12 octobre 2006
Communiqué de presse
Le CADTM salue l’initiative de la Norvège sur la dette et demande à tous les créanciers d’aller encore plus loin (PNG)
imprimer
La Norvège vient de reconnaître sa responsabilité dans l’endettement illégitime de 5 pays - Equateur, Egypte, Jamaïque, Pérou, Sierra Leone - et a décidé d’annuler unilatéralement une part des créances qu’elle détient envers ces pays à hauteur de 62 millions d’euros.
En effet, entre 1976 et 1980, la Norvège a exporté 156 bateaux vers 21 pays du Sud pour un coût total de 440 millions d’euros, non pas pour soutenir leur développement, mais afin de venir en aide à sa propre industrie de construction navale en crise. Ces exportations s’appuyaient sur des prêts contractés par les pays concernés envers l’agence norvégienne de crédits à l’exportation, le GIEK. Aujourd’hui, la Norvège reconnaît dans cette campagne d’exportations un échec en terme de politique de développement. Elle est toujours créancière de 7 des 21 pays (les 5 cités précédemment, la Birmanie et le Soudan) mais ces dettes n’ont apporté aux populations de ces pays que pauvreté, dette illégitime et malversations financières.
Par exemple en Equateur, une étude menée par le Centre des droits économiques et sociaux (CDES) et la Commission pour le contrôle civil de la corruption (CCCC) a révélé que la dette initiale pour l’achat des bateaux était une dette privée de 13,6 millions de dollars mais est devenue une dette publique de 50 millions de dollars assumée illégalement par le gouvernement équatorien.
Le CADTM, qui milite depuis de longues années pour la reconnaissance de la notion de dette odieuse, salue la décision du gouvernement norvégien de reconnaître sa responsabilité dans une dette profondément illégitime qui représente un fardeau insupportable pour les pays concernés. De surcroît, le CADTM se réjouit que cette annulation de dette ne soit pas prise en compte dans les chiffres de l’aide publique norvégienne au développement, contrairement à ce qui se fait ailleurs, déformant gravement les montants réels alloués par les pays riches au développement du Sud.
Le CADTM considère que cette décision des autorités norvégiennes est le résultat de l’excellent travail de mobilisation et de sensibilisation réalisé par les activistes et les mouvements pour l’abolition de la dette actifs dans les pays concernés, en particulier en Norvège et en Equateur.
Le CADTM relève avec satisfaction que la Norvège rompt pour une fois la solidarité entre pays membres du Club de Paris (groupe informel de 19 pays riches créanciers) puisqu’elle a délibérément agi unilatéralement. De ce fait, la Norvège apporte la preuve qu’il est possible d’arriver à de réelles avancées sur la dette dès lors qu’on refuse de demeurer dans le cadre du Club de Paris au sein duquel les pays endettés se retrouvent isolés face au front uni des grandes puissances. Malheureusement, la Norvège souligne dès à présent que les discussions sur les remises de dettes norvégiennes réintégreront le cadre du Club de Paris dès 2007.
Par conséquent, et suite aux mobilisations [1] qui se sont déroulées en cette année 2006, le CADTM exige la suppression pure et simple de l’anomalie institutionnelle qu’est le Club de Paris, qui entrave toute solution juste au problème de la dette depuis 50 ans.
Enfin, le CADTM appelle tous les créanciers officiels à reconnaître leur responsabilité dans le surendettement et le mal-développement des pays du Sud, à déclarer ces dettes odieuses et à abolir immédiatement la totalité des créances qu’ils détiennent envers les pays en développement.
Notes:
[1] Voir cadtm.org et clubdeparis.fr
En cas de reproduction de cet article, mentionnez s'il vous plaît la source.
URL: http://www.cadtm.org