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 Rhétoriques de la race

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mihou
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mihou


Nombre de messages : 8092
Localisation : Washington D.C.
Date d'inscription : 28/05/2005

Rhétoriques de la race Empty
30112006
MessageRhétoriques de la race

Rhétoriques de la race


Discrimination positive, " minorités visibles ", charte de la diversité...
Un collectif d'auteurs étudie ces phénomènes inédits, jadis impensables au pays
de l'universalisme républicain



,

En 1991, dans l'" avertissement " d'un ouvrage intitulé Face au racisme
(La Découverte), Pierre-André Taguieff soulignait l'incapacité d'une certaine
gauche progressiste à penser la renaissance des stéréotypes xénophobes et
antisémites. Pour le politologue, cet aveuglement conceptuel expliquait le
désarroi des belles âmes humanistes face à la percée lepéniste : " C'est
précisément l'inquiétante ascension du Front national qui a permis de prendre
conscience des illusions et des limites de l'action antiraciste telle qu'on l'a
conduite. (...) La lutte contre le racisme ou la xénophobie, si elle veut se
ressourcer, ne peut plus se tenir à distance des travaux et recherches des
sciences sociales. (...) C'est un avis aux antiracistes de l'avenir : il faudra
bien qu'un jour l'intendance suive... ", prévenait-il.

Quinze ans plus tard, le mouvement antiraciste dans son ensemble connaît
une crise sans précédent, déchiré qu'il est par les débats autour du voile
islamique ou encore la querelle post-coloniale. Dans le même temps, quelques
chercheurs en sciences sociales tentent, eux, d'affronter non plus le " racisme
", cette idéologie pseudo scientifique et meurtrière, mais la " race " comme
représentation collective et comme catégorie de pensée désormais
incontournables. " En quelques années, ce qui était occulté est devenu
omniprésent, ce que l'on taisait est devenu un lieu commun ", notent ainsi les
sociologues Didier et Eric Fassin en ouverture d'un volume collectif récemment
paru sous le titre interrogatif, et impensable il y a seulement quelques années
: De la question sociale à la question raciale ?

Or c'est l'époque elle-même qui pose la question, en replaçant le " fait
racial " sur le devant de la scène, et ce à un double titre. D'un côté, on
assiste à la libération d'un discours qui tend à stigmatiser telle ou telle
population en fonction de ses origines ou de sa couleur de peau, comme on a
encore pu le constater lors des émeutes urbaines de novembre 2005. D'un autre
côté, force est de reconnaître que ces mêmes marqueurs identitaires peuvent
aussi être utilisés, tout à l'inverse, pour lutter contre les discriminations et
bâtir une politique de reconnaissance : des grands patrons signent une " charte
de la diversité ", des chaînes de télévision jurent de promouvoir les "
minorités visibles " à l'antenne, des associations de multiples horizons se
rassemblent dans un Conseil représentatif des associations noires (CRAN).


" COLOR BLIND "


Autant de phénomènes qui ne sont guère aisés à envisager dans un contexte
français réputé " color blind " (aveugle à la couleur), comme disent les
Anglo-Saxons, et où l'universalisme républicain tient lieu d'ultime fondement à
la citoyenneté. Et pourtant, il faut bien admettre que chez nous aussi, " la
race est devenue une ressource politique, dont les acteurs se saisissent pour
défendre des intérêts, attirer des électeurs, revendiquer des places, consolider
des positions ".

D'où la prise de parti des auteurs : plutôt que de regretter le " bon
vieux temps " de la lutte des classes, et de déplorer l'inexorable "
ethnicisation " du débat public, ils cherchent à refonder une grille de lecture
propre à articuler le facteur racial avec des logiques plus traditionnelles, à
commencer par les clivages socio-économiques, les statuts juridiques ou les
polarités de genre.

Ainsi Agnès Van Zanten analyse-t-elle cet " objet tabou " que constituent
les inégalités ethniques à l'école, c'est-à-dire au coeur même du modèle
d'intégration à la française ; elle étudie tout particulièrement les stratégies
d'évitement mises au point par certains parents d'élèves pour tenir leurs
enfants à bonne distance de ces " handicapés sociaux " que sont les pauvres et
surtout les immigrés : " Plus que la faible présence d'enfants d'ouvriers, c'est
la quasi-absence d'élèves d'origine immigrée qui caractérise les établissements
privés ", précise-t-elle.

De son côté, Fabien Jobard marque la " cécité criante " des institutions
policières et judiciaires à l'égard de discriminations raciales qu'elles
produisent. S'appuyant sur plusieurs enquêtes de terrain, le chercheur montre
que ces discriminations prennent souvent des formes beaucoup plus subtiles qu'on
ne croit, irréductibles aux seuls " contrôles au faciès ". Pour les mettre en
lumière, il est nécessaire de conjuguer plusieurs approches : " Les différences
de traitement par les policiers des populations qu'ils rencontrent superposent
aux critères ethniques des critères à la fois territoriaux et strictement pénaux
", écrit Jobard.

Clair et informé à la fois, cet ouvrage se présente donc comme une
réflexion à plusieurs voix, d'autant plus féconde qu'elle n'est aucunement
homogène. Au fil des pages, le lecteur perçoit d'ailleurs une réelle diversité
de démarches et de sensibilités. Ainsi Gérard Noiriel retrace-t-il la généalogie
de la question raciale au sein du " creuset français ", pour en appeler à la
plus " extrême vigilance " en ces domaines : " On ne peut évidemment pas mettre
sur le compte du "racisme post-colonial" l'échec scolaire des jeunes issus de
l'immigration en provenance des pays d'Europe de l'Est ", remarque l'historien.

Tout aussi perplexe à l'égard de la problématique " post-coloniale " dans
ses formulations les plus caricaturales, Emmanuelle Saada fait valoir que les
usages coloniaux de la catégorie raciale, très variables d'une situation à
l'autre, se sont toujours inscrits dans " un entrelacement de discours qui
n'était pas moins complexe hier qu'il ne l'est aujourd'hui ". D'où l'urgence de
ne pas accepter une certaine vulgate à la mode, cette " vision continuiste de
l'histoire, qui lie de manière trop linéaire discriminations coloniales et
contemporaines comme étant toutes le produit d'un racisme inchangé ".

Jean Birnbaum



DE LA QUESTION SOCIALE À LA QUESTION RACIALE ?

Représenter la société française

sous la direction de Didier et Eric Fassin.

La Découverte, 264 p., 20 ¤.

Signalons également le dossier coordonné par Fethi Benslama, Alain Brossat
et Michel Surya, dans le dernier numéro de la revue Lignes, sur le thème "
Ruptures sociales, ruptures raciales " (no 21, novembre 2006, Ed. Lignes-Léo
Scheer, 256 p., 17 ¤).
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https://vuesdumonde.forumactif.com/
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