mihou Rang: Administrateur
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| | La nébuleuse Fatah Al Islam | |
La nébuleuse Fatah Al Islam <img alt="Convertir en PDF" align="middle" border="0">Ecrit par Seymour Hersh, le 23-05-2007 (228 hits) <img title="" style="margin: 0px;" alt="" align="left" height="124" width="109">Le changement de cap Seymour Hersh, 5 mars 2007 Ces derniers mois, tandis que la situation en Irak se détériorait, l'administration Bush, à la fois dans sa diplomatie publique et dans ses opérations occultes, a infléchi de manière importante sa stratégie au Moyen-Orient. Le «changement de cap», comme certains nomment cette nouvelle stratégie à la Maison blanche, a rapproché les États-Unis d'une confrontation ouverte avec l'Iran et, dans plusieurs endroits de la région, les ont projetés dans un conflit de plus en plus ouvert entre musulmans chiites et sunnites.
Pour miner l'Iran, qui est principalement chiite, l'administration Bush a décidé, en effet, de revoir ses priorités au Moyen-Orient. Au Liban, l'administration a collaboré avec le gouvernement de l'Arabie séoudite, qui est sunnite, dans des opérations clandestines destinées à affaiblir le Hezbollah, l'organisation chiite soutenue par l'Iran. Les États-Unis sont par ailleurs impliqués dans des opérations clandestines contre l'Iran et son allié syrien. Une conséquence de ces activités a été le soutien à des groupes extrémistes sunnites qui adoptent une vision militante de l'islam, qui sont hostiles à l'Amérique et qui ont de la sympathie pour Al Qaeda.
Un aspect contradictoire de cette nouvelle stratégie est que, en Irak, la plupart des violences des insurgés contre les militaires américains viennent de forces sunnites, et non chiites. Mais, dans l'optique adoptée par cette administration, la conséquence stratégique la plus profonde – et inattendue – de la guerre en Irak a été le renforcement de l'Iran. Son président, Mahmoud Ahmadinejad, a fait des déclarations provocantes au sujet de la destruction d'Israël et du droit de son pays à poursuivre son programme nucléaire; et la semaine dernière son guide religieux suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, a déclaré à la télévision d'État que «les réalités de la région montrent que le front de l'arrogance, dirigé par les États-Unis et leurs alliés, sera le principal perdant dans cette région.»
Après la révolution de 1979 qui a mené au pouvoir un gouvernement religieux, les États-Unis ont rompu avec l'Iran et se sont rapprochés des États arabes sunnites tels que la Jordanie , l'Égypte et l'Arabie séoudite. Le calcul devint plus complexe après les attaques du 11 Septembre, en particulier par rapport aux Séoudiens. Al Qaeda est sunnite, et nombre de ses exécutants venaient de cercles extrémistes d'Arabie séoudite. Avant l'invasion de l'Irak, en 2003, des officiels de l'administration, influencés par les idéologues néoconservateurs, ont pensé qu'un gouvernement chiite y fournirait un contrepoids pro-américain aux extrémistes sunnites, de plus la majorité chiite irakienne avait été oppressée sous Saddam Hussein. Ils ont ignoré les avertissements de la communauté du renseignement quant aux liens entre les dirigeants chiites irakiens et l'Iran, où certains avaient vécu en exil pendant plusieurs années. Aujourd'hui, au grand dam de la Maison blanche, l'Iran renforce ses relations avec le gouvernement dominé par les chiites du Premier ministre Nuri al-Maliki.
La nouvelle politique américaine, dans ses grandes lignes, a été discutée publiquement. Dans son témoignage devant le Comité des affaires étrangères du Sénat en janvier, la Secrétaire d'État Condoleeza Rice a déclaré qu'il y avait «un nouvel axe stratégique au Moyen-Orient», séparant «les réformateurs» et les «extrémistes»; elle désigna les États sunnites comme des centres de modération, et expliqua que l'Iran, la Syrie et le Hezbollah étaient «de l'autre côté de la ligne de démarcation». (La majorité sunnite de Syrie est dominée par la secte alaouite.) L'Iran et la Syrie , dit-elle, «ont fait leur choix et leur choix est celui de la déstabilisation.»
Certaines des stratégies principales du changement de cap n'ont cependant pas été rendues publiques. Les opérations clandestines ont été tenues secrètes, dans certains cas, leur exécution ou leur financement étant soustraités aux Séoudiens, ou en trouvant d'autres voies de contournement du processus normal du contrôle financier par le Congrès, comme l'ont expliqué des officiels anciens et actuels de l'administration.
