L'Inde, le Brésil et les médicaments génériques
L'Inde est l'un des plus gros producteurs de médicaments génériques au monde. Ces traitements à bas prix, les seuls qui soient accessibles aux malades des pays pauvres, sont aujourd'hui une source de devises pour l'industrie pharmaceutique indienne. Un exemple : les malades du sida en Afrique, en Asie et en Amérique latine dépendent largement des importations des anti-viraux en provenance de l'Inde.
La possibilité de développer une coopération sur les génériques avec le Brésil, un important consommateur de ce type de médicament, n'a pas échappé aux industriels et aux autorités indiennes. Les deux pays ont mis en place des échanges aussi bien dans le domaine public que privé. Et ça marche.
Stéphane Guérin, avocat d'affaires international, chargé de représenter les intérêts des groupes pharmaceutiques indiens au Brésil, a suivi les différentes étapes de cette collaboration. «Elle a été mise en place étape par étape. D'abord par l'importation de principes actifs pour la fabrication des médicaments. Ensuite par la mise en ouvre d'une fabrication locale au Brésil et enfin par des transferts de technologie. Les Indiens n'ont pas la réputation d'être très forts en fabrication sauf pour les produits pharmaceutiques. Pourquoi ? parce que la loi indienne sur les brevets ne protégeait pas les molécules, elle protégeait uniquement les processus de fabrication. Pour contourner les brevets, les industriels indiens ont mis au point d'autres méthodes et sont devenus excellents dans ce domaine. Aujourd'hui, ils sont les leaders mondiaux sur le marché des médicaments génériques à très bas coût.»
La coopération entre les deux pays s'est traduite au départ par l'importation des principes actifs qui rentrent dans la composition des médicaments fabriqués en Inde.
Elle s'est élargie ensuite à la recherche médicale sur les maladies qu réapparaissent au Brésil comme la tuberculose. Enfin, les deux pays ont mis au point des transferts de technologie pour fabriquer ces génériques au Brésil à partir des licences indiennes. Au niveau des implantations industrielles, plusieurs laboratoires indiens comme Randaxy et Cipla ont décidé de s'installer au Brésil pour fabriquer sur place. Enfin, le gouvernement brésilien a pris des mesures pour soutenir l'importation de produits pharmaceutiques indiens.
Selon Stéphane Guérin, «ce modèle peut être exporté en Amérique latine et à d'autres pays d'Asie, comme la Chine, qui sont demandeurs de médicaments génériques. Une coopération existe déjà entre le Brésil et l'Afrique du Sud». La réussite de la coopération Brésil-Inde a pu être mesurée par les effets positifs sur la santé publique des deux pays, effets obtenus depuis qu'elle a été mise en oeuvre.
Any Bourrier