Le 20 juin 1894, Alexandre Yersin, un jeune médecin militaire formé à l'institut Pasteur, isole à Hong-Kong le bacille de la peste.
Alexandre Yersin (1863-1943)Le jeune homme est né en 1863 dans une famille puritaine de la région de Lausanne. Il s'intéresse très jeune à la flore et à la faune, avant de se déterminer à étudier la médecine, d'abord à Marbourg, puis à Paris. Engagé comme préparateur par Roux, il prépare à l'Institut Pasteur une thèse sur la tuberculose, tout en contribuant à l'isolement de la toxine diphtérique.
Faisant preuve d'une indépendance d'esprit singulière pour l'époque, il n'hésite pas à suivre le cours de bactériologie de Koch à l'Institut d'hygiène de Berlin. A partir de 1890, il profite d'un séjour en Indochine pour explorer les hauts plateaux de Cochinchine et d'Annam. En 1894, une épidémie de peste ravage la Chine méridionale.
Yersin devant sa paillote-laboratoire de Hong-KongAlexandre Yersin se rend à Hong-Kong et, pourvu de moyens dérisoires, réussit à identifier et isoler en trois semaines le responsable de ce fléau immémorial. Il s'agit d'un microbe très résistant qui porte depuis lors le nom de son découvreur : le bacille de Yersin («Yersinia pestis»). Il existe à l'état naturel chez certains rongeurs d'Asie et peut être transmis par l'intermédiaire de puces à des rats et, de là, à l'homme.
Revenu à Paris l'année suivante, Alexandre Yersin met au point avec Calmette et Roux un vaccin et un sérum contre la peste. De retour à Canton, il démontre l'efficacité de ces remèdes sur un séminariste promis à la mort.
Le médecin porte dès lors ses efforts sur le développement des Instituts Pasteur fondés à Hanoi, Saigon, Nha Trang et Dalat (sérums, vaccins, travaux d'hygiène).
Il encourage en parallèle l'introduction dans le pays de l'arbre à caoutchouc et de l'arbre à quinine. Il élève des chevaux pour la fabrication du sérum et implante des races de vaches laitières.
Il promeut l'extraction industrielle de la quinine et choisit Dalat pour y établir des sanatoria. Yersin devient le premier doyen de la faculté de médecine de Hanoï en 1902, mais il renonce bientôt aux honneurs pour défendre les intérêts du peuple annamite fort méprisé et exploité, épousant une indigène et vivant au sein de la population dans le village de Soui Dau, près du port de Nha Trang (Annam).
Selon les termes d'une lettre écrite vers 1890, «demander de l'argent pour soigner un malade, c'est un peu lui dire la bourse ou la vie !»
Alexandre Yersin meurt en 1943, pendant l'occupation japonaise. C'est à peu près la seule figure de l'époque coloniale qui n'a cessé d'être vénérée au Viet-Nam, où toutes les villes ont un lycée à son nom. Paradoxalement, la Suisse et la France (dont il avait adopté la nationalité) l'ont en revanche bien délaissé...