Le Brésil atteint son autosuffisance pétrolière
Plate-forme pétrolière au large du Brésil.(Photo : Petrobras)
Plate-forme pétrolière au large du Brésil.
(Photo : Petrobras)
Le Brésil vient d’entrer dans le club restreint des pays qui peuvent subvenir totalement à leurs besoins pétroliers, suite à la mise en opération de la plate-forme P-50, au large de l’Etat de Rio de Janeiro. Il s’agit d’un atout économique d’importance majeure, étant donnée la flambée des cours avec le baril à plus de 74 dollars. C’est également une prouesse technologique de premier plan.
La nouvelle plate-forme, installée dans le champ Albacora Leste, à une centaine de kilomètres au large de l’Etat de Rio de Janeiro, va produire 180 000 barils par jour, l’équivalent de 11% de tout le pétrole extrait actuellement au Brésil. Il s’agit d’un projet gigantesque, comme aime à signaler la compagnie Petrobras et qui va ainsi produire un total de 1,91 millions de barils de brut par jour, tandis que la consommation totale du Brésil équivaut actuellement à environ 1,9 millions de barils quotidiens. Le gisement d’Albacora Est, situé dans le Bassin (Bacia) de Campos a été découvert en 1986. Il contient des réserves prouvées d’au moins 500 millions de barils de brut et plus de 7 milliards de mètres cubes de gaz naturel.
Les brésiliens ont décidé d’utiliser une unité de prospection flottante polyvalente, du type FSPO (Floating Production Storage and Offloading) qui permet d’extraire, traiter, stocker et distribuer du pétrole et du gaz. Cette plate-forme qui a coûté 634 millions de dollars pourra ainsi stocker 1,6 millions de barils et compresser 6 millions de mètres cubes de gaz.
Il y a 30 ans, le Brésil était obligé d’importer la totalité du pétrole nécessaire à sa consommation. Dorénavant ce pays de 180 millions d’habitants va pouvoir dégager un excédent d’au moins 3 milliards de dollars par an grâce aux exportations d’hydrocarbures.
Il est fort probable que d’autres projets off-shore entrent bientôt en phase opérationnelle dans le bassin de Campos. Jusqu’à une date récente la compagnie nationale brésilienne Petrobras était la seule engagée dans la prospection pétrolière dans le pays. Ses découvertes ont éveillé sans aucun doute l’intérêt de plusieurs groupes étrangers, dont l’anglo-néerlandais Shell, l’espagnole Repsol, ainsi que les américains Chevron, Devon et El Paso. La présence des compagnies étrangères s’impose aussi par l’importance des investissements.
Outre la P-50, on prévoit la mise en route d’autres zones de prospection dans d’autres bassins en eaux profondes, notamment les gisements d’Espirito Santo et de Golfinho, situés aussi au large de l’état de Rio de Janeiro. Petrobras prévoit une production de 2,3 millions de barils par jour en 2010. Dorénavant le Brésil va pouvoir faire concurrence à d’autres états pétroliers latino américains qui ont une production excédentaire, comme le Venezuela, ou le Mexique.
Une percée technologique importante
Dans une interview à RFI, Edmar Almeida, professeur à l’Institut d’économie de l’Université de Rio de Janeiro, rappelle que l’actuelle autosuffisance du Brésil en matière de production d’hydrocarbures était impossible lors des précédents chocs pétroliers. « Le Brésil a réussi, effectivement, à trouver du pétrole en quantité et il lui a fallu aussi trouver de nouvelles technologies d’exploitation en eaux profondes. Cela a permis au Brésil, qui ne connaissait pas ses richesses, de découvrir de nouvelles réserves et d’augmenter la production de pétrole».
Edmar Almeida considère que le développement de la prospection de pétrole dans son pays est aussi une conséquence des records atteints par les hydrocarbures dans les années 70 et 80 et qui ont « forcé » la compagnie Petrobras à utiliser des technologies très sophistiquées. Il considère, néanmoins, qu’il est temps de reformuler les politiques énergétiques, en faisant appel aux énergies alternatives. Le Brésil est d’ailleurs connu comme pays pionnier en matière de biocarburants.
L’autosuffisance pétrolière est bien sûr un atout politique important pour le gouvernement de centre gauche du président Lula da Silva. Ce n’est pas un hasard d’ailleurs si l’inauguration de la plate-forme P-50 a eu lieu ce 21 avril, le jour où l’on rend hommage à Tiradentes, Joaquim José da Silva Xavier, le premier brésilien à se manifester contre la domination coloniale de la couronne portugaise. Il fut pendu le 21 avril 1792.
par Antonio Garcia
Article publié le 21/04/2006 Dernière mise à jour le 21/04/2006 à 18:49 TU