Droits de l'homme : le Conseil de l'Europe épingle Paris
Pour le commissaire aux droits de l'homme du Conseil, Alvaro la justice française souffre d'«un manque criant de moyens».
(Photo AFP)
(Avec AFP)
[12 février 2006]
Dans un rapport très critique, le commissaire Alvaro Gil-Robles pointe notamment du doigt les failles du système judiciaire français.
Surpopulation carcérale, manque de moyens «criants» de la justice, restrictions des droits des étrangers, «sentiment d'impunité» des policiers: la situation des droits de l'homme en France fait l'objet d'un rapport très critique du Conseil de l'Europe qui sera publié mercredi. Pour le commissaire aux droits de l'homme du Conseil, Alvaro Gil-Robles, «il semble ainsi exister dans certains domaines un fossé qui peut s'avérer très large entre ce qu'annoncent les textes et la pratique», selon ce rapport.
«Difficultés persistantes»
«La France ne se donne pas toujours les moyens suffisants pour mettre en oeuvre un arsenal juridique relativement complet, qui offre un haut niveau de protection en matière de droits de l'homme», souligne-t-il dans ce document assorti d'une cinquantaine de recommandations, résultat de sa visite en France en septembre 2005. La France, souvent considérée comme la patrie des droits de l'homme, «n'en reste pas moins traversée par des difficultés persistantes, voire récurrentes, ainsi que l'illustre le nombre d'affaires portées devant la Cour européenne des droits de l'homme», constate-t-il. Il s'inquiète de la diminution du financement public des ONG, estimant que c'est «tout un pan de l'action en faveur de la lutte pour le respect des droits de l'homme qui s'en trouve remis en question».
«Durcissement des politiques d'immigration»
M. Gil-Robles s'alarme également du «durcissement des politiques d'immigration» qui «risque de contrevenir aux droits des véritables demandeurs d'asile». Il critique les nombreux obstacles entravant les démarches de régularisation des étrangers, en particulier le recours obligatoire à la langue française pour les formulaires, voire même leur impossibilité à faire valoir leurs droits.
Il cite le cas de deux Congolais, jamais débarqués du navire par lequel ils étaient arrivés, et qui se sont grièvement blessés en sautant par le hublot.
Surpopulation carcérale
Concernant la justice, confrontée à «un manque criant de moyens», le rapport appelle à un élargissement du rôle de l'avocat en garde à vue, dont la présence est plus «formelle qu'active» et exprime de «fortes réserves» sur son absence jusqu'à la 72ème heure, notamment pour les affaires de terrorisme. Sur les prisons, M. Gil-Robles dresse «un douloureux constat» en raison d'une «surpopulation chronique» qui «prive un grand nombre de détenus de l'exercice de leurs droits élémentaires» et juge «tout à fait excessive» la durée du placement au «mitard» (jusqu'à 45 jours).