Fraternité Matin Samedi 31 Décembre 2005 — http://www.fratmat.net/content/detail.php?cid=U5o0ex9L4QS :
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CE QUE PRÉPARE LE FPI
APRÈS LA FORMATION DU GOUVERNEMENTLa déception et l’amertume habite le camp présidentiel au lendemain de la formation du gouvernement de transition que conduit le Premier ministre Banny.
Ce n’est pas la joie dans le camp présidentiel et la galaxie patriotique. La déception est à son comble au lendemain de la formation du gouvernement de Charles Konan Banny; celle-ci a le goût amer d’une débâcle. Mme Geneviève Bro-Grébé, présidente du Mouvement ivoirien pour la défense des Institutions de la République (MIDI), se déclare “en congé” afin de ne pas vitupérer contre la Présidence de la République qui, selon certains de ses proches, aurait capitulé. Nyamien Messou N’Guessan, président du Collectif de la société civile patriotique de Côte d’Ivoire, ne décolère pas contre le “gouvernement de défiance vis-à-vis du Président de la République et du FPI”.
Quant au Pr Mamadou Koulibaly, président de l’Assemblée nationale, il est hors du pays pour plusieurs semaines. En désaccord total avec les derniers choix politiques du Chef de l’Etat pour sortir la Côte d’Ivoire de la crise armée, il a préféré prendre le large pour ne pas exploser afin de sauver les apparences et le fragile équilibre au sein du parti. Depuis qu’il a constaté que “la Côte d’Ivoire, par la série des résolutions (Ndlr, 14 au total de février 2003 à décembre 2005) prises à son sujet par le Conseil de sécurité de l’ONU, arrive au terme d’une longue marche faite de sang et de douleurs à être mise sous tutelle de la France par l’ONU”, il s’est convaincu que l’Hexagone a réussi le “coup d’Etat constitutionnel” qu’il a ourdi depuis Linas-Marcoussis et pour la dénonciation duquel il a claqué la porte de la table ronde (Cf. Le Courrier d’Abidjan n°582 du 7 décembre 2005).
Les manifestations de colère vite étouffées dans certains quartiers d’Abidjan ce mercredi, sont une alerte que la direction du FPI a vite décodée. La grogne qui s’est emparée de la base, constitue des menaces sérieuses pour le parti qui risque de s’aliéner le soutien de tous ces Ivoiriens baptisés “Jeunes patriotes”, au front depuis le déclenchement de la rébellion armée. Car, si à Linas-Marcoussis, le pouvoir ivoirien a été épargné par les attaques, au contraire de la France, c’est aujourd’hui le régime ivoirien qui est au banc des accusés. Certains n’hésitent même plus à accuser Laurent Gbagbo d’avoir trahi la “lutte de libération” et d’avoir démissionné.
Les concessions faites, en effet, au nouveau Premier ministre sont importantes à telle enseigne que par décision n°2005-001 du 28 décembre 2005 qui sera publiée au journal officiel tout comme le décret, Charles Konan Banny a établi la liste des 32 membres de son gouvernement de transition. Sur cette liste, surprise: le FPI n’a pas obtenu, malgré ses sept portefeuilles ministériels contre six aux Forces nouvelles, “la parité entre l’opposition politico-armée et le pouvoir” qu’il réclamait; en outre, il a perdu le département de souveraineté qu’est le ministère de l’Economie et des Finances qui, sous la férule de Paul-Antoine Bohoun Bouabré, lui servait de tour de contrôle financier de tous les départements.
Or, jouant sa crédibilité dans un langage ferme et direct, Pascal Affi N’Guessan, président du FPI, avait rassuré les militants et sympathisants du parti et du camp présidentiel. “Il est totalement hors de question que le FPI lâche le ministère des Finances”, a-t-il déclaré, parce que, selon lui, “chaque recul pour nous est un recul politique; cela signifie que le FPI lâche le pouvoir” (Cf. Fraternité Matin n°12.337 du 22 décembre 2005). A l’arrivée et à l’issue des tractations et autres pressions exercées sur le Chef de l’Etat, le parti au pouvoir (?) a revu ses prétentions à la baisse, en revenant sur les déclarations de son président.
Le FPI a laissé des plumes et tente de prendre les devants pour colmater les brèches et prévenir le séisme. C’est à cet effet qu’un secrétariat général extraordinaire du parti s’est réuni presque en catastrophe, avant-hier soir au siège du parti, pour examiner la situation. A cette occasion, les instances du parti se sont expliquées sur les péripéties de la formation du gouvernement et ont décidé de la conduite à observer. Ainsi, il a été convenu d’aider le Premier ministre dans sa tâche tout en veillant au grain.
C’est pourquoi la direction du FPI s’est engagée à entreprendre des campagnes de sensibilisation pour inviter les militants et les sympathisants non seulement à rester à l’écoute des mots d’ordre du parti, mais à ne rien entreprendre qui puisse perturber l’action du gouvernement Konan Banny. Néanmoins, le parti se propose de baliser le terrain afin que l’équipe du Premier ministre ne dévie pas de sa mission. Le FPI se montre de plus en plus peu regardant sur les dispositions constitutionnelles et privilégie la campagne électorale. Ce qui préoccupe ses dirigeants, ce n’est plus le combat d’arrière-garde portant sur l’application stricto sensu de la Constitution, mais la conservation du pouvoir d’Etat au soir du 31 octobre 2006, par la victoire à la présidentielle. Aussi, ont-ils en ligne de mire l’objectif final du gouvernement Banny qui reste le désarmement des combattants, la réunification du pays et l’organisation des élections.
Auteur: Bi Bally Maurice FERRO »