Sarkozy et l’Immigration choisie au Sénégal : Wade collabo ?
24/09/2006
Immigration concertée est désormais l’__expression à la mode entre le Sénégal de M. Wade et la France du président de l’UMP Nicolas Sarkozy. Après une passe d’armes virile en mai 2006 où le président sénégalais avait contesté vivement l’idée d’une immigration choisie qui consacrerait la fuite des cerveaux de son pays, cadres, ingénieurs, médecins, le même est désormais d’accord pour collaborer à l’édulcoration sémantique de l’immigration dite dorénavant concertée. Suffit-il de parlementer et de distribuer quelques bibelots aux rois nègres actuels et leurs assesseurs pour obtenir leur adhésion enthousiaste et envahissante aux projets fabriqués pour avilir leurs peuples ? …


Chacun sait que la question de l’immigration ressortit à la multiplication des pauvretés qui a sanctionné deux décennies d’ajustements structurels et privatisations, d’exportations des capitaux africains et de prédation par les multinationales des ressources africaines. Les classes dirigeantes africaines corrompues sans limites y ayant rajouté leur savoir-faire propre en accaparant et concentrant la richesse interne entre quelques mains d’oligarques, les filets sociaux et réseaux culturels n’ont pas résisté et l’immigration «coûte que coûte» est devenue l’ultime espoir pour des milliers d’âmes en perdition. Projet collectif panafricain, il est un des seuls derniers dénominateurs communs à l’Afrique noire, impliquant des familles entières mises à contribution, en attendant en retour une meilleure satisfaction de leurs besoins de bases.

En dehors donc de nouvelles générations de politiques économiques, celles déspécialisant l’Afrique de son positionnement historique de pourvoyeur à vil prix de ressources naturelles et humaines au profit des centres mondiaux d’accumulation, il sera peu probable d’inverser la tendance. Sauf si des opportunités et courants migratoires inconnus, ignorés ou mal révélés apparaissaient pour se substituer aux filières traditionnelles.

Le concept de «concertation» autour de cette immigration s’apparente donc à de la cosmétique électoraliste, au bénéfice des concernés concertés. Le président sénégalais Wade, à plus de 80 ans est candidat à sa réélection quand Nicolas Sarkozy brûle toutes les traditions républicaines, empiète sur tous les domaines politiques y compris celui du président de la république pour promouvoir une candidature assoiffée de pouvoir, proaméricaine, pro-israélienne et sans scrupules. Le grand raout médiatique est à coup sûr «gagnant-gagnant» pour l’affichage électoral des duettistes, mais pour le reste …

Le leurre de cette convention dont l’ultime but est d’atteindre les objectifs quantitatifs de 25 000 expulsions du ministère de l’intérieur pour flatter un certain électorat, est sa dimension de co-développement, comme si des petits projets individuels, microscopiques avaient jamais construit infrastructures, écoles, hôpitaux, ou formé des compétences sur le long terme. Si le Sénégal s’engageait à collaborer à la répression de l’immigration clandestine, par l’intervention de ses forces de police, de renseignement, contre des facilitations de mobilité pour les étudiants et hommes d’affaires, ce serait là encore à courte vue pour les Sénégalais. Car les pratiques de protectionnisme sont multiples et les tracasseries administratives liées aux visas n’en sont qu’un aspect, rien n’empêchera d’ouvrir les vannes des visas et de resserrer les autres autorisations, les exigences de normes industrielles et professionnelles nécessaires au réel développement des affaires.
Quant aux étudiants, là encore, contribuer à la massification des étudiants africains en France, à la dévalorisation de leurs diplômes alors que des destinations plus attractives pourraient permettre de diversifier les formations, les compétences et expériences, ne ressemble pas à du «tous gagnants». L’ambition serait plutôt d’aller vers les pays qui ont réussi, dans le contexte monopolistique dominé par l’Occident d’aujourd’hui, à former des compétences dans les NTIC, dans les industries stratégiques ou à exportables à valeur ajoutée, Inde, Chine, Brésil, Cuba, etc.


Messieurs Wade et Sarkozy ont su donner par leur opération de communication de pseudo-développement une illustration des vieilles routines morganatiques de la Françafrique. Hier fâchés, ils organisent ensuite un «bluff» sur les souffrances des Africains dont plus de 30 000 ont échoué sur les côtes du sud de l’Europe en moins d’un an, fuyant la misère.
Beaucoup ne supportent plus, en supplément de leurs luttes de survie, les autoritarismes d’un président octogénaire, accroché au pouvoir, qui réprime chaque jour davantage la presse de son pays, emprisonne le personnel politique à l’évocation de son âge, et impose les membres de sa famille aux postes juteux de nation. Cet homme, un certain Sarkozy l’a qualifié de «sage», de «très grand chef d’état africain», «compétent». Encore un peu et cet immigré de présidentiable aurait dit s’adresser à lui comme à quelqu’un d’«intelligent».
Pierre Prêche
Afrikara.com