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 Europe/Afrique : Le Commerce en panne, la Coopération prise

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mihou
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mihou


Nombre de messages : 8092
Localisation : Washington D.C.
Date d'inscription : 28/05/2005

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14122007
MessageEurope/Afrique : Le Commerce en panne, la Coopération prise

Europe/Afrique : Le
Commerce en panne, la Coopération prise en otage: Réflexions sur la
contribution du Président Wade sur les relations UE/Afrique







Dans une tribune publiée dans la presse sénégalaise le 19 Novembre
dernier et intitulée « Europe-Afrique : La coopération en panne », le
président de la République du Sénégal donne un avis sur les Accords de
Partenariat Economique (APE) entre l'Union Européenne et les pays
africains et propose comme alternative des Accords de Partenariat pour
le Développement (APD). Dans les lignes qui suivent, nous nous
évertuons à donner notre point de vue sur les questions soulevées. Nous
avons pris le parti de nous focaliser exclusivement sur les aspects
juridiques des questions commerciales abordées. Ce faisant, nous
laissons les questions purement économiques de la contribution à la
compétence d'experts mieux outillés dans ce domaine.



































Europe/Afrique : Le Commerce en panne, la Coopération prise 801167-980457








I. Questions générales soulevées par la proposition



1. L'importance de conclure un accord au plus tard le 31 Décembre 2007.




« La Commission Européenne presse les Etats africains de signer, avant le 31 Décembre 2007, de nouveaux APE. »



Le délai du 31 décembre a été déterminé de façon objective. Il met un
terme à la dérogation de Doha qui prolonge légalement le bénéfice des
préférences commerciales. L'octroi de cette dérogation rétablit la
compatibilité des dispositions préférentielles avec les provisions de
l'article XXIV du GATT/OMC. Le problème est que l'UE a laissé perler
l'interprétation de ce délai comme une date fatidique au-delà de
laquelle, tout rapport commercial avec l'Afrique serait légalement
proscrit et exposerait celle-ci à des difficultés économiques
supplémentaires et au risque de se faire attraire au règlement des
différents par d'autres pays membres de l'OMC. C'est une manœuvre
politique de négociations malheureusement perçue par certains
protagonistes comme l'existence d'un money time à optimiser en vue d'un
accord économique salvateur. Il s'agit en réalité d'un délai passif de
rémission qui coïncide au renoncement à une alternative peu crédible en
l'état plutôt qu'un délai actif articulé autour d'une obligation
d'action, quelque soient les méfaits qui en découleraient. Il n'y a
donc aucune obligation, ni pour l'Union Européenne, ni pour les Etats
africains de signer un Accord au 31 Décembre 2007.


2. L'Accord de Cotonou et les préférences commerciales



« Ce nouvel instrument de coopération multilatérale (les APE) est censé
prendre le relais des accords de Cotonou qui accordaient aux pays ACP
un régime dérogatoire au principe de libre échange et des préférences
commerciales unilatérales.»


La preuve de l'incompatibilité du
régime de Lomé avec les accords de l'OMC était si manifeste qu'il n'a
pas été difficile pour ses pourfendeurs de le démanteler à travers le
système de règlement des différends de l'OMC. Elle impliquait dès lors
un changement de cap et la mise en place d'un régime de coopération
d'une autre génération qui devait permettre de passer de la coopération
au développement au partenariat économique; de la non-réciprocité à la
réciprocité intégrale. L'Accord de Cotonou, agent annoncé de ce
changement de paradigme, n'a pas réellement permis de changer de cap,
du moins pas dans l'immédiat. L'essentiel des dispositions jugées
illégales par l'Organe de Règlement des Différends de l'OMC y sont
maintenues et laissaient la question de l'incompatibilité entière. Pour
ne pas mettre ce nouveau régime commercial en péril, l'UE et les Etats
ACP ont dû adresser à l'OMC une demande de dérogation à l'effet de
maintenir le régime de Lomé durant la période transitoire allant
jusqu'au 31 décembre 2007. Par pragmatisme, l'Accord de Cotonou
organise lui-même, à travers son article 36.3, les conditions et les
délais de transition devant déboucher sur les futurs APE au 31 décembre
2007. Une telle prévoyance a été prise en compte par la Conférence
ministérielle de l'OMC comme l'une des bases de la dérogation qui a été
octroyée à Doha, en 2001. Celle-ci donne la garantie de son caractère
exceptionnel, limité dans le temps et qui ne menacerait pas l'intégrité
du système commercial. Ce faisant, l'OMC avait opéré un choix
pragmatique. Rejeter la demande de dérogation aurait équivalu à se
retrouver dans la situation manifeste de violation de son ordre
juridique, comme cela avait été le cas avec les accords de Lomé dans le
GATT durant de nombreuses années.


