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 Mamadou Koulibaly «Aujourd'hui les Ivoiriens voient clair»2

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Delugio
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Delugio


Nombre de messages : 107
Date d'inscription : 29/05/2005

Mamadou Koulibaly «Aujourd'hui les Ivoiriens voient clair»2 Empty
06062005
MessageMamadou Koulibaly «Aujourd'hui les Ivoiriens voient clair»2

Le texte complet de Mamadou KOULIBALY, Président de l’Assemblée nationale ivoirienne, demandant la révision des accords de défense avec la France (2ème partie) :

«AUJOURD’HUI, LES IVOIRIENS VOIENT CLAIR»

Fraternité Matin - 5/10/2005 4:30:51 AM (http://news.abidjan.net/h/128292.html)


(...) Les liaisons dangereuses de Chirac avec l’Afrique constituent une manne financière pour la Françafrique. Sinon, comment expliquer que, sur le trajet aérien Paris-New York qui représente environ la même distance que le trajet Paris-Abidjan, Air France pratique un tarif cinq fois inférieur sur New-York que sur Abidjan ? On comprend mieux pourquoi Air France fait 60% de ses marges bénéficiaires sur les lignes africaines. On ne revient pas sur la manne financière que offrent pour la France les comptes d’opérations, ni sur les multiples monopoles de secteurs stratégiques que les entreprises françaises détiennent en Côte d’Ivoire. Les médias ont déjà suffisamment relevé les cas de France Télécom pour les télécommunications, le groupe Saur pour l’eau et l’électricité, Bolloré pour le transport maritime et ferroviaire, Air France pour le transport aérien (même ivoire appartient à Air France), Delmas pour le transport maritime, Total pour la Raffinerie, et bien d’autres. Et le schéma est le même dans toutes les ex-colonies. Bien entendu, il ne s’agit pas de faire partir le monopole absolu de la France pour le remplacer par un autre monopole de marchés captifs, d’ailleurs plus aucun pays ne peut avoir en Côte d’Ivoire la position prépondérante de la France qui émane de plusieurs siècles de relations en tout genre, mais il est simplement question de prendre en considération la légitime revendication de la Côte d’Ivoire qui veut être traitée selon les mêmes règles qui régissent le commerce mondial et les relations entre États modernes dans ce siècle de la mondialisation. La Côte d’Ivoire est une poule aux œufs d’or que Chirac ne veut lâcher pour rien au monde, quel qu’en soit le prix, non seulement à cause des rentes de situations, mais aussi à cause des enjeux politiques et diplomatiques.
Depuis que Bandung a initié la prise de parole des pays économiquement faibles, le pré-carré français est devenu un levier pour la diplomatie de la France. Certes, le jeu des alliances et la convergence momentanée d’intérêts peut conduire tel ou tel pays africain à adopter la même position que la France dans les instances internationales. Ceci ne souffre aucune contestation. Mais, lorsque cela devient presque une obligation, on se demande s’il s’agit d’un Etat indépendant ? Le choix par un pays africain d’une autre position que celle de la France devient pour cet Etat une source d’ennui, parce que la France aura considéré que ce pays fait acte d’infidélité. Alors, on est en présence d’une relation de force qu’il faut dénoncer avec vigueur. Le temps où la Côte d’Ivoire passait par la France pour prendre des instructions avant d’arriver aux État-Unis est révolu. Et le temps pour le retour d’une mission à Moscou nécessitait une escale à Paris pour faire le compte rendu est aussi dépassé.
Dans notre société mondialisée, la France elle-même cherche à lutter par tous les moyens contre ce qu’elle qualifie d’hégémonie de l’Amérique. Le but étant de faire connaître la voix de la France, la voix de l’Europe. Une Europe que Chirac cherche tant à unifier et à agrandir.
Parallèlement à cette volonté de se démarquer de l’Amérique, Chirac met en œuvre ses instruments de destruction pour casser la cohésion des organisations sous-régionales et régionales comme la CEDEAO et l’UA, en montant les pays les uns contre les autres. On a encore à l’esprit le comportement honteux des Chefs d’État d’Afrique francophone essentiellement, dans les discussions sur la crise ivoirienne. Sur les quinze États de la CEDEAO, aucun Chef d’État, n’a eu le courage, ni même la dignité, non pas de condamner la France, de peur de représailles, mais seulement de déplorer et de compatir avec le peuple frère ivoirien, lorsque Chirac a mobilisé son armée de légionnaires professionnels pour massacrer les jeunes patriotes ivoiriens qui manifestaient les mains nues face à des chars français du 6 au 9 novembre 2004 devant l’hôtel Ivoire.
