Mon soutien à Eunice Barber Par Claude Ribbe,
mardi 25 novembre 2008 à 14:18 :: General
Mon
amie Eunice Barber m’a appelé hier pour me dire qu’elle comparaissait
mercredi 26 novembre à 9 heures du matin devant le tribunal
correctionnel de Bobigny pour outrage à agent de la force publique et
rebellion. Cela m’a un peu étonné car j’avais le souvenir que c’était
Eunice Barber la victime et non pas la coupable.
Eunice Barber est née il y a tout juste 34 ans en Sierra Leone. Elle
est championne olympique (heptathlon et saut en longueur). À l’âge de
dix-huit ans, elle est venue vivre et s’entraîner en France. La
nationalité lui a été accordée en 1999. Sept ans plus tard, sa vie a
basculé. C’était le samedi 18 mars 2006 à Saint-Denis. Eunice se
rendait chez le coiffeur en voiture. En face, un barrage de police.
Ensuite, deux versions. Celle des policiers : Eunice Barber est une
dangereuse furie qui les a agressés. Elle aurait mordu l’un d’entre
eux. Pourquoi les aurait-elle agressés ? Mystère. Pourquoi les
aurait-elle mordus ? Sûrement pas pour essayer de défendre sa vie face
à des violences policières racistes, mais parce que c’est une
"négresse", voyons ! Chacun sait que les "négresses" mordent, comme les
animaux. Eunice Barber serait un animal féroce.
Eunice Barber soutient, elle, que les policiers l’ont sans raison tirée
de sa voiture et molestée, piétinée, giflée, tirée par les cheveux, à
cause de la couleur de sa peau. « Tu as de la chance qu’il y ait du
monde, sinon on pourrait te faire pire ! » lui auraient-ils lancé, même
après avoir reconnu sa qualité d’athlète.
Je connais Eunice. C’est une jeune femme très calme et très posée. J’ai
eu l’occasion de la rencontrer par un ami guadeloupéen, Molière
Athalys, qui lui donne des cours de chant classique, ce qui montre
qu’elle ne s’intéresse pas qu’à l’athlétisme. Peu de temps après
l’incident, nous nous sommes vus. Ses poignets étaient tailladés par la
trace des menottes des policiers, ce qui m’a fait frémir d’horreur. Oui
tailladés, je suis témoin. Eunice était traumatisée à jamais. Elle m’a
dit : « Ce jour-là, j’ai appris par la police que j’étais « notre ».
Avant, je ne m’étais jamais posé une question pareille. » Les blessures
occasionnées par ces violences ont sérieusement compromis sa carrière
au point qu’elle n’a pu se qualifier pour les JO de Pékin. Elle a
toutefois remis les pendules à l’heure en déclarant que la France, pays
"où l'on torture des noirs et des arabes", n'a pas de "leçons à donner"
en matière de respect des droits de l’homme aux autorités chinoises. La
plainte déposée par Eunice pour les brutalités subies n’a pas été
retenue. En revanche, les policiers ont obtenu de la faire comparaître
devant le tribunal correctionnel. Et pourquoi la version des policiers
a-t-elle été suivie ? Parce qu’ils étaient neuf. Oui, neuf hommes. Plus
de 600 kg écrasant une femme, lui tordant les poignets. Fût-elle une
athlète, le jeu n’était pas égal. Comment peut-on m’expliquer qu’on
puisse traiter une femme ainsi, quoi qu’elle ait dit, quoi qu’elle ait
fait ? Comment peut-on m’expliquer qu’après une pareille scène, ce soit
elle qui comparaisse devant le tribunal ?
Qu’on juge par la vidéo de l’arrestation d’Eunice.
http://video.google.fr/videosearch?sourceid=navclient&hl=fr&ie=UTF-8&rls=HPEB,HPEB:2006-17,HPEB:fr&q=eunice%20barber&um=1&sa=N&tab=wv#
Faisons confiance à la Justice : Il y a des gens d’honneur parmi les
policiers. Parmi les magistrats aussi, bien sûr. Mais soutenons Eunice
Barber dans cette nouvelle épreuve !
Ah, j'oubliais : Molière Athalys, le professeur de chant d'Eunice, a
été un jour, lui aussi, sans raison aucune, embarqué dans un
commissariat, molesté, insulté, humilié. Voyez, que ça n'arrive pas
qu'aux athlètes...
http://www.claude-ribbe.com/dotclear/index.php?2008/11/25/99-mon-soutien-a-eunice-barber#co