3. A propos d'un possible vide juridique et/ou commercial en cas de non signature d'APE au 31 Décembre 2007.



« En l'absence de signature de ces nouveaux accords, ce serait le vide entre l'UE et l'Afrique »



La situation serait très différente selon qu'il s'agit d'un Pays Moins
Avancé (PMA) comme le Sénégal (3.1), ou d'un Pays en voie de
développement comme la Côte d'Ivoire (3.2).


3.1. La situation des PMA non signataires d'APE



Elle est régie par l'article 37.9 de l'accord de Cotonou qui engage les
communautés européennes à prendre des mesures en vue d'assurer à
l'ensemble des PMA un accès en franchise de droits pour l'essentiel de
leurs produits, sur le modèle de la dernière Convention de Lomé. Le
principe de discrimination reste donc en vigueur pour eux, mais sur une
base de non réciprocité et d'universalité. La disposition ne concerne
pas que les PMA africains, mais tous les PMA. Cela signifie qu'il
s'agit de préférences basées sur des critères économiques et validées
par l'OMC à travers la reconnaissance expresse de la catégorie des PMA.
Cette logique est entérinée par les communautés européennes à travers
l'Initiative Tout Sauf les Armes (TSA) qui garantit aux PMA un accès en
franchise de droits de douanes pour tous leurs produits, à l'exception
des armes. Le problème de l'alternative aux APE pour les PMA est ainsi
réglé en partie. Ceux-ci auront à faire la comparaison entre les
avantages commerciaux que leur offrent les APE et ce que leur offre
déjà l'Initiative TSA. Ainsi, ils restent quelque part maîtres de leur
régime commercial au terme d'un choix à double tranchant. La signature
d'un APE pourrait ne pas être plus avantageux d'un point de vue
commercial, d'autant plus qu'elle ouvrirait davantage leur marché aux
exportations européennes, mais offre la garantit d'une forme
contractuelle qui protège les droits qui en découlent. En revanche,
l'Initiative TSA, comme toutes préférences commerciales, reste revêtue
du sceau de l'unilatéralité qui lui dénie toute prévisibilité. Cette
option serait celle du Sénégal compte tenu de son statut de PMA. Dans
la situation de l'Afrique de l'ouest, tous les pays seront rangés dans
ce même régistre, à l'exception de la Côte d'Ivoire, du Ghana et du
Nigeria qui sont dans la catégorie des pays en développement.


