La destruction des black panthers (2ème partie)
29/03/2003
Le "Cointelpro", mis en place par le FBI, contribuera à la destruction des panthers
Par Paul Yange
Fred Hampton leader des black panthers de Chicago assassiné à 21 ans
© pbs
Les trois années qui suivent sont dévastatrices pour les panthers. Le 6 avril 1968, un des "black panthers", Bobby Hutton, qui n’est âgé que de 17 ans et qui n’est pas armé est tué par la police au cours d’une fusillade.
En janvier 1969, le premier petit déjeuner gratuit mis en place par les panthers est lancé à Oakland. A la fin de l’année, les panthers ont nourri 10 000 enfants dans différentes villes du pays en leur offrant un petit déjeuner gratuit chaque jour avant qu’ils n’aillent à l’école.
Huey P Newton, un des fondateurs des black panthers
A Chicago, Fred Hampton, le charismatique leader des panthers locaux dirige plusieurs programmes de mise en place des petits déjeuners, aide à créer un centre de soins médicaux gratuit, et lance un programme médical de porte à porte pour dépister l’anémie à hématies falsiforme, premier programme du genre dans le pays. Les actions de Hampton rencontrent un écho favorable auprès de la population et le nombre de membres de la section de Chicago augmente.
Le 4 décembre 1969 à 4 heures du matin, grâce aux informations d’un "indic" du FBI qui a infiltré les panthers de Chicago et qui est devenu le responsable de la sécurité de Fred Hampton, la police de Chicago lance un assaut sur l’appartement des panthers de Chicago. Hampton est assassiné dans son sommeil. Mark Clark, un autre panther est également assassiné dans son sommeil. Quatre panthers dormant dans le même appartement sont blessés. Hampton avait 21 ans lors de son exécution, Mark Clark 17 ans. 90 balles furent retrouvées dans l’appartement, une seule avait été tirée par un panther. Aucun policier ne fut inquiété alors que tous les panthers qui avaient survécu à l’assaut furent arrêtés pour tentative de meurtre.
Au cours de l’été 69, l’alliance entre les panthers et un autre groupe, le SNCC (Student Nonviolent Cordinating Comittee) commence à voler en éclats. Un des points de désaccord porte sur l’inclusion des "blancs" dans le combat de libération des minorités. Cette dispute conduit à un affrontement armé à l’université de Californie à Los Angeles au cours duquel deux panthers trouvent la mort.
En septembre, Huey Newton est condamné reconnu coupable de meurtre et condamné à 2 à 15 années de prison (il sera finalement libéré en 1970 pour vice de procédure).
Entre temps, en Novembre 1968, Catherine et Edlridge Cleaver ont fui les Etats-Unis et s’installent à Alger (après être passés par Cuba et Paris). Le Black Panther Party, bien que menacé par le FBI voit son audience croître (5000 membres et 45 succursales) ; le journal du parti s’écoule à plus de 100 000 exemplaires.
Stokely Carmichael
En 69, Seale est arrêté et condamné à 4 ans de prison. En mars 1970, alors qu’il est toujours emprisonné, il publie "Seize The Time", l’histoire des panthers et de Huey Newton. Au cours de l’année 1970, 38 militants sont tués lors de raids organisés par les polices locales. Quelques mois plus tard, Geronimo Pratt, un des membres les plus en vue du Black Panther Party de Los Angeles est arrêté pour le meurtre d’une femme blanche alos que selon de multiples témoignages, il assistait à une réunion de son organisation à Oakland. Il sera finalement libéré en 1998 après avoir passé plus de 27 ans en prison.
Les querelles et dissensions fomentées par le Cointelpro au sein du Black Panther Party amplifie les divergences internes nées de l’affrontement entre le "ministre de la défense" qui est resté à Oakland, Huey Newton, et Eldridge Cleaver en exil à Alger. Certains des partisans de Cleaver fondent alors la Black Liberation Army (BLA) clandestine.
Fin 1971, le Black Panther Party se retrouve décimé par la répression, son audience diminue et ses dirigeants replient leurs actions sur leur base d’Oakland, en même temps qu’ils décident de réintégrer jeu politique "normal" en soutenant les candidats démocrates aux élections locales. Les militants radicaux les plus chevronnés sont soit mort, soit en exil, soit en prison. Un nouveau programme de contre-espionnage, "newkill", directement mis au point par Hoover et Nixon s’abattra sur les membres du BLA.
Le Cointelpro sera officiellement arrêté en 1971 après sa découverte fortuite par un groupe d’étudiants parti s’introduire dans un bureau du FBI.
Bobby Seale et H P Newton
La Note envoyée par J Edgar Hoover à l’ensemble de ses agents, le 25 mars 1968 fut exécutée à la lettre : le Cointelpro devait "empêcher la coalition de groupes nationalistes noirs (...) empêcher la naissance d’un messie qui pourrait unifier et électriser le mouvement nationaliste noir (...) Il faut faire comprendre aux jeunes Noirs modérés que, s’ils succombent à l’enseignement révolutionnaire, ils seront des révolutionnaires morts". Une autre note datée du 3 avril, expose les termes de l’alternative. "Ne vaut-il pas mieux être une vedette sportive, un athlète bien payé ou un artiste, un employé ou un ouvrier (...) plutôt qu’un Noir qui ne pense qu’à détruire l’establishment et qui, ce faisant, détruit sa propre maison, ne gagnant pour lui et son peuple que la haine et le soupçon des Blancs ?"
Eldridge Cleaver reviendra d’exil en 1975. Il rejoindra la secte Moon, fréquentera les milieux fondamentalistes et soutiendra Ronald Reagan. Il est décédé en 1998.
Stokely Carmichael s’exilera en Afrique en juillet 1969, démissionnera du "Black Panther Party" et prendra plus tard le nom de Kwame Touré (en hommage à Kwame Nkrumah et Sekou Touré). Il mourra en 1998 d’un cancer de la prostate.
Huey P Newton continua ses activités militantes au cours des années 70 et 80. Il fut abattu en 1989 lors d’une dispute avec un dealer de drogue.