Pas facile d'identifier les prochains gagnants boursiers
6 février 2006
Bernard Mooney , Journal Les Affaires
Étudiez bien le tableau ci-contre. Il pourrait vous aider à identifier les plus grands gagnants boursiers.
L'équipe de la société de courtage américaine Think Equity Partners a publié récemment les 25 titres les plus performants pour les 10 années terminées le 31 décembre 2005. Cette liste fascine à bien des égards.
D'abord, trouver les grands gagnants à long terme peut être extraordinairement payant. L'investisseur qui aurait placé 1 000 $ dans la chaîne de commerce au détail spécialisée American Eagle Outfitters à la fin de 1995 aurait dans ses poches environ 53 000 $ aujourd'hui ! C'est un rendement annuel composé de 49 %, qui surpasse n'importe quel indice.
La liste frappe également par la variété des secteurs et des industries dans lesquelles évoluent ces entreprises championnes. Outre le commerce au détail, on y trouve des sociétés oeuvrant dans la technologie, la biotechnologie, l'énergie, les soins de santé, les services financiers et les produits naturels. Vous pouvez donc pratiquement trouver des coups de circuit boursiers partout !
Pensez "petit"
L'autre évidence, c'est que pour trouver de tels gagnants, vous avez avantage à fouiller parmi les sociétés à petite capitalisation. Au départ, ces 25 titres avaient une valeur boursière moyenne de 419 M$ US et une valeur médiane de 199 M$ US. Les deux seules exceptions oeuvraient dans la haute technologie, soit Dell et Qualcomm. Dix sociétés valaient moins de 100 M$ US au 31 décembre 1995.
Cela signifie que votre territoire à explorer est vaste, car le nombre de petites entreprises est vraiment élevé. Cela veut dire également que les risques sont élevés. Car ce que le tableau ne montre pas, ce sont les centaines de titres qui n'ont rien fait depuis 10 ans et qui auraient pu attirer votre attention en 1995.
Autre observation frappante : l'investisseur qui aurait exercé un tri sur la base de la seule évaluation, éliminant les titres supposément trop chers sur la base de critères comme les ratios cours-bénéfices et cours-valeur comptable, aurait éliminé la plupart de ces grands gagnants. Le ratio cours-bénéfices moyen, en décembre 1995, se situait à 31,8 et le ratio médian à 18,9.
Par ailleurs, il est important de préciser qu'il ne faut pas confondre cause et effet. Le fait d'être petit ne fait pas d'un titre un placement intéressant. Car l'évidence la plus importante, c'est que ces titres ne se retrouvent pas sur cette liste sélecte en raison de leur appartenance à un secteur particulier, ni directement au fait de leur taille ou même du fait qu'ils étaient ou non des aubaines !
Bénéfices, bénéfices et bénéfices
Non, leur performance provient presque entièrement du fait qu'ils ont réussi à accroître leurs profits à un rythme exceptionnel. La croissance annuelle composée des profits des 25 titres a été de 38 %, et la croissance médiane de 27 %. C'est plusieurs fois la croissance des profits du S&P 500 !
Le lien le plus évident et le plus solide à faire est justement entre la croissance des bénéfices et l'appréciation du titre. Les profits ont crû de 38 % et les titres ont progressé de 35 %. L'augmentation du ratio cours/bénéfice a contribué en moyenne de 6 % par an au rendement de l'ensemble des sociétés. C'est considérable, mais c'est la croissance des bénéfices qui explique la plus grande partie de la performance. Cela dit, cette croissance explique aussi la hausse du ratio cours-bénéfices.
L'investisseur à long terme devrait donc concentrer ses efforts à identifier des entreprises capables de maintenir une croissance élevée de leurs profits pendant le plus grand nombre d'années.
Enfin, si vous vous demandez si cette liste recèle de bons titres à acheter pour les prochaines années, j'ai une mauvaise nouvelle pour vous.
Les experts de ThinkEquity ont voulu savoir si cette période des 10 dernières années était une anomalie. Ils ont donc effectué le même exercice, mais de 1985 à 1995.
Or, les résultats sont identiques. Les 25 meilleures sociétés de cette période avaient une valeur boursière médiane de 134 M$ US en 1985, leur ratio cours-bénéfice médian se situait à 17,6 et la croissance annuelle de leurs profits a été de 31 %. Ces titres ont crû à un rythme annuel de 32 %.
Fait pas du tout inintéressant : aucun titre des 25 de la cuvée 1985-95 ne se retrouve dans le tableau ci-contre. Comme quoi, comme le disait si bien l'ancien entraîneur du Canadien de Montréal, Claude "Piton" Ruel dans sa proverbiale sagesse : "Y'en aura pas de facile" !