Les religions africaines décomplexées ? Exemple du Vaudou en France
15/08/2006
La religion vaudoue compte environ 80 millions d'adeptes dans le monde. En France elle est vivace dans les communautés béninoise et haïtienne, mais aussi guadeloupéenne, pourtant il ne fait pas bon s’en revendiquer officiellement. Du moins, cela était plus vrai hier qu’aujourd’hui où les années 2000 semblent porteuses d’une nouvelle donne. Des conférences sont organisées sur ce thème, une bibliographie spécialisée s’étoffe progressivement, et les milieux culturels ne répugnent pas à associer les arts vaudou à leurs programmes désormais.
"Je suis vaudouisant, mais les intellectuels haïtiens refusent souvent d'affirmer leur culture. En France, il y a une quarantaine de temples, il y a des mambos (prêtresses), des hougans (prêtres). Mais tout est souterrain, clandestin", explique Jean-Audan Capel, professeur de lettres et historien.
Les vaudouisants, environ 80.000 en France, croient en un Dieu unique. Ils ne s'adressent pas directement à lui, mais à des intermédiaires, des "archanges", -"loas", au nombre de 150-, représentés par des peintures, des fétiches, ou des mottes de terre, et qui accompagnent les humains avec bienveillance, intercèdent pour des guérisons, une demande de justice, de paix.
Souvent les saints chrétiens sont ces divinités. Le vaudou, parfois assimilé, ce qui indigne ses adeptes, à la seule "magie noire" ("macumba") ou à des rites barbares, se dit "une religion du coeur", sans dogme. "Nous avons un rituel, qui n'est pas le rituel chrétien. Mais le vaudou est tenu pour sale. Il est pratiqué dans des caves. C'était la religion des esclaves révoltés, en Haïti et à Saint-Domingue. Elle veut sortir de la clandestinité, mais elle y peine", souligne M. Capel.
Le vaudou, est pratiqué également à Cuba -c'est le "santeria"-, mais aussi au Brésil, en Louisiane (Etats-Unis), et en Afrique (Togo, Nigeria, Cameroun notamment, outre le Bénin), seul au Benin et e Haïti il jouit d’une reconnaissance officielle de religion.
L'Unesco, fin juillet 2006 organisait pour la première fois des journées sur "l'art et la symbolique vaudous", "le vaudou et la diaspora", et "la tolérance religieuse".
"Les Béninois ont tous été moulés dans la culture vaudoue qui a, hélas, une image faussée. C'est une culture très tolérante. Le vaudou reconnaît un Dieu suprême, Mawu en langue fon (une des principales communautés béninoises, ndlr). "Dans le vaudou, les familles accompagnent les morts pendant un an, pour qu'ils aillent dans le royaume des ancêtres", selon un connaisseur.
Musicienne guadeloupéenne, Marianne Mattéus, a découvert le vaudou à travers l'oeuvre de Toto Bissainthe (1934-1994), grande comédienne et chanteuse haïtienne, figure emblématique du combat, en France, contre le régime des "tontons macoutes" et dont elle est considérée comme "la petite soeur spirituelle". Toto Bissainthe, qui revendiquait -tout comme le guitariste américain Jimi Hendrix-, le vaudou "culturel", fit une grande carrière théâtrale, notamment en jouant Jean Genet, Jean-Paul Sartre et Jean Cocteau. "Ce n'est pas l'aspect religieux qui prédomine pour moi. Le vaudou, c'est une éducation, un comportement, une façon d'appréhender le monde. C'est un rythme extraordinaire, une musique qui chante et crie la révolte des esclaves, et nous fait redécouvrir nos propres racines", explique Mme Mattéus.
Ces sorties publiques de plus en plus courantes traduisent des changements dans les mentalités, des peuples plus enclins à s’accepter, à faire la paix avec eux-mêmes espérons pour le meilleur de la contribution religieuse au bien-être matériel et immatériel de l’humanité.
Source principale et extraits de : Le vaudou, une religion qui veut sortir de la clandestinité Paris 28 juin 2006 (AFP)
Afrikara
http://www.afrikara.com/index.php?page=contenu&art=1351