Noms communs : riz sauvage, zizanie.
Noms scientifiques : Zizania palustris, Zizania aquatica, Zizania texana.
Famille : poacées (synonyme : graminées).
POURQUOI METTRE LE RIZ SAUVAGE AU MENU?
* Il est nutritif, savoureux et éminemment polyvalent.
* Il donnera de la personnalité aux préparations à crêpes.
* Dans une salade froide, il est rafraîchissant.
Quelques mots sur le riz sauvage...
Bien qu'il s'agisse aussi d'une graminée (comme le blé, l'orge et l'avoine), le riz sauvage, dont le nom officiel est zizanie, n'appartient pas au même genre que le riz commun. Le nom de « riz sauvage » lui a été donné parce que, tout comme son cousin asiatique, il pousse dans les endroits humides.
Le riz sauvage au fil du temps
Apparu dans la langue à la fin du XIIIe siècle, le terme « zizanie », dont l'origine est sémitique, a d'abord désigné l'ivraie, mauvaise herbe poussant dans les champs de blé, puis de façon figurée, la discorde, les disputes. Depuis 1829, il désigne les graminées appartenant au genre Zizania.
Le nom « riz sauvage » a été donné à la zizanie par les colons fraîchement débarqués dans le Nouveau Monde parce que, tout comme le riz, elle pousse dans l'eau. Cependant, le riz appartient plutôt au genre Oryza.
Manoomin, nom que les Anishnaabegs donnent au riz sauvage, signifie « bon grain » ou « bonne baie ».
Les Amérindiens récoltent, font sécher et consomment le riz sauvage depuis des milliers d'années. Sa richesse en protéines et en hydrates de carbone en fait un aliment de premier ordre et son importance était telle pour les tribus vivant dans la région des Grands Lacs qu'il comptait pour 25 % de la ration quotidienne.
Plante sacrée s'il en est, le riz sauvage a donné lieu à de nombreux mythes et légendes entourant sa création et celle des peuples qui s'en nourrissaient, particulièrement chez les Ojibwés, ou Anishnaabegs, comme ils préfèrent s'appeler. À la lune d'automne, la « lune du riz sauvage », ils établissaient leurs camps près des lacs et, pendant les quelques semaines que durait la récolte, ils passaient leurs journées sur l'eau à remplir leurs canots de la précieuse manne, tandis que les soirées étaient consacrées à sécher le grain près du feu tout en écoutant les conteurs rappeler le long périple des ancêtres vers l'Ouest, en quête d'une terre d'accueil. On invoquait les esprits pour leur demander une bonne récolte et on les remerciait ensuite en leur offrant de petits récipients de riz sauvage qui étaient placés dans les endroits où ils étaient censés se trouver. C'était, en quelque sorte, l'Action de grâce à la manière amérindienne.
Semer la zizanie
Dans le contexte de l'agriculture industrielle, l'expression « riz sauvage » perd tout son sens puisque la zizanie cultivée diffère considérablement de sa cousine sauvage. D'où une récente réglementation adoptée au Minnesota stipulant que les emballages de zizanie cultivée doivent porter la mention paddy rice (riz cultivé) accolée au nom générique wild rice. Toutefois, cette réglementation ne vaut que pour la zizanie produite au Minnesota.
On connaît quatre espèces de Zizania, dont une originaire de l'Asie et trois de l'Amérique du Nord, où elles occupent les eaux peu profondes des lacs et rivières, depuis l'extrémité nord du lac Winnipeg jusqu'au golfe du Mexique vers le sud, et jusqu'à l'Atlantique vers l'est. Toutefois, c'est au nord et à l'ouest des Grands Lacs, où pousse l'espèce Z. palustris, que se sont surtout concentrées les activités entourant la récolte et le traitement de cette plante par les Amérindiens. Dans cette vaste région qui couvre le Minnesota, le Michigan et le Wisconsin, de même que l'Ontario et le Manitoba, le riz sauvage est encore largement consommé par les Anishnaabegs, de même que les Menominees, le « peuple du riz sauvage ».
