Bongo et la France: quarante ans de mauvais coups Par Zineb Dryef (Rue89) 12H50 27/07/2007
Mémoire
vivante de la Ve République, Omar Bongo a bien connu tous les
présidents français, de Charles de Gaulle à Nicolas Sarkozy. Le
Président du Gabon a d'ailleurs donné sa propre définition des
relations franco-africaines: "L'Afrique sans la France, c'est la
voiture sans le chauffeur. La France sans l'Afrique, c'est une voiture
sans carburant."
Le général de Gaulle reçoit Omar Bongo à l'Elysée en janvier 1968,
soit quelques semaines après l'accession au pouvoir de ce dernier. Dans
"Affaires africaines" (Fayard, 1983), Pierre Péan a levé le voile sur
une investiture largement organisée par la France. Après l'indépendance
du Gabon en 1965, Paris soutient le Président Léon M'Ba qui, à défaut
d'être un impeccable démocrate, est proche des autorités françaises. A
sa mort, en 1967, Jacques Foccart, le "Monsieur Afrique" de l'Elysée,
opte pour son directeur de cabinet, un ancien sous-officier de l'armée
française, Albert-Bernard Bongo. Quelques élections opaques plus tard,
le jeune Bongo (32 ans) devient maître du Gabon. Il fonde alors le
parti unique PDG (Parti démocratique gabonais).
(Sur la vidéo, le 5 janvier 1968.)Le président Pompidou reçoit Bongo à l'Elysée. Jacques Foccart
dessine toujours les grandes lignes de la politique africaine. En 1973,
Albert-Bernard Bongo se convertit à l'islam et devient Omar Bongo.
Cette conversion l'aide à adhérer à l'Opep en 1974.
(Sur la vidéo, le 6 juillet 1970.)Avec Valéry Giscard d'Estaing à l'Elysée, un nouveau style s'impose,
mais pas de réforme en matière de politique africaine. Giscard tient
son Foccart en la personne de René Journiac, ancien magistrat colonial.
Les prospections de pétrole d'Elf débutent sous VGE. En 1977, André
Tarallo devient PDG d'Elf Gabon: en 2005, il est condamné à sept ans de
prison et deux millions d'euros d'amende pour abus de biens sociaux au
détriment du groupe pétrolier.
(Sur la vidéo, le 28 juillet 1977.)1984: Omar Bongo est reçu en grande pompe par François Mitterrand.
En 1994, le Président gabonais qualifiera le chef d'Etat français de
"Mitterrand l'africain, le combatif et le fidèle". Venant d'Omar Bongo,
le compliment a de la saveur. Dans son ouvrage d'entretiens avec Airy
Routier, du Nouvel Obs, Bongo avait balancé ses amis français: "Giscard
n'a pas été le seul à recevoir en cadeau des plaquettes de diamants de
Bokassa: beaucoup d'autres en ont reçues, y compris des hommes
politiques français importants, qui, à l'époque, se sont fait tout
petits." Ne donnant pas de noms, Bongo s'est contenté de préciser qu'il
a aidé ses amis mais n'a, en aucun cas, "aidé tel parti contre un
autre". Pierre Péan raconte dans "Affaires africaines", sans avoir
jamais été démenti, comment Bongo a participé au financement de la
campagne du PS en 1981, histoire d'être sûr de gagner, quel que soit le
vainqueur...
(Sur la vidéo le 4 octobre 1984.)1996: Jacques Chirac se rend à Libreville. En France, l'affaire Elf
défraye la chronique politico-mondaine. Omar Bongo, dans cette
interview, répond que l'affaire est "franco-française" et qu'il
demandera des "comptes" si l'argent du Gabon a été pillé. Plus de 2
milliards de francs ont été détournés des caisse du groupe pétrolier
par ses dirigeants à la fin des années 80. Nerf de la guerre de toutes
les transactions occultes, la Fiba (French International Bank of
Africa) appartenait à Elf, à la famille Bongo et à l'Etat congolais.
(Sur la vidéo, le 16 juillet 1996.)http://www.rue89.com/2007/07/27/bongo-et-la-france-quarante-ans-de-mauvais-coups