Ces derniers jours au Togo, c’est un scénario similaire un peu nuancé que Chirac a mis en œuvre. Après avoir instruit le clan Gnassingbé sur la solution du coup d’Etat pour conserver le pouvoir, d’ailleurs, curieusement, aucune institution n’a demandé que les coupables soient traduits en justice après qu’ils ont partiellement renoncé à leur forfaiture, Chirac, fort de son expérience de déconfiture en Côte d’Ivoire, a mis la CEDEAO en première ligne, ou plutôt le Président de cette Institution, tellement les autres Chefs d’État ont été silencieux sur la crise togolaise. Alors que le ministre de l’Intérieur du Togo, présent sur le terrain, organisateur principal des élections, fidèle du Général Eyadéma, chef d’escadron de gendarmerie, juriste sortie de Saint-Cyr, annonce sur les ondes à deux heures du matin, après avoir réveillé et convaincu les ambassadeurs occidentaux d’être présents à sa conférence de presse, que les conditions sont réunies pour une explosion sociale, si l’on maintenait les élections, on entend le président de la CEDEAO rétorquer qu’il s’agit d’une sortie personnelle et irresponsable qui n’est pas de nature à remettre à plus tard les premières élections présidentielles d’après l’ère terrible de Gnassingbé père. L’écho de Chirac n’a pas tardé pour soutenir la position du Président de la CEDEAO. Alors que l’on voit sur les écrans de télévision du monde entier, les soudards à la solde du clan Gnassingbé, courir dans les centres de vote réputés favorables à l’opposition, avec sous les bras les urnes remplies de bulletins de vote et la kalachnikov en bandoulière, la CEDEAO annonce fièrement, soutenue par le Quai d’Orsay, que les élections qu’elle a supervisées avec 150 observateurs pour 5300 bureaux se sont déroulées normalement. La normalité de Chirac est redéfinie sous les tropiques. Si les militaires se sont comportés ainsi sans hésitation sous les objectifs des médias occidentaux, car sachant que c’est sans conséquence pour eux, qu’en a-t-il été dans les zones de l’intérieur du pays non couvertes par les médias ? Si la répression militaire qui a conduit à plus d’une centaine de morts dans la capitale, n’a fait l’objet d’aucune condamnation, ni par la CEDEAO ni par la France, on ne peut plus ne pas comprendre que le seul intérêt de Chirac et sa clique est de maintenir la Famille Gnassingbé au pouvoir, quelque puisse être le moyen utilisé, et le prix à payer par le peuple togolais. On tente un coup d’Etat, si ça ne marche pas, ce n’est pas grave. On demande au putschiste d’être candidat à une élection dont ils connaissent déjà les résultats à l’avance. C’est plus sûr. Si l’opposition veut contester, on mate brutalement, à coups de kalachnikov. Quelques jours de désordre et tout le monde se calmera, avec le silence complice de l’Union africaine dont le Président de la Commission semble avoir été rappelé à l’ordre par Paris, après sa sortie d’après coup d’État. La CEDEAO reprend du service pour exhorter la population à accepter les résultats définitifs qui seront prononcés par la Cour constitutionnelle, celle-là même qui avait déjà fait prêter serment au putschiste après le coup d’État. Quelle bouffonnerie ! Chirac à vraiment raison. Il connaît bien la psychologie et l’âme de l’Afrique de l’Ouest. C’est pourquoi depuis l’OCAM, ancêtre de l’OUA et de l’UA, la CEDEAO est véritablement un instrument de la politique française, particulièrement en Afrique francophone. Maintenant que les jeux semblent être faits, des observateurs de la CEDEAO sortent de l’ombre, à titre individuel pour dénoncer ce qu’ils ont observé lors du scrutin. Mieux vaut tard que jamais. Mais tout de même. Ils auraient pu s’exprimer plus tôt. Cela aurait peut-être fait réfléchir la CEDEAO avant de s’empresser à valider les élections présidentielles togolaises.
Quand les pays africains anglophones organisent des élections, les choses se passent presque normalement. Cela a été le cas pour le Nigeria et le Ghana récemment, en Afrique de l’Ouest. Même au Zimbabwe, où Robert Mugabe est la cible des Occidentaux, Tony Blair, Premier ministre de l’ancienne puissance coloniale du Zimbabwe, n’a pas armé l’opposition pour conduire le pays à la guerre. Cette pratique demeure le monopole de la France. Est-ce ça l’exception culturelle ?
Mais, comme dans Astérix, il y a en Afrique de l’Ouest un pays dont Chirac semble méconnaître parfaitement la psychologie et l’âme. C’est naturellement la Côte d’Ivoire. Le coup d’État militaire du 19 septembre 2002 à Abidjan a échoué. Le coup d’État constitutionnel de Pierre Mazeau en janvier 2003 à Marcoussis a échoué. La rébellion sur trois ans a échoué. Le coup d’État militaire de l’armée française en première ligne en novembre 2004 a échoué. La CEDEAO a échoué. L’Union africaine a échoué. Il a fallu tout le doigté du Président Thabo Mbéki, Président du plus grand pays d’Afrique qui a produit le plus grand homme d’État de notre monde contemporain, Nelson Mandela, pour connaître des avancées notables dans la résolution de la crise ivoirienne. Même si aujourd’hui l’Union africaine tire la couverture à elle, c’est avant tout une victoire personnelle du Président d’Afrique du Sud. Ce qui porte à croire que, ce n’est ni une question de psychologie, ni une question d’âme, mais simplement une question de neutralité et d’impartialité, alliées à un objectif clair et sans ambiguïté qui a conduit en peu de temps au résultat que l’on connaît. Alassane Dramane Ouattara est candidat à la présidence de la République de Côte d’Ivoire. Un vieux rêve, réalisé au prix d’une atroce guerre ! Les électeurs sauront apprécier le 30 octobre 2005 dans le secret des urnes.


