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Le Devoir
ÉCONOMIE, lundi 11 juin 2007, p. a5
Chine
Les attaques contre les marques étrangères se multiplientBrice Pedroletti, Le Monde
Shanghai - Alors que Pékin se fait taper sur les
doigts pour avoir laissé ses entreprises exporter du dentifrice
contenant de l'antigel et de la nourriture pour animaux domestiques
altérée avec de fausses protéines (Le Monde du 29 mai), c'est au tour
des marques étrangères en Chine de sentir le vent du boulet.
Dans ce qui pourrait avoir toutes les apparences
d'une riposte, la presse chinoise faisait état, le vendredi 1er juin,
d'un test de qualité dans le Fujian ayant révélé qu'un quart des
bouteilles de lait pour enfants et des tétines importées n'étaient pas
conformes à la réglementation chinoise. «Croyez-vous que les marques
étrangères sont synonymes de haute qualité?», interroge le rapport.
Le 30 mai, la télévision centrale annonçait que 30
tonnes de fruits de mer importés d'Australie contenaient un niveau trop
élevé en cadmium et en plomb. Quelques jours plus tôt, la presse
chinoise révélait que 118 tonnes d'eau minérale Evian (groupe Danone)
avaient été bloquées, en février, en douane à Shanghai en raison d'un
taux excessif de bactéries. Sur Internet, des consommateurs moquèrent
le fait que l'eau la plus chère de Chine n'était même pas propre à la
consommation.
Ce qui n'est peut-être pas sans rapport, Danone
connaît un sérieux différend avec son partenaire local Wahaha, premier
fabricant chinois de boissons dont il détient 51 %. À tel point que le
groupe français a déposé plainte aux États-Unis contre des entreprises
liées au patron de Wahaha, Zong Qinghou.
Sur Evian, Danone met en avant les différences entre
les normes chinoises et internationales. «Les normes chinoises se
fondent sur des eaux traitées et non sur les eaux minérales naturelles,
telles que définies par la réglementation de l'Organisation mondiale de
la santé. Or l'eau chinoise est traitée et n'a pas les bactéries des
eaux minérales naturelles, riches d'une flore naturelle issue de la
filtration», indique une porte-parole du groupe.
À Shanghai chez Ogilvy, le groupe américain qui gère
la communication de Danone en Chine, on admet qu'«il y a eu beaucoup
d'incidents impliquant des marques étrangères en Chine depuis un an et
demi».
Les nombreux spécialistes des relations publiques
établis à Shanghai ont l'habitude de jouer les pompiers quand leurs
clients ont maille à partir avec l'opinion chinoise. En septembre 2006,
SK-II, une marque de cosmétiques japonaise appartenant à
Procter&Gamble, fut l'objet d'une virulente campagne de dénigrement
après que les autorités eurent détecté dans ses produits du chrome et
du néodyme.
Consommateurs exigeants
Les clientes en colère firent le siège des comptoirs
de la marque dans les grands magasins pour se faire rembourser, et
SK-II dut fermer ses points de vente. La marque se réinstalle peu à peu
en Chine depuis décembre 2006, les autorités ayant admis que la
présence de ces substances à l'état de traces était commune dans les
cosmétiques et ne présentait pas de risques.
En 2005, une inspection du lait en poudre Nestlé
pour bébés révéla que ce produit avait un taux en iode supérieur à
celui autorisé par les normes chinoises. Cette mauvaise publicité
intervenait quelques mois après la mort de nourrissons empoisonnés par
un lait en poudre local, et Nestlé, qui a d'abord très mal réagi aux
accusations de la presse chinoise, dut s'excuser.
Pour les spécialistes en marketing, le consommateur
chinois est d'autant plus exigeant avec les marques étrangères qu'il
s'attend à ce qu'elles soient infaillibles: la publicité met en avant
l'expérience des grandes marques, et leur prix est souvent supérieur
aux produits locaux.
Il y a quelques jours, c'est la photo d'une Buick
tirée par deux chevaux qui circulait dans la presse: le propriétaire
demandait justice au concessionnaire du véhicule. En mars, celle d'une
Citroën à l'avant cabossé fut diffusée par son conducteur dans la
presse lors de la journée des «droits du consommateur». PSA
Peugeot-Citroën a pu toutefois désamorcer cette mini-crise après avoir
découvert que le propriétaire avait, sans le savoir, fait monter des
phares de contrefaçon, lesquels avaient explosé.
La mise au pilori des marques étrangères n'est pas
tant le résultat d'une vendetta pilotée d'en haut que d'une combinaison
de facteurs: «La Chine a montré une telle capacité d'ouverture qu'il y
a un effet de contrepoids. Mais donner l'image de tactiques
protectionnistes serait simplificateur», analyse Marie-Chantal Piques,
spécialiste des biens de consommation à la Mission économique de
Shanghai.
«Vous avez des bureaucrates qui regardent de plus en
plus près, parce qu'il y a une grande attention portée à la
consommation. Ils sont sûrs de trouver quelque chose car les
réglementations sont souvent contradictoires, poursuit Mme Piques.
Après, on ne peut plus les arrêter, et ça ne déplaît pas en haut lieu.
Il n'est pourtant pas rare que les réglementations soient alors
modifiées.»
L'exaspération envers les des donneurs de leçons étrangers fait le reste.
Illustration(s) : Le serveur d'un restaurant de Shanghai verse une eau
Evian à un client. La presse chinoise révélait en mai que 118 tonnes
d'eau minérale Evian (groupe Danone) avaient été bloquées, en février,
en douane à Shanghai en raison d'un taux excessif de bactéries. Sur
Internet, des consommateurs moquèrent le fait que l'eau la plus chère
de Chine n'était même pas propre à la consommation.
Catégorie : Économie
Sujet(s) uniforme(s) : Industries de l'alimentation et des boissons alcoolisées et gazeuses; Industries de l'automobile
Type(s) d'article : Article
Taille : Moyen, 656 mots
© 2007 Le Devoir. Tous droits réservés.Doc. : news·20070611·LE·146927