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 PROPANGANDA DE NOAM CHOMSKY 2

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mihou
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mihou


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Localisation : Washington D.C.
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26022006
MessagePROPANGANDA DE NOAM CHOMSKY 2

CHAPITRE 3 : Les relations publiques
Les États-Unis ont été les pionniers de l'industrie des relations publiques,
dont la mission
est de « contrôler l'opinion publique », comme l'ont expliqué ses promoteurs
qui ont su
tirer d'importantes leçons des succès de la commission Creel et de la
remarquable carrière
du mythe du péril rouge. L’industrie des relations - publiques a connu une
expansion
considérable à cette époque. Tout au long des années vingt, elle est parvenue
à obtenir de
la population une soumission presque totale aux règles imposées par le milieu
des
affaires. Le phénomène a pris une telle ampleur qu'au début des années trente,
des
comités du Congrès ont enquêté sur cette industrie. Nombre d'informations dont
nous
disposons proviennent de ces investigations.
Les relations publiques sont une industrie gigantesque qui dépense environ un
milliard de dollars chaque année. Son but a toujours été de contrôler
l'opinion publique.
Au cours des années trente, d'importants problèmes ont fait surface,
comparables à ceux
qui étaient survenus pendant la Première Guerre mondiale. Une grave récession
s'est
installée et les travailleurs se sont énergiquement organisés. En fait, en
1935, les
travailleurs ont remporté leur première victoire de taille, en l'occurrence la
reconnaissance de leur droit à s'organiser, entériné par la loi Wagner (1), ce
qui a donné
naissance à deux graves problèmes. D'une part, le système démocratique se
révélait
défaillant. Le troupeau dérouté était parvenu à remporter une victoire
législative, ce qui
n'est pas censé se produire. D'autre part, il devenait possible aux gens de
s'organiser. Ce
qu'on attendait d'eux, c'était qu'ils restent atomisés, séparés les uns des
autres, isolés. Les
gens ne sont pas supposés s'organiser, car ils pourraient alors devenir plus
que de simples
spectateurs. Ils pourraient aller jusqu'à prendre part à l'action, s'ils
étaient assez nombreux
à pouvoir s'organiser afin d'entrer dans l'arène politique même avec de
modestes moyens,
et cela est très dangereux. Le patronat adopta des mesures draconiennes pour
s’assurer
que cette victoire des travailleurs serait la dernière et qu'elle serait le
commencement de
la fin de cette déviation démocratique que constitue l'organisation populaire.
L'objectif
fut atteint.
Les travailleurs n'ont jamais remporté d'autre victoire législative. La
capacité d'agir des
syndicats s'est continuellement amenuisée à compter de ce moment - même si le
nombre
de syndiqués a augmenté durant la Seconde Guerre mondiale, il devait
rapidement
décroître après. Ce ne fut pas par hasard. Il faut y voir bien sûr l’oeuvre de
la
communauté des affaires qui a investi des sommes considérables et toute la
vigilance
nécessaire pour s'occuper de ces problèmes grâce à l'industrie des relations
publiques et
aux services d'autres organisations telles que, notamment, la National
Association of
Manufacturers (Association nationale des manufacturiers) et la Business
Roundtable
(Table ronde d'hommes d'affaires). La communauté des affaires a très vite
cherché le
moyen de couper court à ces déviations démocratiques.
1. En 1935, fut adoptée la loi fédérale sur les relations de travail, connue
sous le nom de loi
Wagner, du nom de son auteur. Entre autres choses, cette loi consacrait la
liberté d'association des
travailleurs, définissait le comportement antisyndical comme une " pratique de
travail déloyale »
et l'interdisait. La combativité des travailleurs pour imposer leurs
organisations syndicales dans les
usines à travers des campagnes de syndicalisation et des grèves sur le tas,
malgré les risques
encourus (fermeture d'usines principalement), fut évidemment un facteur
décisif dans l'adoption de
cette loi, ce qui était une importante victoire pour les travailleurs. La Cour
suprême des États-Unis
a confirmé la constitutionnalité de cette loi en 1937 (NdT).
La première occasion s'est présentée en 1937, année d'une grève d'une
importance
capitale, la grève des aciéries de Johnstown, dans l'ouest de la Pennsylvanie.
