Aliko Dangote : l'homme le plus riche d'Afrique ?
Originaire du Nigeria, et peu connu, Aliko Dangote est pourtant
officieusement considéré au Nigeria comme l'homme le plus riche
d'Afrique Par Paul Yange
Aliko Dangote inhabituellement vêtu d'un costume
© bbc.co.uk
Juillet 2007 : Aliko Dangote, un homme d’affaires nigérian peu connu en
dehors du Nigeria, s’exprime, et déclare qu’il est "bien, bien plus
riche qu’Oprah Winfrey".
Forbesa en effet établi la fortune de la célèbre animatrice afro-américaine à
1,5 milliards de dollars, ce qui ferait de cette dernière la "Noire la
plus riche du monde".
Au premier semestre 2007, Dangote a introduit deux de ses treize
sociétés sur le NSE (Nigerian Stock Exchange, la bourse nigériane) et
la valeur de ses parts dans ces deux sociétés a été estimée par les
analystes à 4 milliards de dollars ! L’une des deux sociétés cotées,
Dangote Sugar Refineryest devenue la plus grosse capitalisation boursière du Nigeria. La
valorisation de ses participations dans ses deux sociétés place
directement Dangote dans le peloton de têtes des hommes les plus riches
d’Afrique, sachant que 11 sociétés demeurent non cotées en bourse pour
l’instant...
A 50 ans, et bien que potentiellement l’homme le plus riche d’Afrique
("ma fortune doit d’abord être évaluée par Forbes" a-t-il déclaré
modestement, ajoutant qu’il était "confiant"), Dangote demeure un
quasi-inconnu sur la scène continentale, et sur la scène
internationale. L’homme est pourtant présent dans tous les pans de
l’économie du Nigeria. Il domine en effet les marchés du sucre, du
ciment, du riz, des pâtes alimentaires, du textile, du sel, et est
fortement présent dans l’industrie des transports (il est notamment
co-propriétaire d’une compagnie aérienne), du pétrole et du gaz.
Aliko Dangote, Olusegun Obasanjo, et Femi Odotela
© nigeriafirst.org
L’entrée de Dangote dans le monde des affaires date de 1977, lorsque ce
dernier avait 20 ans. Selon ses dires, il a obtenu de son grand-père
maternel, patriarche d’une famille qui avait beaucoup de succès dans le
monde des affaires, les Dantata, un prêt de 500 000 nairas . Ce dernier
lui avait également acheté trois camions de 10t, qui travaillaient, et
dont le grand-père conservait les revenus qu'il lui donna gratuitement.
Dangote se retrouva avec environ 127 000 nairas pour lui, et son
grand-père lui fit une lettre lui permettant d’obtenir un prêt de 500
000 nairas sans intérêt (grosse somme d'argent à l'époque, avec
laquelle on pouvait acheter 10 mercedes ndlr), remboursable sur deux
ans.
Du fait de la rareté du ciment à cette époque, les clients payaient
plusieurs mois à l'avance. Avec un camion de ciment, on pouvait gagner
1400 nairas par jour, et Dangote en avait quatre. Il se retrouva donc
rapidement en mesure de rembourser le prêt.
Ayant gagné beaucoup d’argent, Dangote n'a pas d’idées arrêtées sur
d’autres secteurs dans lesquels il peut travailler. Son arrivée en 1980
à Lagos va changer le cours de son destin : "j’ai découvert à Lagos où
je pouvais trouver les personnes qui accordaient des licences
d’import-export". Kano, la base d’où sa famille déploie ses activités
est une des plus grandes plaques tournantes du commerce en Afrique de
l’Ouest, mais n’offre pas les opportunités de Lagos, à l’époque la
capitale, qui compte déjà à l’époque plusieurs millions d’habitants.
Aliko Dangote
A partir de là, Dangote rembourse son oncle en trois mois, "car il
n’avait plus besoin de son argent". Il demande à ce dernier
l’autorisation de "monter" à Lagos créer ses propres affaires, car il a
le sentiment que être membre d’une grande famille constitue un handicap
pour développer des affaires.
Peu après son arrivée à Lagos, où il arrive après avoir gagné pas mal
d’argent dans le secteur du ciment, les militaires prennent le pouvoir
et mettent en prison tous les hommes d’affaires importants de la ville,
les accusant d’être corrompus. C’est la chance d’une vie pour Dangote
qui a l’occasion de s’implanter sur des marchés laissés vacants par les
hommes d’affaires emprisonnés. Et il ne manque pas de la saisir. Il se
lance dans le sucre et fait une percée dans l’importation de riz. Il
s’essaye à investir dans une banque qui fait faillite, ce qui lui sert
de leçon et le pousse à se limiter à des secteurs d’activité qu’il
connaît.
Pour Dangote, ses décisions d’investissements sages et prudentes, ainsi
que le réinvestissement de ses profits au Nigeria font partie des
raisons qui expliquent que ses affaires aient pris de l’ampleur.
L’entrée dans le monde de l’industrie a également contribué à la
fortune de Dangote. Lors d’un voyage au Brésil à la fin des années 80,
il a l’occasion de visiter quelques entreprises et est impressionné par
les usines qu’il voit. "Je pensais que le Brésil et le Nigeria se
situaient à peu près au même niveau, parcequ’à cette époque on
entendait dire que le Brésil était une nation très endettée. Mais quand
j’y suis allé, j’ai découvert une industrialisation massive.
Incroyable. J’ai commencé à réfléchir en me disant ‘comment se fait-il
qu’il y ait un tel développement de l’industrie au Brésil et pas au
Nigeria. A mon retour, j’ai décidé de me lancer dans l’industrie.’"
Aliko Dangote (au milieu)
© nigeriafirst.org
Dangote choisit de commencer dans l’industrie, sur des marchés qu’il
connaît déjà. Il construit ainsi une raffinerie de sucre, un marché
qu’il domine, puis se met à fabriquer des emballages pour les pâtes
alimentaires, dont il est l’un des importateurs. Aujourd’hui, il
possède une des plus grandes usines de production de ciment du
continent africain. Et ses projets d’investissement atteignent 10
milliards de dollars (Ils comprennent notamment la construction d’une
raffinerie de pétrole d’une capacité de 300 000 barils par jour, une
station électrique d’une capacité de 5000 mégawatts).
S’il n’est pas intéressé par la politique, Aliko Dangote y a néanmoins
ses entrées au plus haut niveau. Comme Lakshmi Mittal en Angleterre qui
avait créé la polémique en faisant un don financier au parti de Tony
Blair, Dangote a financé le parti d’Obasanjo en 2003 (200 millions de
nairas), et le projet de bibliothèque présidentielle. Mais c’est plus
récemment, c’est le rachat de trois des quatre principales raffineries
du pays, accusées d’être bradées par le pouvoir sortant qui lui a valu
de créer la polémique. Dangote et son ami Femi Odotela, avaient versé
721 millions de dollars pour les trois raffineries, et se sont
finalement retirés de la transaction. Selon les détracteurs de cette
privatisation, l’attribution effectuée lorsque Obasanjo était encore au
pouvoir, n’avait pas suivi un processus normal.
A 50 ans, d’une simple entreprise d’import-export, Aliko Dangote a fait
un groupe pesant plusieurs milliards de dollars, présent outre le
Nigeria, en Afrique de l’Ouest (Ghana, Togo, Bénin, Nigeria...).
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