Dans les années 1950, les Américains ont entrepris des travaux destinés à domestiquer la zizanie afin d'augmenter sa productivité et faciliter sa récolte par des moyens mécaniques. Quelques variétés ont été sélectionnées et, depuis les années 1970, on les cultive à grande échelle sur des terres marécageuses selon des méthodes s'apparentant à celles que l'on emploie pour le riz : construction de digues permettant d'inonder le sol au printemps et d'évacuer l'eau à l'automne, mécanisation des opérations de semis, d'éclaircissage et de récolte, recours aux engrais, herbicides, fongicides, insecticides chimiques, etc. Après la récolte, le grain est expédié vers des usines de transformation en vue d'être séché et décortiqué. La plus grande partie de la zizanie offerte dans le commerce provient aujourd'hui de ce type d'exploitation.
À côté de ces grandes cultures, subsiste une petite industrie artisanale, maintenue essentiellement par les Amérindiens qui récoltent à la main le grain des peuplements naturels et le sèchent sur place comme le faisaient leurs ancêtres. Il va sans dire que le volume de production est très faible et que les coûts de la main-d'oeuvre sont élevés, mais les gourmets soutiennent que la saveur et la texture du grain ainsi traité sont nettement supérieures à ceux de la zizanie cultivée.
Usages culinaires
Bien choisir
Pour s'assurer que l'on a affaire à du riz véritablement sauvage, vérifier que l'emballage comporte l'une ou l'autre des mentions suivantes : lake wild rice, hand-picked wild rice, hand-harvested wild rice (riz sauvage de lac, riz sauvage ramassé ou récolté à la main).
Préparation
Rincer le riz à l'eau courante avant de le cuire. Calculer environ une tasse de riz pour trois tasses d'eau. On pourra le cuire sur la cuisinière ou dans un four réglé à 175° C (350° F). La cuisson prend de 30 à 60 minutes selon la variété, mais on calcule habituellement 45 à 50 minutes sur la cuisinière et une heure au four. Les grains devraient être fendus et montrer un coeur blanc, mais ne devraient pas être recourbés (signe qu'ils sont trop cuits). Si nécessaire, égoutter le riz en fin de cuisson.
Apprêts culinaires
La majorité des recettes créées pour le riz entier ou le riz blanc conviennent au riz sauvage, à la condition d'ajuster le temps de cuisson en conséquence.
* Traditionnellement, les peuples des Grands Lacs faisaient bouillir le riz sauvage avec des haricots, du maïs ou de la courge. À ces aliments pouvaient s'ajouter un morceau de viande, du sirop d'érable et de la graisse.
* Dans les soupes, par exemple une soupe à la tomate ou de type minestrone.
* Dans un pouding au riz, avec du sirop d'érable et des raisins secs ou des dattes.
* Riz pilaf aux champignons : faire revenir dans l'huile de l'oignon, de l'ail et du céleri, ajouter du riz sauvage et, si désiré, du riz entier, remuer de façon à bien enrober les grains d'huile, ajouter du bouillon de légumes ou de poulet, et mijoter une heure. Faire fondre des champignons dans du beurre ou de l'huile, les ajouter au riz avec une cuillerée de vinaigre balsamique et une bonne quantité de persil haché, et servir. On pourra également farcir une volaille avec cette préparation.
* Pour varier, ajouter à cette préparation des pois frais et assaisonner à la sauce soya.
* On peut confectionner des crêpes avec du riz sauvage cuit, de la farine, des oeufs, de l'eau et du lait. Mélanger intimement les ingrédients, laisser reposer au moins une demi-heure, puis cuire comme les crêpes ordinaires.
* Salade de riz sauvage : mélanger du riz sauvage cuit avec des figues, du céleri et de l'oignon hachés, des noix et des pistaches rôties à sec dans une poêle. Arroser d'une vinaigrette à la moutarde et servir bien froide.
* Salade asiatique : remplacer les figues de la recette précédente par des pruneaux, ajouter des lamelles de shiitake, la partie verte d'un jeune oignon et de la coriandre hachée. Arroser d'une vinaigrette composée d'huiles de noix et de sésame, de jus d'orange et de sauce soya. Garnir de zeste de citron.