Le patronat
a mis à l'essai une nouvelle technique pour détruire les mouvements ouvriers,
méthode
qui s'est avérée très efficace. Il n'a pas fait appel aux escadrons de
gangsters ni à la
violence, car ce genre d'intervention ne donnait plus de bons résultats, mais
il a tiré parti
de l'outil bien plus subtil et efficace de la propagande. Le procédé
consistait à monter la
population contre les grévistes en les présentant comme des agitateurs
dangereux
pour la population, opposés au bien commun, le bien qui est commun à l'homme
d'affaires, au travailleur, à la femme au foyer, à nous tous qui voulons vivre
et travailler
ensemble, qui aspirons à l'harmonie et aux bienfaits de l'américanisme. C'est
contre «
nous tous » que se dressent ces grévistes qui ne sont que des agitateurs, des
fauteurs de
troubles qui détruisent l'harmonie et profanent les valeurs de l'américanisme.
Il faut donc
les arrêter pour pouvoir vivre tous ensemble. Le chef d'entreprise et le
balayeur ont des
intérêts identiques. Nous pouvons tous mettre nos efforts en commun et
travailler dans
l'harmonie pour l'Amérique, en nous aimant les uns les autres. Voilà
essentiellement le
contenu du message. On a consacré une monumentale énergie à le faire passer.
Après
tout, c'est de la communauté des affaires qu'il s'agissait, une communauté qui
contrôle les
médias et possède des moyens considérables. Et cela a marché. Le procédé a été
remarquablement efficace. Plus tard, on a appelé cette technique la « formule
de Mohawk
Valley » et on l'a systématiquement appliquée pour briser les grèves.
Qualifiée de «
méthode scientifique pour briser les grèves », elle s'est révélée très
efficace pour
mobiliser l'opinion publique en faveur de concepts creux comme celui de
l'américanisme.
Qui pourrait bien s'y opposer ou s'opposer à l'harmonie? Ou bien s'opposer au
slogan de
la guerre du Golfe: « Soutenez nos soldats » ; qui pourrait être contre? Ou
encore contre
les rubans jaunes à porter à la boutonnière? Qui pourrait être contre quelque
chose de
parfaitement creux?
En fait, quel sens aurait une question comme: « Soutenez-vous les gens qui
vivent en
Iowa? » Est-il possible de répondre « oui, je les soutiens » ou « non, je ne
les soutiens pas
» ? On ne pose pas une question pareille, cela n'a pas de sens. Et c'est bien
là le but. Le
but du slogan « Soutenez nos troupes» répandu par les services de relations
publiques est
de n'avoir aucun sens. Il n'a pas plus de sens qu'un slogan tel que « Soutenez
les gens de
l'Iowa ». Évidemment, dans le cas des troupes, il existait un enjeu que l'on
pourrait
formuler ainsi: « Approuvez vous notre politique? » Mais il n'est pas
souhaitable que le
peuple se pose ce genre de question.
Là réside le principe d'une bonne propagande. Il s'agit de créer un slogan que
personne ne puisse contester et tous l'approuveront. Ce slogan, personne n'a
jamais la
moindre idée de ce qu'il signifie, parce qu'il ne signifie rien. Son point
fort, c'est de
détourner l'attention du problème important, de la question qui, elle, a un
sens, comme: «
Approuvez vous notre politique? » C'est justement la question qu'il n'est pas
permis de
soulever. Mais, bien entendu, on peut donner son avis sur le soutien à nos
troupes. Et quel
est il cet avis? Il est que, « bien sûr, on ne peut pas ne pas les soutenir».
La partie est
gagnée.
C'est comme pour l'américanisme et l'harmonie. Nous sommes tous ensemble,
rallions
nous à des slogans creux, allons y de bon coeur, assurons nous que nous ne
permettrons
pas à des gens odieux de notre entourage de troubler notre harmonie en parlant
de lutte
des classes, de droits et de toutes ces sortes de choses.
Tout cela est d'une grande efficacité et continue à bien fonctionner de nos
jours. Bien
entendu, le phénomène est préparé avec beau, coup de minutie. Les gens qui
travaillent
dans l'industrie des relations publiques ne le font pas pour leur plaisir. Ils
travaillent. Ils
s'efforcent d'inculquer les valeurs appropriées.
