Faut-il avoir peur des usines chinoises ?
Les performances des usines chinoises étonnent le monde. Pour certains, elles sont une menace, pour d’autres, une opportunité. Une menace, parce que ces usines sont en train d’écraser la concurrence tant des pays développés que des pays pauvres. Opportunité, dans la mesure où les délocalisations sont devenues incontournables pour la plupart des entreprises occidentales qui souhaitent fabriquer à bas prix.
Un essai fort intéressant de Jean Ruffier, chercheur au CNRS, intitulé «Faut-il avoir peur des entreprises chinoises ?», porte un éclairage différent sur la compétitivité et la pérennité de l’«atelier du monde». Travaillant depuis plus de quinze ans avec des collègues chinois qu’il a formés à l’observation des usines locales, l’auteur dresse un portrait sans complaisance de ce nouveau monde industriel qui, aujourd’hui, passionne et inquiète, mais qui reste méconnu. Cet essai nous renseigne sur toutes les facettes de ces entreprises, notamment sur l’origine des capitaux, l’identité des patrons et des ouvriers ainsi que sur leurs projets et leurs ambitions.
A partir d’un diagnostic des entreprises privées et publiques chinoises ou filiales des multinationales occidentales, Jean Ruffier met en lumière les points forts et les faiblesses de cette industrie émergente. A ses yeux, «ce sont des usines mal organisées qui n’investissent ni en recherche ni en développement, encore moins en innovation. Leur force vient du fait qu’elles sont mises en compétition les unes avec les autres».
Cette industrie émergente est en fait l’industrie de la copie. «Les usines chinoises ne font pas de recherche, il n’y a pas de protection sociale, elles sont créées à partir de rien et leur principale activité est la copie ou la contrefaçon», insiste Jean Ruffier pour mieux casser le mythe. Certes, leur capacité d’exporter est réelle. Mais ces activités, tournées uniquement vers les marchés extérieurs, sont une source de dépendance.
Alors, faut-il avoir peur des usines chinoises ? Jean Ruffier n’y croit pas : «ces usines ne sont pas une menace si l’industriel occidental reste maître du jeu. Garder la maîtrise du jeu est indispensable pour conserver ses parts de marché. C’est tout l’enjeu des délocalisations».
Il y a beaucoup à apprendre sur les usines chinoises et ce livre est un excellent outil pour y parvenir. L’essai de Jean Ruffier est une véritable visite guidée des petites unités créées à la va-vite à la périphérie de la ville de Canton, ou des grosses entreprises chinoises qui se développent selon l’exemple des grandes multinationales de l’Occident.
par Any Bourrier
[21/12/2006]
http://www.rfi.fr/actufr/articles/084/article_48350.asp