On est numéro 1 ! Frida Berrigan
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On ne nous appelle pas « l’unique superpuissance » pour rien. Paul
Wolfowitz peut bien avoir à se chercher aujourd'hui un nouveau job,
n'empêche que le terme qu’il avait employé pour décrire l’omnipotence
des USA lorsqu’il n’était encore que Secrétaire Adjoint à la Défense
–hyperpuissance – est toujours aussi juste.
Il faut bien l'admettre, les USA sont une fière nation de « champions ». Nous sommes notamment :
Numéro un en matière de consommation de pétrole :
Les USA brûlent jusqu’à 20.7 millions de barils par jour, soit
l’équivalent du total cumulé la consommation pétrolière de la Chine, du
Japon, de l’Allemagne, de la Russie et de l’Inde (ensemble !).
Numéro un en matière d'émission d'oxyde de carbone :
Chaque année, tous les pollueurs de la planète recrachent quelque
24 126 416 000 tonnes de gaz carbonique (CO2) dans l'atmosphère. Les
USA et leurs territoires en produisent environ 5.8 milliard de tonnes,
loin devant la Chine (3.3 milliards), la Russie (1.4 milliards) et
l’Inde (1.2 milliards).
Numéro un en matière de dette extérieure :
Les USA cumulent à eux seuls une dette extérieure de 10 040
milliards de dollars, soit près d'un quart de la dette mondiale totale
(44 000 milliards de dollars).
Numéro un en matière de dépenses militaires :
Au cours l'année 2008, la Maison Blanche a obtenu 481 milliards de
dollars pour le budget du Département de la Défense, encore ce chiffre
exorbitant reste-t-il bien au-dessous du total des dépenses militaires
envisagées pour l’année à venir. Mais pour avoir une idée du montant
des crédits accordés à l’armée, il faut aussi faire entrer en lignes de
compte le coût de la guerre planétaire contre le terrorisme, de
l'augmentation, du renouvellement ou de la maintenance de l’arsenal
nucléaire US, et tout un tas d'autres dépenses de ce genre. L’analyste
de l’armée, Winslow Wheeler faisait récemment le calcul suivant : «
Ajoutez 142 milliards de dollars pour couvrir le coût prévu des guerres
d'Irak et d'Afghanistan ; ajoutez les 17 milliards de dollars que
coûtent les armes nucléaires au Département de l’Energie ; ajoutez
encore 5 milliards de dollars pour les diverses dépenses d’autres
services en matière de défense... et vous arrivez à un total d'environ
647 milliards de dollars pour l'année 2008 ».
En se penchant d'une manière différente sur l'utilisation des
finances publiques américaines, l’économiste Joseph Stiglitz, de
l’Université de Colombia, et Mme Linda Blimes, maître de conférences à
l'Harvard Business School, ont ajouté aux coûts connus de la guerre en
Irak, des coûts invisibles tels que son impact sur les cours mondiaux
du pétrole, ainsi que le coût à long terme des soins médicaux et
pensions accordés aux militaires blessés. Sur une telle base, leur
évaluation du coût total de la guerre se situait entre mille et 2,2
mille milliards de dollars U.S.
En petites coupures, la somme que les USA entendent allouer en
2008 à leurs dépenses militaires permettrait d'offrir à chacun des 1
milliard d'adolescents et jeunes adultes de la planète, une X-box 360
avec télécommande (l’alimentation en électricité dans des zones rurales
éloignées n’étant prise en compte), avec même deux jeux vidéos en prime
: Gears of War [Les Rouages de la Guerre] et Command and Conquer
seraient sans doute les plus appropriés, mais si nous nous engageons
réellement dans la lutte contre l’obésité, Dance Dance Revolution
serait peut-être un choix plus judicieux. En fait, les USA dépensent à
eux seuls ce que le reste du monde tout entier consacre aux dépenses
militaires.
Numéro un en matière de ventes d'armes :
Depuis 2001, les ventes américaines de matériel militaire se
situent habituellement aux alentours de 10 ou 13 milliards de dollars.
Cela représente énormément d’armes, mais dans l’année fiscale 2006 le
Pentagone a battu son propre record avec un total de contrats de ventes
d’armes de 21 milliards de dollars. Il va sans dire que ce chiffre
dépasse de loin celui de n’importe quel autre pays du monde. Cette
super médaille d’or nous offre littéralement l'assurance que tout ce
qui fait Bang au beau milieu de la nuit compte à coup sûr parmi nos
plus prestigieuses marchandises. Personne n'en produit davantage ni ne
les vend aussi efficacement que nous. En revanche, dès qu’il s’agit de
rester numéro un dans le domaine des produits manufacturés à usage
civil, les médailles d'or se font nettement plus rares. Par exemple :
Nous ne sommes pas numéro un en matière de ventes d'automobiles :
Il est bien loin le temps où Chrysler, General Motors et Ford
dominaient les marchés, tant aux USA qu'à l’étranger, fixant les normes
de l’industrie d’automobile. En 2006, les USA ont importé pour presque
150 milliards de dollars de plus qu’ils n’ont exporté, dans le domaine
de l'automobile et des pièces détachées. Ainsi Joe Barker, analyste de
l’automobile, déclarait-il dans le Boston Globe, « c’est une période
franchement rude » pour ce qu'on appelle "les trois de Détroit" [ndt :
Chrysler, General Motors et Ford]. « Dans les périodes où la demande
s'essouffle, les consommateurs se tournent systématiquement vers les
marques dans lesquelles ils ont confiance et qu'ils jugent fiables. Or
ce sont les marques japonaises en lesquelles ils ont confiance et
qu'ils jugent fiables ».
Nous ne sommes même pas numéro un en termes de montant total d’exportations :
Récemment publié par le Département du Commerce, le montant total
des exportations U.S. était de 126.2 milliards de dollars. Celui des
importations était de 190.1 milliards, ce qui donne un déficit des
biens et service de quelque 63.9 milliards de dollars, soit une
augmentation de 6 milliards de dollars par rapport au déficit du mois
de février.
Mais pas de quoi faire la tête ! Qu'on s'en tienne aux ventes
d’armes et c’est la prospérité assurée. L’industrie d’armement cherche
souvent à se faire passer pour une industrie comme le autres – en
particulier lorsqu’elle cherche à pousser les représentants du Congrès
à diminuer les restrictions et les régulations (et elle le fait
systématiquement). Mais il ne faut pas se leurer, les armes c'est pas
des bagnoles ou des frigidaires ! Elles sont sui generis... Leur marché
est tel que les USA peuvent y rester indéfiniment numéro un – et le
monde entier en demande. Autant dire que vos chances de voir un jour
dans votre vie un déficit de 128 milliards de dollars dans l’armement
sont absolument nulles.
Les armes, c'est notre médaille d’or assurée par excellence.
Dim 17 Juin - 9:33 par Tite Prout