M. Castro répond aux "infâmes calomnies" sur sa fortune
LE MONDE | 18.05.06 | 14h55 • Mis à jour le 18.05.06 | 14h55
SAINT-DOMINGUE CORRESPONDANT
Durant plusieurs années, Fidel Castro a traité par le mépris les allégations du magazine américain Forbes le classant parmi les plus grosses fortunes des "rois, reines et dictateurs". La publication, début mai, du palmarès 2006 a suscité sa "nausée" et déclenché sa colère.
Le président a convoqué une brochette de hauts dirigeants cubains et de personnalités amies - dont le directeur du Monde diplomatique, Ignacio Ramonet - pour répondre, durant plus de quatre heures, à la télévision, aux "infâmes calomnies" de Forbes.
"Je les mets au défi de prouver ce qu'ils disent ici ! a tonné Fidel Castro, en exhibant un exemplaire de la revue. S'ils prouvent que j'ai un compte à l'étranger, de 900 millions ou de 1 dollar, je démissionne de toutes les fonctions que j'exerce !", a-t-il ajouté. Affirmant ne rien posséder et ne gagner que 900 pesos (32 euros) par mois, il a accusé le président Bush et les agences de renseignement américaines d'orchestrer une campagne pour le discréditer, et à travers lui la "révolution" cubaine.
Le magazine attribue à Fidel Castro une fortune de 900 millions de dollars (700 millions d'euros), en forte progression par rapport aux 550 millions de dollars avancés pour 2005.
Forbes reconnaît que ces évaluations "relèvent plus de l'art que de la science". S'appuyant sur les témoignages d'"anciens officiels cubains", le magazine soutient que Fidel Castro tire sa fortune d'une partie des bénéfices de sociétés publiques comme le Palais des conventions, Cimex, la compagnie qui a le monopole de l'import-export, et Medicuba, qui commercialise les vaccins et médicaments produits dans l'île.
"MANIPULATIONS"
"C'est comme si Forbes attribuait à George Bush 10 % des 500 milliards de dollars provenant du narcotrafic et du crime organisé qui sont blanchis chaque année en toute impunité dans les banques nord-américaines", a riposté Francisco Soberon, président de la Banque centrale de Cuba, qui en a profité pour annoncer que Cuba avait récemment émis pour 400 millions d'euros de bons du Trésor à la Bourse de Londres. Le succès de cette opération témoigne, selon M. Soberon, "de la confiance croissante d'une partie de la communauté financière internationale dans l'honnêteté et le sérieux du gouvernement cubain".
Après le ministre de la culture, Abel Prieto, qui a énuméré une liste de "manipulations de la presse internationale", l'historien Eusebio Leal est monté au créneau. Pour illustrer le "désintéressement de Fidel", il a révélé que, dans les années 1990, le "commandant en chef" l'avait chargé de distribuer à des musées et des centres culturels 11 687 cadeaux, parmi lesquels des tableaux, des bijoux, des objets en ivoire et des tapis précieux provenant de 133 pays.
Jean-Michel Caroit
Article paru dans l'édition du 19.05.06
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3222,36-773270@51-768481,0.html