Et maintenant qu’ADO est candidat…

Maintenant que Ouattara est candidat, la grande question qui se pose est de savoir quelle potion indigeste Chirac concocte encore au peuple ivoirien et à son Président, pour la suite des événements en Côte d’Ivoire. Personne ne saurait penser qu’après avoir mis autant de ressources et d’énergie dans la guerre de la France contre la Côte d’Ivoire, après s’être personnellement impliqué dans la mise en œuvre de cette crise et après avoir publiquement fait comprendre que l’objectif qu’il poursuit est de remplacer le Président Gbagbo par quelqu’un de plus docile, Chirac se contentera d’une simple candidature de son poulain ADO. Chirac ne s’arrêtera pas en si bon chemin, après avoir réussi à arracher l’éligibilité de son protégé, à défaut de pouvoir l’imposer comme Chef d’État par les armes. D’ailleurs, les Ivoiriens peuvent s’estimer heureux qu’on n’ait pas exigé de Gbagbo qu’il nomme ADO président de la République grâce au pouvoir de l’article 48. On aurait plus été à ça près !
Si la décision du Président Gbagbo de permettre à ADO d’être exceptionnellement candidat à l’élection présidentielle d’octobre 2005 suscite un grand espoir de résolution de la crise, car ouvrant la voie au point focal que constitue le désarmement des rebelles, la vigilance des patriotes doit être décuplée, car, les mois à venir constituant les dernières étapes avant que Chirac et son protégé ne se rendent compte de l’impossibilité d’atteindre leur objectif de mettre ADO à la tête de la Côte d’Ivoire par la voie des urnes, c’est le moment pour la Françafrique de mettre en œuvre le plan B, celle de la politique de la terre brûlée qui servira une fois de plus à prétexter que sans la France, les Africains ne parlent que le langage de la guerre civile et des conflits ethniques. La Côte d’Ivoire entre donc dans la période de tous les dangers, parce que l’heure de vérité approche. Les manœuvres diplomatiques, politiques, voire militaires vont s’intensifier. C’est le moment de relancer la machine de communication qui a tant mis en déroute Chirac et ses légionnaires professionnels en novembre 2004, et de mobiliser l’attention des populations africaines et du monde sur la période électorale en Côte d’Ivoire. Se replier et gérer sa petite affaire dans les frontières du pays, intra muros, constitue le plus grand danger pour la Côte d’Ivoire. Il faut mobiliser l’intérêt du monde et mettre les projecteurs sur la Côte d’Ivoire pour que le monde entier sache ce que Chirac trame en Côte d’Ivoire. Si la communauté internationale, plus précisément les dirigeants veulent jouer aux sourds, muets et aveugles, leurs populations ne sont plus prêtes à accepter des pratiques inhumaines et antidémocratiques que pratique Chirac en Afrique.
La communication ivoirienne gagnerait à être orientée vers la société civile dans les pays occidentaux, afin de susciter un intérêt similaire à celui qui avait été manifesté au syndicat Solidarnosc Pologne. Il serait bien indiqué que la Côte d’Ivoire ouvre ses portes à tous les ressortissants occidentaux qui luttent tous les jours contre l’arbitraire. On a bien vu des gens parcourir des milliers de kilomètres pour aller en Irak, y compris des Africains, pour servir de bouclier humain lors de la première guerre du Golfe. L’opinion occidentale, à qui on a toujours caché ce qui se passe en Afrique, est prête à peser de son influence pour lutter contre les injustices, où qu’elles se déroulent dans le monde. Pour peu que l’information lui soit portée.
Cette lutte, aussi acharnée qu’elle puisse être, ne concerne que les faits actuels, la guerre et les élections. Mais les effets de ces sacrifices ne seront durablement positifs que si la Côte d’Ivoire affronte les causes fondamentales de la guerre, c’est-à-dire les intérêts économiques qui sont protégés par les accords de coopération.
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