Le quiz des mauvais exemples
Girard, Michel
En matière de finances personnelles, plein de gens de mauvaise volonté veulent notre bien. C'est pourquoi il faut toujours se garder une petite dose de méfiance envers tous ceux qui vivent aux crochets de nos finances. Question de se remémorer quelques mauvais exemples, je vous propose un petit quiz de fin d'année.
Qui mérite le titre de magouilleur financier de l'année?
Vincent Lacroix. Non seulement a-t-il vraisemblablement réussi à piquer des dizaines de millions à 9200 petits investisseurs, mais en plus, il est tellement ratoureux qu'il a même réussi à se voler 500 000 $ sur le million qu'il avait lui-même investi dans Norbourg! M. Lacroix avait tout de même des concurrents: pensons aux dirigeants de Norshield, de Mount Real et de Portus.
Parmi les ministres du gouvernement de Jean Charest, qui est le plus grand cachottier?
Le ministre des Finances, Michel Audet. D'un coup de calculette magique, il a réussi à réduire de 2,1 milliards de dollars le véritable déficit de l'année 2004-2005, pour le ramener à seulement 664 millions. Mais M. Audet, le petit malin, vient de se faire poigner par le Vérificateur du Québec pour avoir joué avec les vrais chiffres. Essayez maintenant de faire croire à vos enfants qu'il est important de savoir calculer!
Dans le gouvernement Martin, qui est le champion de l'incohérence?
Le ministre des Finances, Ralph Goodale. En septembre, il lève un moratoire pour étudier la possibilité d'aller chercher 300 millions de dollars d'impôts dans les fiducies de revenu. Trois mois plus tard, il renonce à ces 300 millions et donne plutôt un cadeau de 300 millions en réduction d'impôt aux gens qui reçoivent des revenus de dividendes. Finalement, il a réussi à faire perdre 600 millions au gouvernement fédéral. Remarquez bien qu'avec les milliards de surplus qu'il engrange chaque année sur le dos des contribuables, le ministre Goodale n'en est pas à 600 millions près!
Quel est le chef d'entreprise qui soigne le mieux son portefeuille personnel?
Robert Milton, le grand patron d'Air Canada (Gestion Ace Aviation). Dans le cadre de la restructuration financière d'Air Canada, il s'est fait octroyer un million d'options qui valent aujourd'hui quelque 19 millions de dollars. Il s'est ainsi enrichi après avoir arraché des concessions valant 1,3 milliard aux employés; à convaincre les créanciers d'effacer 7 milliards de dettes; et à faire perdre leurs chemises aux petits actionnaires qui ont reçu une nouvelle action de 20 $ pour chaque bloc de 11 760 anciennes actions d'Air Canada. Bravo également à la poignée de hauts dirigeants d'Air Canada qui se partagent deux millions d'options d'une valeur de 38 millions.
Qui mérite la couronne de l'aristocrate de la manchette économique?
C'est " notre " Lord Conrad Black. La SEC (la police de la Bourse américaine) le poursuit sous 10 chefs d'accusation pour fraudes et détournements de fonds de quelque 92 millions US dans Hollinger International, son ancienne multinationale. Il est passible de 70 ans de prison. Bien entendu, il nie sa culpabilité.
Qui mérite le prix " mérite " de la démission de l'année dans la haute finance?
John Hunkin, l'ex-président de la Banque CIBC qui, à la suite de l'implication de sa banque dans le scandale Enron, a réussi à faire perdre 2,6 milliards de dollars US aux actionnaires de l'institution. Les 2,6 milliards représentent le montant des dédommagements que la CIBC a accepté de verser aux victimes d'Enron. Pour son bon travail au sein de la CIBC, Hunkin s'est fait accorder 50 millions de dollars en compensation financière quand il a démissionné en juin dernier. Heureusement que du côté des grandes banques canadiennes, on peut toujours ajuster les frais bancaires en conséquence...
Qui reçoit le titre d'exploiteur de l'année?
Puisqu'il s'agit d'un secteur où la concurrence est mal vue, je le décerne ex aequo aux grands patrons des sociétés pétrolières. Il faut souligner leur grande voracité à tirer grandement profit de toutes les catastrophes naturelles qui ont frappé le pauvre monde. Tout était prétexte cette année pour multiplier sans vergogne les hausses du prix de l'essence.
Qui est le champion de la négligence?
L'équipe de direction de l'Autorité des marchés financiers du Québec qui a décidé de laisser traîner sur une tablette une télécopie du CANAFE (l'organisme fédéral chargé d'enquêter notamment sur le blanchiment d'argent) qui l'informait en avril dernier que Vincent Lacroix avait effectué des détournements de fonds. Jean St-Gelais et son équipe de direction de l'Autorité se réveillaient quatre mois plus tard et décidaient enfin de passer à l'acte en mettant fin aux activités frauduleuses de Lacroix.
La promesse financière de l'année?
On la doit au maire Gérald Tremblay qui a promis durant la campagne à la mairie de ne pas augmenter le fardeau fiscal des Montréalais et deux semaines après sa réélection, sa mémoire flanche. Il hausse les taxes! Mais, il s'excusait quelques jours plus tard et annulait sa hausse. Ouf!
Le promoteur de l'année?
La palme revient à Laurent Beaudoin et son fils Pierre, lesquels dirigent Bombardier. Chaque fois qu'une mauvaise nouvelle (pour les travailleurs du Québec) frappe la compagnie, ils réussissent par la magie de la communication à calmer les médias et à faire croire que tout va bien. Non, Bombardier ne déménagera pas au Mexique (seulement quelques petites productions). Non, Bombardier n'assemblera pas la CSeries en Chine (seulement quelques pièces). Non, Bombardier n'a pas de problèmes financiers (seulement certains secteurs en arrachent un peu). Vous voyez, tout va bien.