L'antisémitisme en France
Faut-il brûler Dieudonné ?
FAUT-IL BRÛLER M'BALA M'BALA, DIEUDONNÉ DE SON PRÉNOM ? Jadis, Le
Pen se plaisait à répéter ce patronyme fleurant la nostalgie
coloniale. N'était-ce pas le comble pour le croque-mitaine breton de
la classe politique que de voir un rejeton du métissage mi-
Camerounais, mi-Breton lui aussi, mener campagne municipale à Dreux
pour faire barrage au Front national ? C'était à la fin du dernier
millénaire, avant que ne survienne le comble du comble…
Un Le Pen noir
Car depuis, le citoyen Dieudonné, serait lui-même devenu un Le Pen
noir ou un "fils de Le Pen", dixit le champion des professeurs de
morale publique des salons parisiens, BHL de son surnom. Et ce
dernier n'est pas seul, loin de là, à jeter l'anathème sur le
comédien. La coqueluche des médias d'hier, vantée à la fois pour son
sens caustique de l'humour et son engagement militant, s'est
transformée en persona non grata sur laquelle se déversent des
torrents de boue : "c'est tout juste s'ils ne m'ont pas accusé des
attentats du 11 septembre", précise le nouveau monstre public. De
multiples procès lui sont intentés. Au plus haut sommet de l'Etat,
on s'offusque, on dénonce, on menace. Et partout où il tente de
produire ses spectacles, Dieudonné se heurte à des gens "bien
intentionnés" qui lui ferment la porte au nez.
Lynchage médiatique
Mais de quoi l'accuse-t-on au fait ? L'acte I de l'affaire Dieudonné
débute le 1er décembre 2003. Invité sur France 3, le comique
aurait "passé la ligne rouge" en jouant d'un amalgame entre sionisme
et nazisme pour tourner en dérision un "axe du bien" Bush-Sharon.
Blanchi par la justice en mai 2004, Dieudonné n'en continue pas
moins à sentir publiquement le soufre, et de faits divers en
multiples rebondissements qui défraient la chronique, il rejoint
Tariq Ramadan sur la sellette des figures repoussoirs d'un soi-
disant nouvel antisémitisme "métèque". L'artiste se défend pourtant
de cette dérive au nom de ses convictions humanistes.
A ceux qui l'accusent d'avoir osé comparer la Shoa à
une "pornographie mémorielle", il rétorque que la citation est
mensongère et que son propos visait les récentes commémorations
publiques. Le reste serait calomnies, manipulations et lynchage
médiatique orchestré par des officines douteuses. Mais qui tirerait
les ficelles ? C'est là sans doute que Dieudonné dérape.
L'ironie politicienne
Car avec certaines de ses déclarations maladroites et la surenchère
de son spectacle "Mes excuses", il prête flanc aux bonnes
consciences outragées en désignant clairement un lobby sioniste dans
les arcanes du pouvoir. Qu'un "fou de la République" prétende rire
et faire rire de tout, soit ! Qu'il le fasse d'autant plus qu'il n'a
pas à endosser la moindre culpabilité "bouffé du juif", soit
encore ! Mais ses justifications en forme de mise en concurrence des
génocides et de dénonciation d'un complot sioniste omnipotent ne
peuvent que desservir sa cause. Car on peut virer beauf ou artiste
maudit en retrouvant des accents de sinistre mémoire sur "le peuple
élu". Le comique ne fait alors qu'alimenter la légende noire d'un
communautarisme de banlieue qui permet encore une fois à la
République française de s'en tirer à bon compte et de faire porter à
ses "indigènes" le fardeau des dénis de mémoire de "l'homme blanc".
Le Pen-Ramadan- Dieudonné même combat ? Triste ironie politicienne
en vérité qui transforme en immondice l'utopie Black-Blanc-Beur des
années 1990.
Ahmed Ben Amar
http://www.lesamisdugrigri.com/index01.html