Le Journal Culturel Le Mague
Humeurs
L’ethnie française
Le 29 septembre 2006 par Claude Ribbe
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Depuis 1944, on n’y croyait plus. Et tout cela en douceur, dans l’indifférence générale, sans réaction aucune des principales ONG prétendument antiracistes. D’abord l’historien Olivier Pétré-Grenouilleau appuyant ouvertement ses travaux comparatifs plus que discutables - mais salués par un certain establishment français - sur le critère racial (Les Traites négrières, page 10). Ensuite le Cran (Conseil représentatif des associations noires) de Patrick Lozès et Louis-Georges Tin se réclamant ouvertement de la notion de race pour brûler les dictionnaires.
Un bien curieux retour, que celui de la « race » en France. Puis la tribu Ka (avatar « hard » du Cran) organisant des réunions interdites « aux blancs, aux juifs, aux arabes et aux asiatiques » mais auxquelles Stéphane Pocrain, par ailleurs co-fondateur du Cran, aurait assisté. Sans oublier le recours systématique et décomplexé au critère racial à la une de certains quotidiens. Enfin, l’apothéose, en plein été, comme il se doit pour les sujets délicats. Patrick Simon et Martin Clément, deux chercheurs du très officiel Institut d’études démographiques (Ined) - organisme placé sous la tutelle de M. Gilles de Robien, ministre de l’Éducation nationale - tentaient sournoisement de démontrer dans un article confidentiel de la revue Population et Sociétés (n° 425, juillet-août 2006) qu’il y aurait en France un « consensus » pour une approche « ethno-raciale » dans les statistiques publiques. Tout cela sous le fallacieux prétexte de lutter contre les discriminations.
L’article commentait une mystérieuse « enquête expérimentale » demandée par le ministre Azouz Begag et perversement financée par le Fasild (un fonds théoriquement chargé de lutter contre les discriminations). Cette enquête avait été réalisée sur un échantillon de 1327 employés et étudiants pour tester les méthodes de mesure de la « diversité ». On y avait introduit une déclaration « d’appartenance ethno-raciale » à l’anglo-saxonne. On demandait tout de go au sondé s’il se considérait comme « blanc, noir, arabe ou berbère, asiatique, du sous continent-indien ». Les deux chercheurs de l’Ined n’indiquaient pas d’où provient cette taxinomie raciologique. Blumenbach ? Gobineau ? Vacher de Lapouge ? On ne sait trop. L’article estival de Population et Sociétés était bien évidemment destiné à voir jusqu’où on pourrait aller trop loin, à tester les réactions. Curieusement, celles de la presse furent plutôt favorables, en particulier sous la plume de Dominique de Montvalon et Patricia Van Eeckout, spécialistes incontestés d’une prétendue « question noire » en France. « L’opinion est loin de rejeter l’idée du comptage ethnique » concluaient ces deux journalistes du Monde, habitués, il est vrai, à mettre une majuscule au substantif « noir ».
Comme on pouvait s’y attendre, la suite ne tarda pas à venir. Le 3 septembre, était publiée au Journal Officiel une décision prise le 18 juillet précédent par le directeur de l’Ined, M. François Héran. Elle autorisait une enquête destinée à « comparer l’intégration des descendants d’immigrés dans plusieurs villes européennes » prenant en considération les « constructions identitaires » des intéressés. Il s’agissait bel et bien d’un comptage « ethno-racial » financé sur fonds publics. Mis à part le MRAP, personne n’a réagi.
C’est à se demander dans quelle tradition s’inscrivent - consciemment ou non - les chercheurs de l’Ined qui s’abritent, comme toujours, derrière une prétendue compétence scientifique qui sert d’alibi commode à leurs commanditaires.
Il faut rappeler que le terme d’ethnie a été introduit en France à la fin du XIXe siècle par un autre « scientifique », l’anthropologue Vacher de Lapouge, théoricien français du racisme et de l’eugénisme dont les idées ont directement inspiré Hitler. Son disciple George Montandon, ethnologue spécialiste d’ « ethnoraciologie judaïque », devenu directeur de l’Institut d’études aux questions juives et ethno-raciales en 1943, définit ainsi la notion d’ethnie dans son ouvrage L’ethnie française (1935) : « l’ethnie est un groupement naturel pour la détermination duquel entrent en ligne de compte tous les caractères humains, qu’ils soient somatiques, linguistiques ou culturels ». Une définition que certains « scientifiques » contemporains ne renieraient sans doute pas.