3.2. Situation des pays en développement africains non signataires d'APE



Elle est plus délicate. Au-delà du délai du 31 décembre 2007, ils
retomberont dans le droit commun des préférences commerciales dont
bénéficient déjà l'ensemble des pays en développement. Ce qui serait un
parfait exemple d'érosion brutale des préférences découlant de
l'alignement à un niveau NPF (droit commun) et de la réduction continue
des droits de douane à l'OMC. Aux termes de l'article 37.6 de l'Accord
de Cotonou, la Communauté étudiera toutes les alternatives possibles,
pour les ACP non PMA non signataires d'APE, afin de les pourvoir d'un
nouveau cadre commercial, qui soit équivalent à leur situation
existante et conforme aux règles de l'OMC. La compréhension et
l'interprétation de cette disposition posent problème. Tout cadre
commercial équivalent à la situation courante des ACP non PMA serait
fondée sur les dispositions de la Convention de Lomé IV, prolongée par
la Dérogation de Doha jusqu'au 31 Décembre 2007. Mais, il se trouve que
ce régime courant n'est pas en phase avec l'exigence de conformité aux
règles de l'OMC posée à l'article 37.6 de l'Accord de Cotonou. En fin
de compte, le seul cadre commercial alternatif aux APE que pourrait
offrir la Communauté Européenne serait son Système Général de
Préférences (SGP) qui, bien que conforme aux dispositions de l'OMC à
certains égards, ne permet pas aux pays africains non PMA de conserver
l'existant. L'UE serait alors en faute en privilégiant l'obligation de
conformité à l'OMC sans se soucier de celle de fournir une alternative
au moins équivalente qui serait au niveau des préférences commerciales
antérieures. Le Nigeria, le Ghana et la Côte d'Ivoire sont dans cette
situation. De par le niveau de ses exportations vers l'UE, un pays
comme la Côte d'Ivoire subirait un grand préjudice en perdant ses
préférences commerciales. Alors que les PMA qui dépendent fortement de
leurs exportations vers l'UE pourront préserver les leurs à travers le
régime Tous Sauf les Armes susmentionné. Ces conséquences différenciées
au niveau régional sont une menace sérieuse pour l'intégration en
Afrique. La Côte d'Ivoire reste d'ailleurs tentée par un Accord
individuel avec l'UE qui lui garantirait un accès préférentiel en droit
de douane et sans quotas, au détriment du système tarifaire mis en
place au niveau de la CEDEAO. Au niveau de l'Afrique centrale, le Gabon
est dans les mêmes dispositions de conclure un accord individuel
similaire. Dès lors, la velléité des PMA comme le Sénégal de ne pas
signer d'APE à la fin de l'année, devrait, pour être viable, se montrer
solidaire de la situation des pays en développement de la sous région
et proposer des mesures d'homogénéisation de la politique commerciale
régionale.


3.2. Ma ligne de conduite suggérée : Pas d'APE moins favorables que l'OMC



Plus généralement, la ligne de négociation des pays africains devrait
être de ne jamais faire plus de concessions commerciales qu'ils en ont
déjà faites à l'OMC. Si la particularité des Accords commerciaux
régionaux est de permettre l'octroi de concessions dérogatoires au
droit commun de l'OMC, le fait que les futurs APE auront comme cadre un
ACR mixte devrait emmener à considérer les flexibilités accordées par
l'OMC comme des minima standards. Si en fin de compte, les provisions
des futurs APE ne confèrent aux pays ACP que les standards de la Clause
de la Nation la plus favorisée (NPF) ou des dispositions qui seront en
deçà, il n'y a pas d'intérêt pour les pays africains de signer un APE.
Les standards NPF pour les pays en développement sont consignés dans le
SGP européen dont tous les pays africains bénéficient déjà. Celui-ci
serait l'alternative idéale pour les pays africains en développement,
qui y trouveraient la garantie de bénéficier de préférences
commerciales, sans prendre le risque d'exposer leur économie à un
régime concurrentiel intenable dont ils ne maitrisent pas les effets.
Les pays africains sont en réalité intéressés par un partenariat qui
laisse une place importante aux questions de développement et qui offre
un minimum de garantie de protection des secteurs vitaux de leur
économie. Ils ont l'ambition légitime de couver leurs industries
balbutiantes et d'en faire des exportatrices de niveau important. A cet
égard, un éventuel APE serait le lieu idéal de revisiter la règle de la
progressivité des droits, règle au fondement colonial au demeurant.
Comment pourrait on promouvoir le développement des pays africains s'il
leur est subtilement interdit de transformer localement leur produit et
de produire de la valeur ajoutée aux fins d'exportation ? La règle de
la progressivité des droits, qui proportionne le tarif douanier à son
degré de transformation est comme une sanction à toute velléité de mise
en place d'industries locales performantes. Et si les capacités
industrielles restent faibles, la vocation d'un APE devrait être de
prévoir des modalités de coopération pour y faire face.
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Europe/Afrique : Le Commerce en panne, la Coopération prise :: Commentaires

