Qu'est-ce qui fait croître le tissu adipeux?
Côté, Jacinthe
Collaboration spéciale
Le problème du surplus énergétique est devenu un sujet de préoccupation mondial.
Il est le résultat d'une consommation alimentaire excessive jumelée à un manque d'exercices physiques et il entraîne la prise de poids et une foule de problèmes de santé (diabète, hypertension, maladies cardiovasculaires, etc.).
Savez-vous comment s'accumule l'excédent d'énergie dans le corps? Sous forme de tissus adipeux. La formation de ce tissu est un processus complexe que les chercheurs étudient intensivement pour mieux le comprendre. C'est essentiel, car pour maîtriser la bête, il est important de la connaître!
Du côté nutritionnel, on se rend compte que certains nutriments viennent influencer ce processus nommé lipogenèse d'une autre manière que par leur apport énergétique propre. Ces nouvelles données vont peut-être nous amener à redéfinir notre façon de manger.
Comment se convertit l'énergie?
Pris en excès, tous les macronutriments (glucides, protéines ou matières grasses) ingérés sont convertis en tissus adipeux.
La consommation et la digestion d'aliments riches en glucides (produits céréaliers, légumineuses, fruit, légumes) génèrent du glucose. S'il n'est pas tout utilisé immédiatement pour équilibrer le taux de glucose sanguin ou pour donner de l'énergie aux muscles, le glucose en circulation dans le sang est transformé en glycogène, un composé semblable à l'amidon que l'on trouve dans les féculents.
Le glycogène peut être stocké dans le foie et les muscles. Cette capacité d'entreposage est toutefois limitée à 100 g pour le foie et à 375 g pour les muscles et sert aux périodes de jeûne d'environ huit heures (la durée d'une nuit). Quand ces limites de stockage sont atteintes, les surplus de glucose sont transformés en triglycérides et entreposés dans les tissus adipeux.
La consommation et la digestion d'aliments riches en protéines (viande, poisson, volaille, oeufs, produits laitiers) produit des acides aminés. Ces nutriments servent à la production de protéines, ainsi qu'à la construction et à la réparation des tissus.
Contrairement au glucose, le surplus d'acides aminés n'est pas transformé et entreposé sous forme de protéines. Le surplus est plutôt converti en glucose et en triglycérides et stocké dans les muscles, le foie et les tissus adipeux.
La consommation et la digestion d'aliments riches en matières grasses (beurre, huile, shortening et produits à base de ces ingrédients, gras animal) génèrent des acides gras. L'excédent d'acides gras en circulation dans le sang est entreposé dans les tissus adipeux sous forme de triglycérides (un type de gras). Contrairement au foie et aux muscles qui reçoivent le glycogène, la capacité d'entreposage des tissus adipeux est illimitée.
La genèse du tissu adipeux
Le tissu adipeux est formé de cellules adipeuses, qu'on appelle aussi adipocytes.
C'est l'organe qui gère les réserves énergétiques à long terme. Il décide du moment où il faut stocker de l'énergie en produisant des triglycérides (lipogenèse) et choisit quand s'en servir comme source d'énergie (lipolyse).
Dans le cas d'un surplus énergétique, la croissance du tissu adipeux s'opère au début par l'accroissement du volume des cellules adipeuses. Cette hypertrophie des adipocytes peut être renversée par la perte de poids.
Par contre, quand la capacité d'emmagasinage des adipocytes est surpassée, la croissance du tissu adipeux se poursuit, mais autrement. Il croît en augmentant son nombre de cellules adipeuses.
Dès qu'elles sont formées, ces cellules demeurent présentes dans l'organisme pour toujours. Malgré la perte de poids qui favorise la réduction du volume des adipocytes, leur nombre persiste, ce qui favorise plus tard la reprise de poids.
L'influence du gras alimentaire
Au cours des dernières années, notre alimentation est devenue plus riche en gras oméga-6 (huiles de maïs, de coton, de tournesol, de soja) au dépend des gras oméga-3 à longue chaîne (poisson et huile de poisson). Cela favoriserait l'accumulation d'acide arachidonique dans notre organisme. Généralement, notre corps utilise ce type d'acide gras pour fabriquer des eicosanoïdes.
Cette famille de composés regroupe les prostaglandines, les thromboxanes, les leukotriènes et les prostaclyclines. Agissant comme des hormones, certains types de prostaclyclines joueraient un rôle dans l'augmentation du nombre d'adipocytes et donc dans l'accroissement du tissu adipeux.
En effet, plusieurs études tendent à démontrer que la prostacycline PGI2 favorise le développement des cellules adipeuses. Elle initierait la conversion des cellules pré-adipeuses (immatures) en cellules adipeuses (matures et capables d'accumuler du gras).
Ainsi, ce n'est pas seulement notre surplus énergétique qui favoriserait le développement des tissus adipeux et la prise de poids. Un déséquilibre quant à la consommation des différents types de gras jouerait également un rôle.
Un apport alimentaire en gras oméga-3 suffisant, comblé en mangeant du poisson trois fois par semaine, pourrait aider à maîtriser la prise de poids, en plus de contribuer à réduire les risques de maladies cardiovasculaires, de dépression, de démence, de maladies inflammatoires, etc.
L'auteure de cette chronique hebdomadaire est membre de l'Ordre professionnel des diététistes du Québec.
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