Un membre important du Comité des finances de la Chambre m'a dit qu'il avait entendu parler de la nouvelle stratégie, mais avait senti que ni ses collègues et ni lui n'avaient été correctement informés. «Nous ne savons rien sur ce sujet», a-t-il dit. «Nous demandons des informations sur ce qu'il se passe, et ils disent qu'il ne se passe rien. Et quand nous posons des questions précises, ils répondent “nous vous informerons plus tard.” C'est tellement frustrant.»
Les principaux acteurs du changement de cap sont le vice-président Dick Cheney, le conseiller à la Sécurité nationale Elliott Abrams, l'ambassadeur bientôt remplacé en Irak (et pressenti pour le poste d'ambassadeur aux Nations unies), Zalmay Khakikzad, et le prince Bandar bin Sultan, le conseiller séoudien à la Sécurité nationale. Alors que Rice était profondément impliquée dans la définition de la politique publique, des officiels anciens et actuels disent que le volet clandestin a été conduit par Cheney. (Le bureau de Cheney et la Maison blanche ont refusé de commenter cet article; le Pentagone n'a pas répondu aux questions précises mais a précisé, «Les États-Unis ne préparent une guerre avec l'Iran.»)
Le changement de politique a amené l'Arabie séoudite et Israël à une nouvelle alliance stratégique, en grande partie parce que ces deux pays considèrent l'Iran comme une menace existentielle. Ils ont été impliqués dans des discussions directes et les Séoudiens, qui pensent qu'une plus grande stabilité en Israël et Palestine donnerait moins d'influence à l'Iran dans la région, sont devenus plus actifs dans les négociations arabo-israéliennes.
La nouvelle stratégie «est un changement de cap important dans la politique américaine – c'est un changement très important», a expliqué un consultant gouvernemental américain ayant de forts liens avec Israël. Les États sunnites «étaient pétrifiés à l'idée d'une résurgence chiite, et ils exprimaient un ressentiment croissant à l'encontre de notre choix de soutenir les chiites modérés en Irak», a-t-il dit. «Nous ne pouvons pas revenir sur la montée chiite en Irak, mais nous pouvons la limiter.»
«Il semble qu'il y ait eu un débat au sein du gouvernement pour savoir quel était le plus grand danger – l'Iran ou les radicaux sunnites», m'a expliqué Vali Nasr, un membre important du Conseil sur les Affaires étrangères, qui a beaucoup écrit sur les chiites, l'Iran et l'Irak. «Les Séoudiens et certains membres de l'administration ont soutenu que le plus grand danger était l'Iran et que les extrémistes sunnites étaient des ennemis moins importants. C'est une victoire de la ligne séoudienne.»
Martin Indyk, un officiel du Département d'État dans l'administration Clinton, qui a également été ambassadeur en Israël, a dit que «le Moyen-Orient est en train de s'échauffer autour d'une sérieuse guerre froide entre sunnites et chiites.» Indyk, qui dirige le Centre Saban pour la politique au Moyen-Orient à la Brookings Institution , a ajouté que, selon lui, il n'était pas clair si la Maison blanche était bien consciente des implications stratégiques de sa nouvelle politique. « La Maison blanche n'est pas seulement en train de doubler la mise en Irak», a-t-il expliqué. «Elle est en train de doubler la mise dans toute la région. Cela pourrait devenir très compliqué. Tout est sans dessus dessous.»
La nouvelle politique de l'administration pour contenir l'Iran semble compliquer sa stratégie pour gagner la guerre en Irak. Patrick Clawson, un expert sur l'Iran et directeur de recherche adjoint au Washington Institute pour la politique au Proche-Orient, a cependant soutenu que le renforcement des liens entre les États-Unis et les sunnites modérés et même radicaux pourrait «effrayer» le gouvernement du Premier ministre Maliki et «le laisser craindre que les sunnites pourraient réellement gagner» la guerre civile là-bas. Clawson a expliqué que cela pourrait inciter Maliki à coopérer avec les États-Unis pour supprimer les milices radicales chiites, telles que l'Armée du Mehdi de Moqtada as-Sadr.
Même ainsi, pour le moment, les États-Unis demeurent dépendants de la coopération des dirigeants chiites irakiens. L'armée du Mehdi est peut-être ouvertement hostile aux intérêts américains, mais d'autres milices chiites figurent parmi les alliés des États-Unis. Moqtada as-Sadr comme la Maison blanche soutiennent Maliki. Un mémorandum écrit l'année dernière par Stephen Hadley, un conseiller à la Sécurité nationale, a suggéré que l'administration essaie de séparer Maliki de ses alliés chiites les plus radicaux, mais jusqu'à présent la tendance a été exactement dans le sens contraire. Tandis que l'armée irakienne continue de sombrer dans sa confrontation avec les insurgés, le pouvoir des milices chiites augmente constamment.
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Lun 28 Mai - 11:08 par mihou