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 L’ONU ravale sa façade:nouveau Conseil des droits de l'Homme

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Tite Prout
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Tite Prout


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L’ONU ravale sa façade:nouveau Conseil des droits de l'Homme Empty
19052006
MessageL’ONU ravale sa façade:nouveau Conseil des droits de l'Homme

L’ONU ravale sa façade
- 14 mai 2006 - par CKEIKH YÉRIM SECK

Le Conseil des droits de l’homme remplace la Commission du même nom, qui avait sombré dans le ridicule. Certains veulent croire à une renaissance, d’autres dénoncent une « farce ».

Un sentiment de soulagement mêlé d’appréhension a accueilli la désignation, le 9 mai à New York, des quarante-sept premiers pays membres du tout nouveau Conseil des droits de l’homme de l’ONU. L’organisme affiche une grande ambition : redorer un blason onusien passablement terni par les errements de la très décriée Commission des droits de l’homme, qu’il est aujourd’hui chargé de remplacer. Au fil des années, celle-ci avait en effet cessé d’être un instrument de protection des libertés fondamentales pour devenir un « machin » manipulé par les États. Créée en 1946, elle s’était d’abord illustrée par l’élaboration de la Déclaration universelle des droits de l’homme, mais sa politisation excessive et le rôle décisif des solidarités régionales dans la désignation de ses membres ont peu à peu entamé son crédit. À preuve, des États aussi peu démocratiques que la Libye, le Soudan, Cuba, l’Iran ou la Birmanie y siégeaient.

Élus à bulletins secrets et à la majorité simple par au moins 96 pays (sur les 191 que compte l’Assemblée générale) - un mode de désignation théoriquement plus fiable que la cooptation par les groupes régionaux qui prévalait dans la défunte Commission -, les 47 États membres du Conseil (8 latino-américains, 13 africains, 6 européens de l’Est, 13 asiatiques, 7 européens de l’Ouest et autres) disposent d’un mandat de trois ans renouvelable une fois. Ils ont pour tâche de répondre dans l’urgence à des situations de crise mettant en péril les droits de l’homme, d’évaluer périodiquement le respect des libertés fondamentales dans chaque pays membre de l’ONU, mais également de « s’auto-examiner » afin de démontrer qu’ils restent exemplaires. D’autant que l’Assemblée générale a le pouvoir de suspendre, par un vote à la majorité des deux tiers, un membre du Conseil qui aurait violé les libertés fondamentales.

Le Conseil a le pouvoir de s’autosaisir en cas de violation flagrante des droits de l’homme dans tel ou tel pays. Il peut également être saisi par le Commissariat des Nations unies pour les droits de l’homme, par l’Assemblée générale, par certains experts préalablement désignés et par les associations de défense. Les idéaux et objectifs de la nouvelle structure ont été définis par la résolution onusienne du 15 mars dernier : « promouvoir le respect universel et la défense de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales, pour tous, sans aucune sorte de distinction et en toute justice et équité ». Vaste programme !

On comprend, dans ces conditions, que les organisations de défense se soient empressées de dénoncer la présence au sein du Conseil de pays qui, à les en croire, n’y ont en aucun cas leur place : l’Arabie saoudite, l’Azerbaïdjan, la Chine, Cuba, le Pakistan et la Russie. Mais bien d’autres États suscitent également leurs réserves, quoique de manière plus nuancée, pour avoir dans le passé pris quelques libertés avec les droits de l’homme. « Dix pays qui violent massivement les droits des journalistes et la liberté d’expression ont été choisis pour garantir la protection des droits de l’homme dans le monde : c’est scandaleux et laisse présager du pire », s’indigne, par exemple, Reporters sans frontières.

Mais c’est le propre d’une élection de ce type d’être soumise à d’autres critères : la capacité d’un État à faire du lobbying, son entregent dans la communauté internationale, son aptitude à se faire parrainer par des poids lourds de la politique mondiale, membres permanents du Conseil de sécurité par exemple… Le mode de scrutin majoritaire simple ne peut en outre que favoriser des pays qui, comme la Chine ou la Russie, disposent d’un vaste réseau d’influence.

Reste que les États notoirement les moins respectueux des droits humains - ceux-là mêmes qui avaient paralysé la défunte Commission en s’opposant systématiquement à tout vote-sanction - n’ont pas osé se porter candidats. Sans doute pour s’épargner le ridicule d’un score indigent. Exit, donc, le Soudan, la Libye, le Zimbabwe, le Belarus, la Birmanie, la Corée du Nord, le Turkménistan, le Vietnam, l’Ouzbékistan ou la Colombie. Personne ne les regrettera.

Sur les 53 États que compte l’Afrique, 14 ont fait acte de candidature : l’Afrique du Sud, l’Algérie, le Cameroun, Djibouti, le Gabon, le Ghana, le Kenya, le Mali, Maurice, le Maroc, le Nigeria, le Sénégal, la Tunisie et la Zambie. Seul le Kenya a été éliminé, alors qu’il a connu, en décembre 2002, une exemplaire transition par les urnes et qu’il fait assurément beaucoup mieux, en matière de démocratie, que nombre des heureux élus. Si certains membres africains jouissent d’une indiscutable crédibilité en matière de droits de l’homme (Ghana, Mali, Maurice, etc.), un pays comme le Nigeria, par exemple, suscite forcément des réserves : il est régulièrement le théâtre de conflits interethniques, et des femmes reconnues coupables d’adultère y ont été condamnées à la lapidation, même si leurs peines n’ont pas été exécutées.

Dans le groupe des pays occidentaux, la France, mère de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (1789), a été adoubée avec 150 voix, derrière l’Allemagne mais devant le Royaume-Uni, la Suisse, les Pays-Bas, la Finlande et le Canada. Preuve que la compétition a été plus serrée dans cette partie du monde : les candidatures de démocraties indiscutables comme le Portugal, l’Espagne et la Grèce n’ont pas été retenues.

Les États-Unis, qui, le 15 mars, avaient voté contre la résolution réglementant le Conseil, se tiennent à l’écart, mais ils ont promis de ne rien faire pour en bloquer le fonctionnement. Ils attendent de voir, avant, le cas échéant, de prendre le train en marche. « Le premier test, a déclaré Kristen Silverberg, chargé des organisations internationales au département d’État, ce sera la capacité du Conseil à réagir efficacement aux graves violations des droits de l’homme perpétrées au Darfour, en Birmanie, en Corée du Nord et ailleurs. »

Mais la position des responsables américains est loin d’être homogène, ce qui ne laisse pas d’être inquiétant pour la suite. Membre républicain de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants, Ileana Ros-Lehtinen n’y va pas, par exemple, de main morte : « Le nouvel habillage par l’ONU de son organisme chargé des droits de l’homme, prétendument nouveau et amélioré, relève de la farce. »

La séance inaugurale aura lieu le 19 juin, à Genève. Une certitude, le Conseil ne chômera pas : il tiendra trois sessions annuelles (compte non tenu des réunions d’urgence) et siégera au moins dix semaines par an, contre une seule réunion annuelle de six semaines pour la défunte Commission.

http://www.jeuneafrique.com/jeune_afrique/article_jeune_afrique.asp?art_cle=LIN14056lonuredaafa0
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