II. Questions spécifiques liées à la proposition d'Accords de Partenariat pour le Développement (APD)



1. L'Union Afrique (UA) comme entité négociatrice : OMC, APE et intégration régionale



« APD : Partenariat Europe/Afrique intégrateur donc global et non
parcellisé en cinq accords régionaux, parce que l'Afrique est une
continuité géographique. » A. Wade
« APD : Accords entre régions du monde au lieu d'un Accord mondial OMC, trop global et donc très réducteur. »




L'article XXIV du GATT/OMC est le lien juridique entre le
multilatéralisme et le régionalisme commercial. Il organise les Accords
commerciaux régionaux. L'acceptation d'un système universel de
gouvernance commerciale est renforcée par le principe de l'engagement
unique. Celui-ci prohibe les droits de réserves sur les accords
commerciaux, et empêche d'envisager une relation commerciale UE/UA
autrement que compatible avec l'OMC. Celle-ci génère des normes
d'organisation des relations commerciales, mais les conditionne
fortement au respect de ses principes directeurs dont le plus important
reste l'interdiction de la non-discrimination. Il serait dès lors quasi
impossible d'envisager une relation commerciale entre l'UE et l'UA, en
excluant les dispositions de l'OMC.


Toute relation commerciale UE/UA devra
alors épouser les contours d'un ACR. Mais la spécificité réside dans ce
qu'un tel accord serait de nature mixte en ce qu'il met ensemble une
entité de pays développés et une autre de pays en développement. Or,
l'article XXIV du GATT ne définit pas explicitement un régime de
pondération pour les pays en développement dans le cadre des ACR
mixtes. Les questions de développement ne sont expressément prises en
charge que dans le commerce des services, mais pas des marchandises ou
de la propriété intellectuelle. Dans ce contexte, il est difficile
d'envisager des APE incluant des préférences non réciproques et tenant
en compte les questions de développement, du fait d'un défaut de base
légale.


Si l'implication de l'Afrique comme
entité juridique et économique homogène est si faible en matière
commerciale, c'est qu'il persiste un problème de capacité résultant de
la dispersion des stratégies de défense des intérêts commerciaux. Il
est vrai que les velléités nationales sont fortes et s'expriment autant
en termes de souveraineté politique qu'économique. Mais la volonté d'un
régionalisme commercial de type continental n'irait au bout de sa
logique que si la Communauté Economique Africaine (CEA), créée en 1991
sous l'égide de l'OUA, explorait les possibilités de participer au
système commercial comme une entité représentative d'une politique
commerciale commune africaine. L'initiative pourrait être renforcée par
l'agrégation des politiques commerciales sous régionales basées sur les
institutions régionales existantes. Elles pourraient être intégrées et
chapeautées au plan institutionnel. Ce faisant, elle acquerrait plus de
légitimité et d'efficacité que le Groupe africain à l'OMC qui s'évertue
à coordonner les différentes positions émanant des pays africains. La
présence d'une mission de l'UA à Genève, siège de l'OMC est à saluer.
Mais ses missions actuelles ne favorisent pas une intervention de type
institutionnel telle que l'exigeraient les dispositions de l'OMC. Pour
cela, il lui faudrait actionner son droit de légation active qui lui
est fourni par les dispositions de la CEA qui lui donne mandat de
participer, en tant que groupe, à des négociations internationales dans
le cadre du GATT, de la CNUCED ou de tout autre instance de négociation
internationale. Il reste étonnant que l'UA n'ait pas encore saisi cette
opportunité d'une présence plus institutionnelle auprès de l'OMC.