Montant à son tour au créneau, François Héran, le directeur de l’Ined signataire de la décision du 18 juillet 2006, tranchait sans complexe dans une tribune du Monde le 15 septembre suivant : « Peut-on introduire dans les enquêtes de la statistique publique des questions sur l’appartenance ethno-raciale, comme par exemple la couleur de la peau ? Au risque de surprendre, la réponse est oui. »
Balayé, le rejet du préjugé de couleur, un principe pourtant fondamental de la République qui permit, en 1794, l’abolition de l’esclavage et l’universalisation de la déclaration des droits de l’Homme.
La boucle serait donc bouclée. Ceux qui s’empressent de se déclarer « noirs » ne seront pas déçus. Quelle aubaine si les Africains et les Antillais acceptent docilement d’être noyés dans le même sac. On ne tardera pas, en effet, à les prendre au mot pour mieux les taxer ensuite de « communautarisme », de « racisme anti-blancs », voire d’antisémitisme. Tout ce qu’ils diront sera retenu contre eux. Telle a été la solution imaginée par certains politiques - conseillés par des universitaires - pour en finir avec les revendications légitimes des descendants d’esclaves.
Grâce à Pétré-Grenouilleau, Pap N’Diaye, Patrick Lozès, Louis-Georges Tin, François Héran et quelques autres, la mémoire de l’esclavage - si l’on n’y prend garde - pourrait bien être finalement diluée dans une « question noire ». Du même coup, l’extrême droite y gagnera bien quelques points : un espoir inavouable sans doute caressé par certains candidats à la présidentielle.
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> L’ethnie française
30 septembre 2006, par gégé
Il est facile de culpabiliser les français blancs pour la simple raison qu’ils sont blancs. Mais lorsque les minorités visibles ne sont pas noires mais blanches il est étrange qu’aucun philosophe ne vienne faire la leçon de choses et tenter de culpabiliser les vilains racistes noirs.
A la Martinique par exemple, le racisme des Martiniquais noirs envers les Martiniquais blancs ou les Français blancs est à un niveau qui n’a rien à envier au racisme ambiant du début du siècle en Europe. Là bas, lorsqu’on a le malheur de passer dans la rue devant un groupe de jeunes noirs, même avec sa femme et ses enfants, sans rien dire sans se faire remarquer, et bien la plupart du temps on se fait traiter de noms d’oiseaux, on se fait provoquer. Bien sûr il faut la fermer, ravaler son orgueil et passer son chemin sous peine de se faire tabasser. Le pire étant encore le malheureux petit blanc qui entreprend de sortir avec une Martiniquaise... là, la meilleur chose qu’ils puissent faire tous les deux est de prendre l’avion et de partir en métropole car ils subiront, si ils restent (surtout elle) les pires avanies de la part des Martiniquais de souche. Très souvent le mieux qu’un blanc puisse espérer d’un noir en Martinique c’est le mépris.
Par soucis de crédibilité, avant de faire des leçons de racisme à toute une nation il serait plus judicieux de regarder ce qui se passe dans sa ville et son département de naissance
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30 septembre 2006, par Claude Ribbe
Je dis justement que la distinction blanc/noir n’a pas de sens. Si, malgré cela vous y voyez une stigmatisation des "blancs", c’est ou bien que vous ne savez pas lire ou bien que vous n’avez pas lu. Qu’est-ce que cette notion de Français "blancs" ? il n’y a que des Français. Vous parlez des racistes "noirs". Il n’y a pas de racistes "noirs". Il n’y a que des racistes tout court. Lorsque Kémi Séba tient un discours raciste, moi, Claude Ribbe, philosophe, je le condamne. Si vous ne l’avez pas su, c’est qu’il existe une censure médiatico-raciste. Je le condamne en tant que raciste, pas en tant que raciste "noir". Lorsque le Cran tient un discours raciste, je condamne le Cran. Peu m’importe de savoir la couleur de peau de Patrick Lozès ou Louis-Georges Tin. Un âne est un âne. Le poil ne compte pas. Cela étant, il y a sûrement des Martiniquais racistes (Louis-Georges Tin, par exemple). Mais lorsque je vais à la Martinique avec ma femme, qui a la peau plus claire que la mienne, personne ne nous insulte. Il est vrai que la population martiniquaise (ce que vous semblez ignorer) est très mélangée, ce qui donne des couleurs de peau très variable. Il y a même de nombreux Martiniquais d’origine purement européenne (l’épouse de l’actuel Premier ministre par exemple). Aucun Martiniquais à la peau sombre n’a jamais tenté (à ma connaissance) de jeter à la mer un béké. Tout ceci pour vous dire qu’un pays comme la Martinique ne me semble pas avoir de leçons à recevoir de la métropole en ce qui concerne les problèmes de couleur de peau. On voit que vous connaissez bien mal ce département français. Pour ma part, je suis né à Paris, dans une maternité du 14e arrondissement, de parents français. Mes grands-parents aussi étaient français. Et mes arrière grands-parents itou. Parmi mes ancêtres, certains avaient la peau plus claires que les autres (vous les appelleriez des "blancs"). Je vais même vous faire une confidence : certaines personnes de ma famille sont mortes pour la France, comme on dit. Je ne donne de leçons qu’à ceux qui me semblent en avoir besoin. Et vous avez de la chance : c’est gratuit !
