Israël n'a toujours pas reconnu le génocide arménien, ce que regrette notamment
le député israélien Yossi Sarid dans un article paru dans Ha'Aretz, et traduit
dans le Courrier international n°755 de la semaine passée (du 21 au 27 avril
2005). JR
« Le 24 avril, la république d'Arménie organise à Erevan une conférence
internationale dédiée à la mémoire du million d'Arméniens assassinés par les
Turcs. Ce mois d'avril est également marqué par la parution en hébreu du
terrifiant ouvrage de l'historien Yaïr Auron, La banalité de la négation :
Israël et le génocide arménien. Israël n'a jamais reconnu le génocide arménien.
Et, ce faisant, il a prêté main forte à ceux qui nient le génocide. Notre
attitude officielle a toujours oscillé entre l'ambiguïté et le déni, entre « Il
n'est pas certain que l'on puisse parler de génocide » et « C'est une question
qu'il faut laisser aux historiens », deux phrases jadis prononcées par un Shimon
Perès imbécile et insultant. L'attitude d'Israël répond à deux enjeux. Le
premier, c'est l'importance de conserver de bonnes relations avec une Turquie
qui persiste à nier toute responsabilité dans le génocide arménien et exerce de
fortes pressions à l'étranger pour ne pas avoir à assumer son passé. Le second
enjeu, c'est que la reconnaissance du génocide subi par un autre peuple
risquerait d'entamer l'unicité de la Shoah.
Lors des célébrations du 85ème anniversaire du génocide arménien, j'avais été
invité, en tant que ministre israélien de l'Education, par le patriarcat
arménien dans la vieille ville de Jérusalem. A cette occasion, j'avais déclaré :
« Nous, Juifs, principales victimes de la haine meurtrière, devons être
doublement sensibles et nous identifier aux autres victimes. Ceux qui tournent
le dos, regardent ailleurs ou se taisent ne font en définitive qu'aider les
assassins, pas leurs victimes. Dans notre nouveau programme scolaire, un
chapitre central sera consacré aux génocides et il y sera fait explicitement
référence au génocide arménien. C'est notre devoir envers vous et envers
nous-mêmes. »
Partout dans le monde, la communauté arménienne avait accueilli mon discours
avec satisfaction. La Turquie, quant à elle, s'était plainte violemment et avait
exigé des explications du gouvernement israélien. Et MON gouvernement, le
gouvernement d'Ehoud Barak, avait bredouillé de vagues excuses avant de décliner
toute responsabilité dans des propos qui, à l'entendre, n'engageraient que moi.
Et, aujourd'hui, les programmes scolaires israéliens sont à nouveau épurés de
toute référence au génocide arménien. »