La même problématique est transposable
à la proposition de faire de l'UA le vis-à-vis de l'UE dans les
négociations APE, à la place des sous-régions habilitées pour le
moment. L'écueil reste le même, dans la dimension commerciale au moins.
Pour que l'UA puisse négocier des accords commerciaux régionaux, il lui
faut au préalable s'ériger en Union douanière, ce que l'Europe est
déjà, ou en zone de Libre Echange. En l'état, elle n'est l'une ni
l'autre, mais plutôt une superposition d'entités sous régionales qui
elles, pour la plupart, remplissent ces conditions légales et
institutionnelles. Ainsi donc, une négociation qui respecterait le
parallélisme des formes institutionnelles ne pourrait prospérer que
dans un cadre strict de coopération au développement et non commercial.
La proposition a la particularité de condenser les deux aspects en un,
sans vraiment tenir compte des spécificités et des exclusivités qui
leur sont afférentes.


2. Accords sur les produits homogènes



« APD : Accords sur les produits homogènes : café, cacao, arachide, coton, pêche, produits miniers, manufacturés, etc. »



La proposition d'accord sur des produits homogènes tels que le café, le
cacao ou le coton peut être opérationnelle. Mais elle devra surmonter
quelques écueils. Le premier est lié à la tendance générale des
négociations à l'OMC. Dans le cas de l'Initiative sectorielle sur le
coton initiée par des pays africains, ceux-ci avaient proposés que le
coton soit traité en dehors des enceintes thématiques existantes et
d'en faire un produit spécial. A terme et en prenant en compte la
situation courante, un consensus fort des pays développés a rejeté
cette optique et a décidé que le coton étant un produit agricole, il ne
saurait être traité ailleurs que dans le cadre du Comité des
négociations sur l'agriculture. Si depuis lors un Comité Spécial sur le
coton a été mis en place, aucun résultat ne peut en sortir tant que les
modalités pratiques n'auront pas été définies dans le cadre des
négociations agricoles. Il serait d'ailleurs fastidieux de définir un
statut spécial à des produits agricoles avant d'arriver à un accord
général de principe auquel il sera dérogé par la suite. En termes
clairs, l'exception ne saurait précéder la définition du principe. Cela
signifie que la communauté du commerce international n'est pas dans les
dispositions d'embrayer sur des accords de produits au détriment des
accords globaux. Et cela est lié au second écueil énoncé, matérialisé
par le démantèlement quasi systématique des protocoles sectoriels
antérieurs entre l'UE et les pays africains. Comme préalablement
indiqué, le protocole banane a été presque vidé de sa substance par une
décision de l'OMC. Il n'y subsiste que des arrangements commerciaux
marginaux fortement surveillés par l'OMC et les pays d'Amérique latine.
Celui sur le sucre a été démantelé par les mêmes voies avec une plainte
australienne à la base. Pour ce qui en subsistait, l'UE vient de
décider, en octobre dernier, de s'en départir. Ainsi, aussi bien au
niveau multilatéral que régional, la tendance n'est pas aux
arrangements commerciaux sectoriels.


