Quebec : les Noirs ont toujours des difficultés à participer à la société
C'est ce qui ressort d'une étude de la député Yolande James
Par Jean Numa Goudou (Panos/Alterpresse.org)
Malgré leur niveau élevé de formation et leur longue histoire au Québec, les Noirs ont de la difficulté, encore aujourd’hui, à
participer à la société québécoise.
Le racisme et la discrimination, notamment, continuent de barrer la route à cette communauté. C’est ce qui ressort d’une
enquête menée par Yolande James, la seule députée noire de l’Assemblée nationale du Québec. C’est en région,
principalement à Sherbrooke, Outaouais dans la ville de Québec, que les Noirs vivent leur pleine participation, s’étonne la
députée James.
« Leurs expériences sont différentes, ils sont moins nombreux », explique la présidente du groupe de travail sur la pleine
participation des Noirs à la société québécoise. Après dix jours de tournée et 277 rencontres avec des citoyens et
Organismes de la Communauté noire, Yolande James exige « des actions dès maintenant », de la part du gouvernement du
Québec.
« Le gouvernement doit jouer un rôle de chef de file dans ce domaine », insiste-t-elle.
Jeunes et mieux formés
L’accès à l’emploi, au logement et le racisme sont les principaux obstacles à l’intégration des Noirs au Québec. Pourtant, les
Noirs sont une population jeune, note la ministre de l’immigration du Québec, Lise Thériault.
6 sur 10 ont moins de 35 ans et sont plus nombreux à détenir des diplômes ou des formations post-secondaires. En réalité,
même le gouvernement du Québec ne prêche pas par l’exemple en ce qui a trait à l’embauche.
« Lorsqu’on est arrivé en 2003, les données étaient aux alentours de 2.5...3% ; présentement, les chiffres tournent autour de
6% », affirme la ministre Thériault.
Les Syndicats, les Médias, les Commissions scolaires, entre autres, doivent aider à changer cette situation, soutient la
députée Yolande James.
La Ville de Montréal, de son côté, se réjouit d’avoir le plus grand nombre de gens des « minorités visibles » (Noirs Latinos et
Autochtones) en son sein, soit un peu plus d’une personne sur cent. Près de 2 millions de personnes vivent à Montréal. Marcel
Tremblay, responsable des relations avec les communautés culturelles à la Ville, attribue la situation à un manque
d’information.
« Prends un Blanc, Montréalais, qui est là. Lui, son premier réflexe, c’est de penser à sa sœur, son cousin, son frère et puis
tout ça, pour venir prendre un contrat à la Ville », fait remarquer le frère du maire Gérald Tremblay.
Marcel Tremblay invite les Noirs à « inonder les centres décisionnels pour être en mesure de savoir ce qui se passe », seul
moyen d’être favorisé, selon lui.
Ingénieur-chauffeur de taxi
Au Québec, la difficulté pour un immigrant de trouver du travail reste un secret de polichinelle. Tout le monde le sait et vit
avec cela. On parle plutôt du mythe « Ingénieur chauffeur de taxi » pour expliquer la difficulté de ceux qui viennent
d’ailleurs à trouver du travail.
Martine Hudicourt, médecin haïtien, émigre au Québec en 1996. La province ne lui reconnaît aucune compétence à son
arrivée. « Pendant deux ans, j’ai travaillé comme aide-éducatrice dans une Garderie, ensuite comme préposée aux
bénéficiaires durant 3 ans », nous explique docteure Hudicourt avec courage. 8 ans furent nécessaires pour qu’elle obtienne
son permis comme médecin de famille dans la province canadienne.
Carla Simplice est moins chanceuse. Cette ingénieure en génie civil quitte Haïti fin 2003 en raison de l’insécurité. Le Québec
lui reconnaît un Baccalauréat en génie du bâtiment. Mais cela ne lui permet pas de travailler pour autant.
« Depuis la première année, j’ai dû me réorienter en soins santé », dit-elle avec douleur.
Elle explique qu’elle n’a pas le choix car « il faut que je paye mes factures de téléphone et d’électricité ». Carla Simplice n’a
pas son métier « dans son cœur ni dans âme », mais « je me débrouille, car j’aime aider », conclut-elle.
Aucune surprise pour les Noirs
« Je pense que c’est une bonne initiative d’avoir fait la consultation. Ce qui ressort n’étonne personne de la communauté
noire, parce que ce sont des choses qui ont été dites et redites », indique Pierson Vaval de l’Équipe Rivière des Prairies (RDP)
Nord-est de Montréal.
« En lisant le rapport, je me suis rendu compte que, pour une fois, avec peut-être Yolande James à la barre, ils ont été
peut-être, un peu plus, au fond des choses », souligne Harry Dela de Maison d’Haïti.
« Il y a des choses très positives là-dedans, ce qui m’a impressionnée, c’est cette gangrène, qu’est le racisme, qu’on a touché
en premier, et deuxièmement aussi d’inscrire l’apport des communautés noires. Ils ont dit que ça va être inscrit dans les
manuels scolaires, ça c’est une première », relève Ellisabeth Mdenbil du Mois de l’histoire des noirs (Célébration annuelle).