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 La souveraineté alimentaire: Guerre au néolibéralisme

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Tite Prout
Maître de Cérémonie du forum
Tite Prout


Nombre de messages : 1737
Localisation : Montréal
Date d'inscription : 01/06/2005

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10032009
MessageLa souveraineté alimentaire: Guerre au néolibéralisme

Néolibéralisme et conséquences





La souveraineté alimentaire: déclaration de guerre au néolibéralisme








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La souveraineté alimentaire: Guerre au néolibéralisme 1267299-1658883

















par Reinhard Koradi




Il existe de nombreuses raisons de réfléchir à la
souveraineté alimentaire. A moyen et à long terme, le réchauffement
climatique, la raréfaction irréversible des ressources naturelles, la
destruction des exploitations agricoles familiales et les scandaleuses
injustices dans la répartition des produits alimentaires sous nos
latitudes provoqueront des crises d’approvisionnement dramatiques. Et
l’effondrement des approvisionnements dû à des catastrophes naturelles,
à la montée en flèche des prix et aux conflits politiques et militaires
est également dangereux. Dans le passé nous nous sommes laissé aveugler
par des scénarios sécuritaires trompeurs et nous avons négligé
d’assurer et de développer les conditions de la souveraineté
alimentaire. L’obéissance silencieuse d’une large majorité lors de la
réforme – du bouleversement social selon les dogmes néoconservateurs –
a conduit entre autres à ce que l’humanité soit plus éloignée que
jamais de maîtriser les problèmes de la faim et de la pauvreté. Le
Rapport sur l’agriculture mondiale, paru en août 2008, démasque le
mensonge néolibéral et montre qu’il est urgent d’agir. Il révèle les
manques scandaleux du système économique mondial qui rapporte d’énormes
profits à une petite minorité de gens sans scrupules. Les auteurs du
Rapport demandent un changement fondamental de la politique et de
l’économie agricoles et mettent au premier plan la souveraineté
alimentaire pour tous les peuples et toutes les nations.

La solidarité et la responsabilité individuelle doivent amortir les chocs




Depuis des siècles, les pays riches augmentent leur
prospérité en exploitant les pays «moins développés». D’un côté la
surabondance et de l’autre la pauvreté. Nous faisons trimer les autres,
nous les laissons souffrir de la faim et tomber dans la misère pour
installer nos oasis de bien-être, nos paradis de loisirs et notre
société des services et de l’information qui ne crée guère de valeurs.
Il est dramatique que dans les pays industrialisés trop de personnes ne
se rendent pas compte qu’elles aussi se trouveront du côté des perdants
d’un nouvel ordre social, à moins que les citoyens ne se mettent à
s’opposer à l’injustice. Nous sommes encore «en bonne position» bien
que l’on soit en train de nous retirer notre sécurité existentielle.
Nous luttons individuellement pour sauver ce qui peut être sauvé, bien
qu’il soit depuis longtemps indispensable d’unir nos forces pour
combattre l’injustice, l’épuisement des ressources pratiqué par une
élite rapace et avide de pouvoir. Alors que nous avons de la peine à
accepter que ceux qui vivent dans l’hémisphère sud souffrent pour la
plupart de la pauvreté et de la faim, nous acceptons que, dans les pays
industrialisés occidentaux, on détruise les fondements de la protection
sociale.
L’actuelle crise financière et économique est une
nouvelle tentative d’imposer le «consensus de Washington» annoncé en
1989 par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI).
Il s’agit de faire comprendre à chacun que toutes les négociations et
discussions en matière d’économie non conformes à l’idéologie du marché
doivent être interdites. Le «consensus de Washington» relance la
stratégie de restrictions démocratiques. En fait partie avant tout
l’élimination de la revendication libérale de souveraineté, le plus
grand obstacle pour la croisade en faveur d’un système économique
global néolibéral conformément à l’Ecole de Chicago.
A ce sujet, les
demandes du Sommet de Berlin convoqué par Mme Merkel en vue de la
préparation du Sommet du G 20 du 2 avril à Londres sont
particulièrement alarmantes. Grâce à une nouvelle «architecture des
marchés financiers», les Etats souverains doivent être soumis à un
organe de contrôle global et le FMI, la Banque mondiale et l’OMC
doivent être habilités à contraindre, par des sanctions, les Etats
«récalcitrants» à se soumettre à une réglementation globale. La
démocratie - participation des citoyens responsables aux décisions,
rempart le plus efficace contre le raz-de-marée du marché libéralisé -
doit être définitivement détruite. Plus rien ne doit exister qui limite
la soif de pouvoir et de profit de la haute finance de même que la
marchandisation destructrice de valeurs et la déstabilisation
d’économies tout entières.
Nous devons contrer cette stratégie des
potentats globaux grâce à une association solidaire pour la défense de
notre liberté. Selon la devise «Un pour tous, tous pour un», nous
devons empêcher que la sécurité de l’emploi, les institutions sociales,
les systèmes sanitaire et éducatif efficaces, les infrastructures de
transports et d’approvisionnement ne sombrent définitivement dans le
chaos provoqué par les errements néolibéraux.