Mais loin de constituer des éléments
de dissuasion, ces écueils incitent à travailler sur des voies
alternatives qui puissent garantir la sécurisation de nos produits
homogènes sus mentionnés. Il me semble qu'en ayant recours au concept
de produits sensibles largement utilisé dans le système commercial
multilatéral, la proposition pourrait être encore plus opérationnelle.
Il est connu que l'agriculture reste un domaine pas tout à fait
libéralisé et fait encore l'objet de pratiques protectionnistes. Les
pays développés invoquent l'argument de la multifonctionnalité pour
continuer à se protéger ; alors qu'une grande majorité des pays en
développement invoquent l'argument des considérations autres que
d'ordre commercial pour extirper leur agriculture du libéralisme. En
d'autres termes, le commerce ne doit pas primer sur l'agriculture. Dans
les négociations sur les APE, un consensus voudrait que ce qui est
communément appelé produits sensibles soient applicables à toutes les
catégories de développement. Sa finalité est de répondre à un besoin
d'aménagement de flexibilités pour les produits agricoles d'importance
vitale pour les pays qui les invoquent. Dans le cadre des accords
commerciaux régionaux, le seuil de libéralisation reste flexible et
l'obligation de réciprocité n'est pas rigide. Que ce seuil soit fixé à
80 ou 90%, l'essentiel réside dans la possibilité offerte de garder
hors libéralisation tous les domaines considérés comme prioritaires
pour le développement suivant des indicateurs de sélection consensuels.
En plus, le pourcentage de libéralisation peut consister en une moyenne
pondérée des engagements des différents partenaires. Dans le cas d'un
ACR mixte UE/UA, la moyenne basse est tout naturellement dévolue aux
pays moins favorisés. La marge non libéralisée des échanges commerciaux
est alors le réceptacle des produits sensibles à promouvoir ou à
protéger. Le point commun aux produits homogènes mentionnés est qu'il
s'agit de produits d'exportation auxquels il faut garantir un accès aux
marchés. L'usage de la notion de produit spécial conçu dans le cadre de
l'OMC n'est pas donc opératoire. Elle couvre la réalité d'une mesure
défensive de protection. Or, les produits dont il est question ici
portent par devers eux leur propre titre de compétitivité. Leur
protection devrait de fait résider dans la promotion de leur
exportation ; et pour leur conférer des flexibilités additionnelles,
invoquer le concept de produits sensibles dont l'indicateur opératoire
serait leur importance particulière dans la nomenclature des recettes
budgétaires.


Par des chiffres appropriés, il a été
fait mention, dans la proposition, de l'impact d'une libéralisation par
les APE sur les recettes douanières des pays africains. La prévision
est exacte. Dans le cadre d'un accord de développement ou plus
spécifiquement d'un accord commercial, il est légalement possible de
faire de l'importance des recettes budgétaires une condition de son
extirpation du champ de libéralisation entre les deux entités. Le fait
est que l'importance spécifique d'un produit peut être déterminée non
pas pour des raisons liées à son usage domestique intrinsèque et/ou de
considérations liées à la sécurité alimentaire, mais pour des raisons
budgétaires. Dans ce cas, la protection du produit passe par une
augmentation des droits de douane appliqués au produit similaire
d'importation. L'importance des recettes douanières dans la
nomenclature budgétaire des pays de l'Afrique de l'ouest peut justifier
la mise en place d'une telle politique commerciale. La sauvegarde de
telles recettes participe de la poursuite d'objectifs comme la sécurité
alimentaire et la garantie des moyens d'existence dans nos pays qui
sont autant de justifications pour un traitement spécial et différencié
à l'OMC. La seule réserve que je vois dans une telle approche
commerciale est que quelque soit l'importance des recettes douanières
dans la part de nos budgets, la mise en place d'entités industrielles
locales capables de développer nos capacités d'offres commerciales ne
doit pas être oubliée au profit d'une politique d'importations tous
azimuts. Il y a un équilibre subtil à trouver aux fins d'une balance
commerciale crédible par les moyens des droits de douane en
l'occurrence. Elevés et protectionnistes au besoin, flexibles et
libéraux si nécessaires.