Ils savent ce que doit être une démocratie, à savoir un régime politique dans
lequel la
classe des spécialistes reçoit une formation pour servir les maîtres, ceux qui
possèdent la
société. Le reste de la population doit être privé de toute possibilité de
s'organiser car
s'organiser, c'est provoquer des troubles. Les gens doivent rester assis
devant le
téléviseur, isolés les uns des autres, et se mettre dans le crâne le message
qui leur dit que
la seule ambition respectable dans la vie est d'acquérir davantage de biens
matériels ou de
vivre comme ces familles aisées de la classe moyenne que montre la télévision,
où seules
comptent les valeurs inestimables de l'américanisme et de l'harmonie. C'est
tout ce qui
importe dans la vie. On peut se dire dans son for intérieur qu'il doit bien y
avoir quelque
chose de plus dans la vie, mais, seul devant son téléviseur, que peut on
conclure, sinon
qu'il faut être fou pour penser ainsi puisque la télévision ne montre rien
d'autre? Et
puisqu’on ne permet pas aux gens de s'organiser - c'est un point crucial -, il
leur est
impossible de vérifier qu'ils ne sont pas fous de penser ce qu'ils pensent.
C'est normal de
penser cela, car c'est la première idée qui s'impose à l'esprit.
C'est donc là le modèle idéal et on déploie des efforts considérables pour
tenter de le
réaliser. De toute évidence, il s'agit d'un idéal reposant sur une conception
précise de la
démocratie; la seconde conception dont j'ai parlé. Le troupeau dérouté est un
problème. Il
faut l'empêcher de rugir et de tout piétiner. Il faut le distraire. Il faut
qu'il regarde à la télé
les championnats de football, les sitcoms ou les films violents. De temps en
temps, il est
bon de l'inciter à scander des slogans insipides comme « Soutenez nos soldats
». Il
importe aussi de l'effrayer car, faute d'être hanté par toutes sortes de peurs
et de démons
qui menacent de le détruire, chez soi comme à l'étranger, le troupeau pourrait
commencer
à penser, ce qui serait très dangereux parce qu'il n'a pas la compétence
requise pour le
faire. Par conséquent, il est important de le distraire et de le tenir à
l'écart.
Il s'agit d'une certaine conception de la démocratie. En fait, pour en revenir
à la
communauté des affaires, la loi Wagner de 1935 fut bien la dernière victoire
des
travailleurs. Une fois la guerre déclarée, on assista à l'affaiblissement des
syndicats et
au déclin de la riche culture de la classe ouvrière, qui était directement
reliée au
syndicalisme. Tout cela fut détruit. Nous sommes alors passés à une société
dominée à
un degré remarquable par le milieu des affaires. Nous sommes Punique société
industrielle au sein d'un État capitaliste à ne pas disposer des protections
sociales
élémentaires que l'on retrouve habituellement dans ces sociétés. Je crois que,
mis à part
l'Afrique du Sud, nous sommes la seule société industrielle à ne pas posséder
de régime
national de soins de santé. Notre société ne s'engage même pas à assurer le
minimum
nécessaire à la survie de ceux qui, dans la population, ne peuvent s'adapter
aux règles du
jeu et suffire eux-mêmes à leurs besoins. Les syndicats, ainsi que d'autres
formes de
mouvements populaires, sont à peu près inexistants. Il n'existe ni partis
politiques
proprement dits ni mouvements organisés. Il y a un long chemin à faire pour se
rapprocher d'une situation idéale, du moins d'un point de vue structurel.

Les
médias
appartiennent à un monopole d'affaires. Tous propagent les mêmes idées. Les
deux partis
politiques sont deux factions du parti des affaires. La plupart des gens ne se
donnent
même pas la peine de voter, car cela n'a aucun sens. Chaque personne est dans
sa tour
d'ivoire et on l'incite habilement à se divertir. Du moins est~ce là le but
poursuivi.
D'ailleurs, Edward Bernays, chef de file du secteur des relations publiques,
venait de la
commission Creel. Il en faisait partie, il y a fait son apprentissage et l'a
poursuivi en
développant le concept de la « fabrication du consentement» qu'il décrivait
comme l' «
essence de la démocratie». Ceux qui sont capables de fabriquer le consentement
sont
ceux qui disposent des ressources et du pouvoir, à savoir la communauté des
affaires, et
c'est pour eux que l'on travaille.
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