L’éclatement des bulles engloutit les richesses nationales



Les bulles du système financier et écono­mique
global libéral ont éclaté, ou plutôt, on les a fait éclater. Le fossé
entre l’économie réelle et l’économie financière a déclenché un
effondrement colossal qui entraîne dans l’abîme les économies
nationales déjà chancelantes. Les richesses nationales constituées au
cours des générations doivent maintenant être sacrifiées aux «veaux
d’or» néolibéraux. Des milliards et des milliards de dollars, d’euros
et également de francs sont injectés dans un système malade sans sauver
un seul emploi. Mais il y a pire: les entreprises soutenues grâce à des
aides publiques présentent des «plans d’assainissement» qui détruiront
des milliers d’emplois. L’Europe prévoit un taux de chômage d’au moins
10%, mais ce devrait être un pronostic «lénifiant». En aidant
financièrement des industries et des banques en difficulté, les Etats
européens risquent la faillite. Certes, il n’y aura guère de faillites
d’Etats mais les Trésors publics pillés et les pertes colossales des
institutions sociales et de prévoyance dues à la spéculation sont une
bonne raison de forcer la population à renoncer «volontairement» à ses
droits acquis, à ses économies et à la protection sociale. La question
se pose de savoir dans quelle mesure la situation désastreuse due à la
destruction d’emplois, à l’effondrement des systèmes économique et
financier et à des Etats insolvables n’a pas été provoquée pour
résoudre le problème du blocage des réformes.
Il ne faut pas qu’on
en arrive là. Au lieu de sombrer dans la passivité, effrayés par les
menaces pesant sur nos bases existentielles, nous devons surmonter le
choc et organiser la résistance. Et cela en nous concentrant sur
l’essentiel, en prenant nos responsabilités et, fidèles aux traditions
démocratiques, en nous associant pour agir. L’aide à l’autonomie fait
aussi partie de la démocratie authentique et de l’autodétermination.
La
solidarité ainsi que le fait de réfléchir à la sécurité des moyens de
subsistance et d’y travailler représentent la force déterminante qui
rend possible l’indépendance nécessaire pour protéger la communauté
internationale et nous-mêmes de la puissance destructrice de la
doctrine néolibérale du libre-échange.


