Comment la Chine pille l'Afrique
Avec France Inter, la chronique de Bernard Maris, journaliste et écrivain.
Rien n'est plus incontestable que la présence croissante de la Chine en
Afrique. Le stock d'investissement chinois est de l'ordre de 6 à 7
milliards de dollars par an, ce qui, à l'échelle du revenu africain,
est important. Les Chinois exportent comme partout ailleurs leurs
produits manufacturés, et importent des matières premières, du pétrole,
du fer, des bois tropicaux (le tiers du bois tropical transformé en
Chine vient d'Afrique) des diamants etc.
Les entreprises chinoises captent
beaucoup d'appels d'offres en matière de travaux publics. Elles sont
très compétitives Pour deux raisons
D'abord, les Chinois soutiennent systématiquement les
Etats, sans leur imposer en contre partie, quoi que ce soit ;
contrairement à ce que faisaient les Européens, les Américains et le
FMI, avec leurs plans d'ajustement structurel issus du « consensus de
Washington ». Ce « consensus de Washington» obligeait, je le rappelle à
des comportements libéraux: discipline budgétaire, baisse de la dépense
publique, libéralisation financière, libéralisation des échanges,
élimination des barrières à l'investissement direct étranger,
privatisation des entreprises publiques etc. En clair, les Chinois font
des affaires, sans aucune à priori ideologiqu et, du coup, soutiennent
systématiquement les Etats en place.
Ensuite, les entreprises chinoises
sont compétitives parce qu'elles ne respectent ni l'environnement, ni
le social. Elle arrivent clefs en mains en Afrique, embauchent peu ou
pas, et ne favorisent pas d'activité locale. De sorte que s'il existe
un début d'intégration de l'économie africaine dans l'économie
asiatique, c'est toujours de la même manière : l'Afrique fournit la
matière première, laquelle bénéficie à une nouvelle puissance.
Impossible de comparer ces investissements chinois en
Afrique avec les délocalisations européennes en Chine. Si EADS
s'installe en Chine pour y produire les Airbus que va acheter l'Etat
chinois, une grande part du bénéfice technologique sera pour le pays
d'acceuil.
Dans le commerce trilatéral entre la Chine, le Nord et l'Afrique, c'est celle-ci qui est encore perdante.
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Retrouvez « L'autre économie » de Bernard Maris, en direct sur France Inter, du lundi au vendredi à 6h49.