVE d'Hydro-Québec: " Hydro-Québec souffre de boulimie depuis toujours et encore plus avec les objectifs de rentabilité de plus en plus gourmands du gouvernement du Québec. Ils (les boss d'Hydro) doivent parfois même user d'imagination fertile. Alors puisque les augmentations tarifaires sont limitées, pourquoi ne pas augmenter les versements des clients qui optent pour le mode de versements égaux (MVE)? Ça représente une liquidité substantielle sans intérêts (à payer). Pour tous ceux donc qui recevront à l'automne une révision à la hausse de leurs versements (MVE) d'Hydro-Québec, il serait opportun de vérifier si la hausse est justifiée. À mon avis, c'est préférable financièrement de verser plus d'argent sur ses comptes de cartes de crédit (les intérêts allant de 18 % à 30 %) dans le but d'économiser des frais d'intérêt. Un simple suivi de ses factures d'électricité indiquera s'il faut vraiment augmenter ses versements d'Hydro-Québec. "
Revenons à la question de base: Hydro-Québec exploite-t-elle les clients qui optent pour le programme des versements égaux?
Réponse: NON!
" Après de multiples analyses et simulations de données, le MVE a été conçu de façon à être neutre sur le plan financier. Il ne favorise ni ne défavorise aucune des parties, soit Hydro-Québec et ses clients ", rétorque le porte-parole d'Hydro-Québec, Marc-Brian Chamberland.
Si la révision annuelle de la facture des adeptes du MVE est systématiquement effectuée en août et en septembre, ce n'est pas le fruit du hasard. C'est parce qu'il a été prouvé qu'il s'agissait de la période la plus efficiente de l'année pour compléter la récolte des données les plus significatives sur la consommation annuelle d'électricité et pour répartir ensuite la nouvelle note annuelle des 12 mois à compter du 1er septembre. Les préposés d'Hydro-Québec sillonnent donc la province pendant cette période estivale dans le but d'y effectuer le relevé des compteurs des clients du MVE.
À la lumière du profil de consommation moyen d'électricité par mois élaboré par Hydro-Québec à partir de ses données historiques, sachez que 50 % de la consommation annuelle d'électricité est effectuée de décembre à mars: 13 % en décembre, 14 % en janvier, 12 % en février et 11 % en mars.
Du 1er avril au 31 juillet, la consommation s'élève à 25 %: soit 9 % en avril, 6 % en mai, 5 % en juin et 5 % en juillet.
Reste donc un autre 25 % pour la période d'août à la fin novembre: soit 5 % en août, 5 % en septembre, 7 % en octobre et 8 % en novembre.
Pourquoi le nouveau cycle des 12 mois du MVE commence-t-il en septembre? Parce qu'il s'agit du mois de l'année qui " garantit la neutralité tarifaire ", explique Marc-Brian Chamberland. " C'est-à-dire que les clients qui sont réévalués au 1er septembre bénéficient d'un impact nul. L'impact des clients réévalués un peu avant ou un peu après (le 1er septembre) s'annule pratiquement. Il peut y avoir un écart de plus ou moins 2 $ sur une note annuelle de 1200 $. "
Les grands patrons d'Hydro-Québec jurent sur la tête des pylônes que le MVE n'exploite donc pas les clients résidentiels.
En ce qui concerne maintenant les quelque 2,6 millions de clients résidentiels qui payent leurs comptes sur réception de la facture, Hydro-Québec tient à leur rappeler qu'ils ne sont pas perdants à comparer aux services publics offerts par Bell Canada, Vidéotron et les autres câblodistributeurs.
Un, Hydro-Québec les facture seulement à tous les deux mois. Deux, la facture porte sur l'électricité consommée durant les deux mois précédant la date de facturation.
Par opposition, les services mensuels de Bell Canada sont facturés d'avance. À preuve, sur la facture portant la date de facturation du 25 août 2004, Bell Canada y facturait d'avance les services mensuels qui allaient être utilisés pendant le mois suivant, soit du 25 août au 24 septembre.
Pour leur part, les câblodistributeurs sont encore plus gourmands. J'ai devant les yeux une facture portant la date de facturation du 27 août 2004. Que vois-je? On y facture le client deux semaines d'avance pour des services (service de base, Télémax Plus, prises additionnelles) qui seront utilisés du 18 septembre au 17 octobre. On retrouve le même modèle sur la facture de Vidéotron portant sur le service " Accès Internet haute vitesse ".
Pourquoi fait-on payer les clients de Vidéotron si longtemps d'avance? Réponse du porte-parole de Vidéotron, Jean-Paul Galarneau: " Tous les câblodistributeurs facturent de cette façon. Le CRTC (Conseil de la Radio et de la Télévision du Canada) nous permet cela à cause des redevances que nous devons verser au début de chaque mois aux réseaux de télé par câble. "
Notons enfin que les abonnés de Gaz Métropolitain ont eux aussi la possibilité d'opter pour un programme de versements mensuels égaux. Dans le cas de Gaz Métro, on parle du " Mode de paiements égaux ", surnommé le MPÉ.
Le MPÉ répartit en 12 parts égales le montant de la note annuelle de Gaz Métro. Pour s'y abonner, il faut idéalement s'inscrire entre le 15 juin et le 15 juillet.
Tant dans le cas du MVE d'Hydro-Québec que du MPÉ de Gaz Métro, il s'agit d'un service auxquels les clients sont libres d'adhérer ou pas.