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> L’ethnie française
30 septembre 2006, par Pierre
Vous soulevez là une problématique essentiel monsieur Ribbe, merci pour votre clairvoyance et votre sens de l’analyse.
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> L’ethnie française
30 septembre 2006, par Sylvie
Cela fait du bien de lire un article de ce type sur un média libre, voilà qui va contre un communautarisme forcené et pour le bien de l’humanité.
Enfin un discours "clair" sur les noirs sans mauvais jeu de mot. Merci monsieur Ribbe pour vos combats et la justesse de vos convictions.
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> L’ethnie française
29 septembre 2006
Comment veux-tu faire pour étudier la discrimination à l’emploi si tu refuses la notion de "minorité visible" ? Si déjà on n’a pas le droit de dire qu’un employeur raciste fait bien la différence entre un blanc et un noir, on n’a aucun risque de le condamner... Que certains employeurs ne fassent aucune différence entre un congolais et un antillais ne fait aucun doute mais en général ils font la différence entre un noir et un blanc et on ne peut pas nier la différence et la combattre...
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> L’ethnie française
29 septembre 2006, par Claude Ribbe
Tu trouves cela intelligent, l’expression "minorité visible" ? Imagine une place du Vie arrondissement de Paris. Deux Sud-Africaines de l’ambassade sortent de chez Saint-Laurent. Un Malien défonce le macadam au marteau-piqueur. Et moi je passe pour aller chez mon éditeur. On ferait tous les quatre partie de la même "minorité visible" ? Tu crois que Jospin n’aurait pas mieux fait de la boucler plutôt de sortir cette ânerie raciste ? Cela a mené où ? Le Pen au deuxième tour et Lionel retraité à l’île de Ré.
Le problème est-il d’"étudier" la discrimination à l’emploi ou de la faire cesser ? La publicité faite autour de prétendues études comme celle de l’Ined ne sert, par le racisme qu’elle véhicule à dessein, qu’à renforcer le racisme dans l’esprit du public et donc à renforcer la discrimination. Le remède est infiniment pire que le mal. Les études existent déjà (par exemple dans le rapport 2006 de la CNCDH, une institution où je siège bénévolement, à la différence des fonctionnaires de l’Ined). Elles nous disent qu’un Français sur trois se déclare ouvertement raciste. Est-ce que cela ne suffit pas ? Il n’y a pas besoin de donner publiquement une valeur à des catégories raciales qui ne veulent rien dire comme "blanc" ou "noir" pour faire condamner un employeur. Il suffit de prouver qu’il a agi en fonction d’un préjugé raciste illégal. Ne te laisse pas embrouiller par les mots : ce n’est pas parce qu’un employeur fait une différence qu’il y a effectivement une différence. Ce que tu vois n’est pas toujours la réalité. Trempe un bâton dans l’eau : il apparaît brisé. Pourtant, il ne l’est pas. Les étoiles t’apparaissent petites dans le ciel, pourtant elles ne le sont pas. Cet homme que tu croises t’apparaît "noir" ou "blanc" ? Est-il "noir" ou "blanc" ou seulement ton semblable ? Quand tu croises quelqu’un qui te ressemble, est-ce que tu te dis "Tiens, voilà, un blanc !" ou "Tiens voilà un noir ?"
Lun 11 Déc - 22:04 par mihou