Le moral des cotonculteurs africains est au plus bas : alors que les caisses des sociétés cotonnières sont vides, rien ne
semble à même d’enrayer la détérioration du marché avec des cours stagnant la semaine dernière dans la zone des 50 cents
la livre. Si personne ne comptait vraiment sur une issue favorable à l’Organisation mondiale du Commerce, où les Etats-Unis
ont encore refusé de céder sur les subventions directes à l’agriculture - dont les 4 milliards réservés au coton - beaucoup
espéraient un léger mieux du fait de la disparition des subventions à l’exportation qui s’appliquera à partir du 1er août
prochain. Il s’agit d’une somme plus modeste, 186 millions de dollars distribués aux exportateurs. Or pour l’instant, cette
décision obtenue à l’issue d’une plainte du Brésil contre les Etats-Unis, au lieu de doper les cours, les aurait plutôt fait
plonger. Explication avancée par le négoce : les Américains, souhaitant tirer le plus grand profit de ces aides accordées à
l’embarquement jusqu’à la fin du mois, ont envoyé le maximum de cargaisons vers la Chine, le premier pays consommateur, et
surtout celui qui a développé depuis deux ans la consignation, une technique commerciale qui autorise l’exportateur à
expédier sa marchandise avant d’avoir trouver preneur.
Dans un premier temps, la hausse des ventes américaines a favorisé la remontée des cours, les intervenants du marché
pensant que ce regain d’activité correspondait à une demande réelle, mais cet effet aura été de courte durée. On accuse
maintenant les Américains d’avoir artificiellement gonflé ces stocks consignés, d’où la tendance baissière du marché. Mais
cette vision ne fait pas l’unanimité, certains estiment au contraire que la perspective de la fin des subventions à l’exportation
n’a pour l’instant pas eu d’impact sur le marché. Premièrement parce qu’il n’y a pas que le coton américain qui attend preneur
en consignation, la plupart des origines sont à la disposition des consommateurs chinois, deuxièmement le volume disponible
dans les ports de Chine a reculé sans que les cours remontent.
Alors si ce n’est pas du côté du principal vendeur - les Etats-Unis représentent 40 % du volume des exportations - qu’il faut
chercher la cause du marasme actuel, cela ne peut être que du côté du premier consommateur, la Chine. Après avoir acheté 2
600 000 tonnes de fibre cette année, Pékin n’a toujours pas émis de nouveaux certificats d’importation, et c’est l’attente de
cette décision qui tient aujourd’hui le marché en haleine. L’Association cotonnière chinoise a carrément annoncé qu’il n’y
aurait plus d’importations avant 2007. Une nouvelle qui relève plus de la propagande que de l’information. Il est vrai que si
cela se confirmait, avec ou sans la suppression des subventions américaines à l’exportation, cela compliquerait sérieusement
les derniers mois de l’année, puisqu’on escompte encore vendre un million de tonnes de coton aux Chinois.
par Dominique Baillard
http://www.rfi.fr/actufr/articles/079/article_44792.asp