* Salade de riz et lentilles : cuire lentilles et riz sauvage séparément, puis les mélanger. Arroser de vinaigrette et servir avec des quartiers d'orange.
* Niçoise sauvage : thon émietté, riz sauvage cuit, tronçons de haricots verts, tomates séchées et olives. Servir sur de jeunes laitues et arroser d'un filet d'huile d'olive.
* Dans les tomates, courgettes ou poivrons farcis, avec des oignons, des champignons et des fines herbes. Garnir de fromage râpé et gratiner.
* Ou farcir des feuilles de chou d'un mélange de riz sauvage cru et de boeuf haché, d'oignon émincé et de persil haché. Rouler sans serrer pour former des papillotes que l'on fera revenir délicatement dans l'huile d'olive. Couvrir de bouillon et braiser environ 45 minutes. Réserver les papillotes au chaud, réduire le bouillon, ajouter de la crème aigre, réchauffer et napper les papillotes de cette sauce.
Conservation
Le riz sauvage se conservera au moins un an dans un contenant hermétique, à l'abri de la lumière et de la chaleur.
Réfrigérateur : cuit, on pourra le conserver une ou deux semaines.
Congélateur : cuit, quelques mois.
Écologie et environnement
Graine de canard
Le riz sauvage constitue une nourriture de choix pour les diverses espèces de canards et autres oiseaux aquatiques qui fréquentent les eaux et les rivières de l'Amérique du Nord. C'est d'ailleurs une des raisons qui ont poussé à l'implanter dans les régions où il n'était pas indigène.
Au Wisconsin et au Minnesota, les peuplements de riz sauvage ont diminué de près de la moitié au cours du dernier siècle. Les Anishnaabegs, qui y récoltent cette céréale depuis des générations, ont également remarqué que les plants sont plus petits qu'ils ne l'étaient il y a 30 ans ou 40 ans. Divers facteurs sont invoqués pour expliquer cette tendance, notamment les variations dans les niveaux d'eau provoquées par la construction des routes, digues et fossés, l'augmentation de la pollution et de la circulation des bateaux à moteur, l'introduction de mauvaises herbes exotiques, etc.
Le Minnesota est considéré comme le centre de la biodiversité du riz sauvage. Ce qui inquiète particulièrement les Anishnaabegs, c'est le risque d'érosion génétique qui menace cette plante. Érosion par le fait des variétés modernes qui peuvent facilement se croiser avec les variétés sauvages. Érosion potentielle par une nouvelle variété brevetée, dont les plants mâles sont stériles, trait qui pourrait être communiqué aux peuplements sauvages si elle était cultivée dans leur voisinage. Risque d'érosion également si, à la suite du séquençage de la zizanie, lequel est présentement en cours à l'université du Minnesota, on créait des variétés génétiquement modifiées et on les cultivait, ce qui aurait pour effet de contaminer les nombreuses variétés sauvages qui se sont formées au fil des millénaires. Pour l'heure, aucun projet de cette nature n'existe, mais rien n'indique que ce ne sera pas le cas dans le futur.
Afin de parer à une telle éventualité, l'organisme White Earth Land Recovery Project créé par des Anishinaabegs de la réserve White Earth (Minnesota) tente de faire adopter une loi interdisant toute introduction future de variétés génétiquement modifiées de zizanie au Minnesota. Les membres de cet organisme ont également entrepris d'oeuvrer à la préservation des peuplements naturels, de rétablir sur la réserve les traditions entourant la récolte du grain et de les faire connaître au grand public. En reconnaissance de son action, l'organisme recevait, en 2003, le prix Slow Food pour le combat qu'il mène dans le but de préserver ce patrimoine génétique et culturel.
Sections Le riz sauvage au fil du temps, Usages culinaires, Conservation, Écologie et environnement
Recherche et rédaction : Paulette Vanier
Fiche créée le : 13 décembre 2005
Références
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