Les Arabes israéliens se sentent bafoués par la justice de leur pays
L’État hébreu ne poursuivra pas les policiers responsables de la mort de treize manifestants en octobre 2000
L'Orient/Le Jour 19/9/2005
Les représentants de la minorité arabe d’Israël s’indignaient hier de l’immunité accordée par l’État aux policiers responsables de la mort de treize manifestants tués par balles en octobre 2000. Brandissant des portraits des personnes tuées lors d’un sit-in de protestation à Jérusalem, des dizaines de proches des victimes ont dénoncé cette décision, jurant de « continuer la lutte jusqu’à ce que les policiers soient punis ».
Des avocats du Centre juridique de défense des droits de la minorité arabe (Adala) ont annoncé pour leur part qu’ils présenteraient un recours devant la Cour suprême, et si cela ne suffisait pas, devant des instances internationales. « Il y a des pays comme le Canada, l’Australie, les États-Unis et certains pays européens qui pourraient poursuivre les auteurs de ces crimes », a déclaré aux journalistes le directeur du centre, Me Hassan Djabarin. Dans un rapport publié hier, une commission de la « police des polices », relevant du ministère de la Justice, a conclu qu’elle ne disposait pas « d’éléments suffisants pour justifier des inculpations ». La commission a estimé qu’il était impossible d’identifier les balles des policiers qui avaient tiré, compte tenu notamment du fait que les familles des victimes avaient refusé des autopsies. Elle a justifié dans certains cas des « tirs contre les jambes de manifestants » participant à des émeutes.
Des représentants de la communauté arabe d’Israël, qui avaient élevé de vives protestations et menacé dès samedi de faire appel à des instances internationales, se sont réunis hier pour décider des formes de protestation ces prochaines semaines. « C’est une décision inique que nous ne sommes pas prêts à accepter. Nous ne sommes pas disposés à passer l’éponge et à permettre aux policiers coupables de ne pas être inquiétés, et s’il le faut, nous nous adresserons à des instances internationales », a déclaré Shawki Khatib, le président d’un comité représentatif de la minorité arabe.
« Depuis le début, il était clair que la “police des polices” couvrirait plutôt les auteurs de ces crimes et ne les poursuivrait pas », a-t-il ajouté.
De son côté, une députée de gauche, Zaava Galon, a dénoncé cette décision qui « constitue, selon elle, un mépris de la vie humaine et contredit les recommandations d’une commission précédente ».
En octobre 2000, douze Arabes israéliens et un Palestinien installés en Israël avaient été tués par des tirs de la police lors de manifestations violentes de solidarité avec les Palestiniens, peu après le début de l’intifada, à la fin du mois de septembre. Dans un rapport rendu public en septembre 2003 après deux ans et demi de travaux, une commission étatique présidée par le juge Theodore Orr avait infligé un blâme sévère à la police, sans réclamer de poursuites judiciaires spécifiques.
La commission avait lié les violences d’octobre 2000 à « l’incapacité des différents gouvernements israéliens à traiter de façon équitable la minorité arabe ». L’État « n’a pas fait assez pour mettre fin à la discrimination (subie par cette population), pour lui donner des droits égaux ni pour imposer en son sein la loi et l’ordre », soulignait la commission.
La police était accusée d’avoir eu une attitude « a priori hostile » envers la minorité arabe et d’avoir caché aux responsables politiques le fait qu’elle avait tiré à balles réelles pour réprimer des émeutes.
Une minorité arabe comptant quelque 1,2 million de personnes vit en Israël (près de 19 % de la population totale de l’État hébreu).
Ils sont les descendants de 160 000 Palestiniens restés sur leurs terres après la création de l’État juif en 1948. Israéliens de nationalité mais Palestiniens de cœur, ils souffrent de discriminations qu’ils ne cessent de dénoncer.
Sources:
http://www.lorient-lejour.com.lb/page.aspx?page=article&id=294359