Briser la dictature économique globale grâce à la souveraineté alimentaire



Le fait pour les peuples de pouvoir décider
eux-mêmes de ce qui est cultivé, récolté et stocké pour finir sur les
tables familiales est le moyen direct de s’affranchir de la domination
de l’économie globale. Quand les peuples auront reconquis la
souveraineté en matière d’alimentation et, partant, de politique
agricole et du commerce des produits alimentaires, d’autres secteurs
économiques échapperont au système économique global. La priorité est
cependant d’assurer les moyens de subsistance grâce à des aliments en
suffisance et d’excellente qualité. Elle est réalisée lorsque les
familles, les communautés villageoises, les régions et les Etats
disposent de ressources alimentaires garantissant que personne ne
souffrira de la faim, que personne ne tombera malade ou ne mourra pour
avoir absorbé de la nourriture ou des boissons avariées. Il s’agit pour
cela de respecter les conditions climatiques, géographiques,
cultu­relles et économiques dans leur diversité et de permettre des
solutions adaptées aux besoins de la population.
Retrouvons la
souveraineté alimentaire. Cette notion a été forgée par La Via
Campesina, groupement mondial d’organisations de petits paysans et de
travailleurs agricoles. Elle est notamment née de l’insatisfaction
grandissante des paysans face à la mondialisation qui s’est étendue à
l’agriculture. La Via Campesina estime qu’une économie agricole globale
sert uniquement les intérêts des grandes nations industrielles
exportatrices et l’agrobusiness mondial. Elle craint que les intérêts
des populations rurales et la sécurité alimentaire ne soient de plus en
plus écrasés par le rouleau compresseur de l’OMC. Elle voudrait
empêcher que l’on brade l’agriculture et que l’on détruise la
souveraineté de l’approvisionnement. Elle s’engage par conséquent en
faveur de l’amélioration des conditions de travail et de vie des petits
paysans et des travailleurs agricoles grâce à un commerce équitable, à
une plus grande justice sociale et à l’instauration d’une économie
durable dans le monde entier. Lors du Sommet mondial de l’alimentation
de 1996, La Via Campesina demandait déjà la souveraineté alimentaire de
tous les peuples. Depuis, cette revendication a été reprise sans
ambiguïté par un nombre croissant d’associations paysannes et d’ONG, et
maintenant également par les auteurs du Rapport sur l’agriculture
mondiale.
Les hommes doivent réapprendre à vivre de ce que produit
leur environnement proche. Il faut créer un équilibre entre l’homme et
la nature sur un territoire restreint, un cycle naturel de production
et de consommation ayant lieu sur un espace réduit, sans gaspillage ni
destruction des conditions de production et de vie naturelles. En
cherchant à réaliser cet équilibre, nous nous affranchissons des
dépendances et reprenons en main, petit à petit, la question
alimentaire.

Moyens de réaliser la souveraineté alimentaire



Soyons clairs: Aujourd’hui, la souveraineté
alimentaire n’est pas une mission des pays pauvres seulement mais
également des pays riches, donc de la Suisse. Tous les pays sont
appelés à résoudre cette question pour eux-mêmes, dans l’intérêt de la
lutte mondiale contre la faim. Il s’agit d’un acte de solidarité qui
n’a rien à voir avec le protectionnisme. Les papes du commerce mondial
auront beau protester et les gouvernements maintenir obstinément leur
point de vue, la population a le droit de réclamer la sécurité de
l’approvisionnement alimentaire.
Le droit de décider de la
production, de la transformation, du stockage et de la distribution des
produits alimentaires, et cela quantitativement, qualitativement et
écologiquement, dépend d’un certain nombre de conditions essentielles.
Chaque pays doit veiller à:
• économiser soigneusement les
ressources naturelles et à les exploiter de manière à assurer le degré
le plus élevé possible d’autarcie à long terme, c’est-à-dire pour les
générations futures;
• respecter le patrimoine culturel et les valeurs paysannes, au-delà du folklore;

assurer aux agriculteurs, quelle que soit l’importance de leur
exploitation, le libre accès aux terres agricoles, aux semences, à
l’eau, au savoir et à d’éventuelles mesures protectrices;

accorder la priorité, en matière de promotion par l’Etat, à la
production d’aliments sains et d’excellente qualité qui soient adaptés
aux spécificités climatiques, culturelles et économiques;

orienter la production surtout vers les besoins locaux et le marché
national et d’approvisionner en suffisance la population en aliments
naturels et sains;
• faire que les structures de production, de
transformation et de logistique, aussi bien en ce qui concerne les
friches que la taille des exploitations, offrent des conditions
initiales optimales pour l’approvisionnement local de la population et
garantissent aussi en temps de crise la plus grande sécurité
d’approvisionnement possible grâce à la flexibilité et au partage des
risques;
• intégrer les structures situées en amont et en aval dans l’approvisionnement alimentaire fondé sur des petites unités;
• payer aux paysans des prix appropriés et leur permettant de vivre décemment;
• préparer et appliquer en fonction des situations des mesures de régulation afin d’empêcher les productions excédentaires;

donner la possibilité de prendre des mesures protectrices contre
l’importation de «produits bon marché» et de soutenir efficacement la
production d’aliments de base (p. ex. prix plus élevés);

interdire absolument les aides à l’exportation et les mesures internes
de soutien à l’exportation à des prix inférieurs aux coûts de
production.
Et pour finir: Que celui qui n’en a pas encore un
s’installe un cellier et fasse des ré­serves, cultive un potager
familial et apprenne les rudiments d’une cuisine simple et saine. Mais
il devrait avant tout mettre sur pied dans son quartier ou son village
un réseau d’aide à l’autonomie entre les habitants et avec les
paysans.









Mardi 10 Mars 2009











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