3. Dissociation Commerce/Aide



« APD : Dissociation du commerce et de l'Aide, qui serait Co-administrée. »



La dissociation des questions de commerce de celles de l'Aide est
fondamentale dans le contexte actuel. Tant que les pays africains
acceptaient les accords commerciaux sans se soucier de la prise en
compte de leur propre intérêt, l'aide au développement opérait, pour
l'occident, comme un geste de bonne conscience compensatoire. L'éveil
commercial, aussi minime soit il, des pays africains dans les
négociations commerciales internationales, a changé la donne. Comme il
a déjà été dit, les niveaux régional et multilatéral de ces
négociations sont fortement imbriqués et ne donnent plus à l'Europe la
garantie de concessions commerciales automatiques. Dès lors, l'aide
compensatoire est devenue un argument subtil de négociation,
subrepticement brandie à chaque fois que les pays africains ont tardé à
rallier les positions attendus d'eux, favorisant ainsi la prise en
otage de la coopération au développement par le commerce. Cet état de
fait est révélateur d'une double incohérence. D'abord, la politique
commerciale européenne est, sous certains de ces aspects, contraire
voire opposée à l'orientation de sa politique de développement.
L'exemple des subventions en est une illustration. En octroyant des
subsides plus que de raison à des produits à destination de l'Afrique,
on amoindrit la compétitivité de sa production concurrentielle
similaire en lui occasionnant une perte nette de revenus. C'est un
préjudice commercial. Dans le même temps, des programmes d'aide à son
endroit sont confectionnés via la coopération. Ils lui occasionnent des
gains nets de revenus. C'est la compensation financière. Préjudice
commercial et compensation financière sont les deux faces d'une même
politique commerciale européenne avec un même mode opératoire : l'usage
de l'argent du contribuable européen au service d'une politique de
coopération tatillonne et incohérente avec l'Afrique. Ensuite, l'aide
et le commerce ne répondent pas aux mêmes logiques de partenariat.
L'aide est unilatérale, volontaire et situationnelle. Le commerce est
plus contractuel, plus normatif et s'inscrit dans un régime systémique
articulé autour des principes de l'OMC. Pour ces raisons et aussi pour
des considérations d'éthique, il ne doit pas s'immiscer dans la
recherche de la réduction de la pauvreté par des voies et pour des
raisons autres que d'ordre commercial. Il ne serait d'ailleurs pas
exagéré de faire d'une telle immixtion, qui est un élément de
contrainte avéré, un facteur de trouble à l'ordre public commercial
international, et justiciable devant l'OMC. Il s'y ajoute que la
dissociation Aide/Commerce permet d'éviter les transferts d'agenda
opérés par l'UE dans ses négociations avec l'Afrique. L'illustration la
plus parfaite est l'intrusion de ce qui est communément appelé les
thèmes de Singapour (Concurrence, Marchés publics, Investissement et
Facilitation des échanges) dans l'agenda des APE, alors que les pays
africains, à l'instar de tous les pays en développement, avaient refusé
jusqu'à son inscription à l'ordre du jour à l'OMC. C'est que le cadre
multilatéral, quoiqu'imparfait, offre de meilleures garanties de
protection qu'un accord bilatéral qui sera probablement l'émanation
d'un rapport de forces brutales. Sans être exempt de reproches, le
système de l'OMC est de ce point de vue beaucoup plus pondérant. Pour
toutes ces raisons, la dissociation Aide/Commerce est un excellent
postulat pour toute nouvelle relation commerciale entre l'UE et les
pays africains.


* Les points de vue exprimés dans cet article sont ceux de l'auteur et n'engagent pas ICTSD.



El Hadji Abdourahmane DIOUF

Docteur en Droit International Economique

Directeur du Programme Afrique au Centre International pour le Commerce et le Développement Durable

Genève – Suisse

E-mail: ediouf@ictsd.ch

http://www.afriklive.com/Europe-Afrique-Le-Commerce-en-panne,-la-Cooperation-prise-en-otage-Reflexions-sur-la-contribution-du-President-Wade-sur_a3353.html?preaction=nl&id=4630601&idnl=29594&
 

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