L'Armée Israélienne, Une Idole Exigeant des Sacrifices en Vies Humaines
Une analyse pertinente de la main mise de l'armée sioniste sur la société israélienne, de la servitude volontaire des sionistes
israéliens y compris de gauche, et par conséquent de leurs responsabilités concernant les massacres de civils libanais et
palestiniens. C'est l'armée qui dirige le pays. Dans l'interview d'un haut gradé des renseignements de l'armée qui suit,
s'affiche l'arrogance, le cynisme, le racisme de l'un de ceux qui a fait partie de cette institution élevée au rang d'idole, et
pour laquelle des milliers de vies humaines libanaises, palestiniennes, israéliennes sont sacrifiées par la junte militaire qui
dirige l'état sioniste.
L'Armée Israélienne, Une Idole Exigeant des Sacrifices en Vies Humaines
Vous êtes des terroristes, nous sommes vertueux
Des que les faits concernant l'embuscade tendue par le Hezbollah à Bint Jbeil, qui s'est terminée par des pertes
relativement élevées israéliennes (8 soldats y ont été tués), sont devenus publics, la presse et la TV en Israël ont commencé à
marginaliser toute opinion critiquant la guerre. Les medias ont de nouveau eu recours au kitsch auquel les israéliens se sont
habitués des l'enfance : l'armée la plus menaçante dans la région est décrite comme si c'était David contre un Goliath arabe.
Cependant, le Goliath juif a replongé le Liban 20 ans en arrière, et les israéliens eux-mêmes encore plus loin : nous
apparaissons maintenant comme une populace ayant une culture de lynchage, collés à nos téléviseurs, excités par un premier
ministre dont la « gouvernance » est lancée et légitimée par des rivières de feu et de destruction des deux côtés de la
frontière. La psychologie de masse est la plus performante quand on peut cibler une institution ou un phénomène avec lequel
un grand nombre de personnes s'identifie. Les israéliens s'identifient avec l'armée, et même après la mort d'un grand nombre
d'enfants libanais à Qana, ils pensent qu'arrêter la guerre sans une victoire décisive serait l'équivalent d'une défaite. Cette
logique révèle notre psychose nationale, et cela vient du fait que nous nous identifions avec la façon de penser de l'armée
israélienne.
Dans le barrage mélodramatique tendu par la presse, on assigne à l'armée le rôle à la fois de héro et de victime. Et l'ennemi ?
Au cours des communications en hébreu les formulations sont toujours identiques : d'un côté « Nous » « Nos » ; et de l'autre
Nasrallah et Hezbollah. Il ne semble pas qu'il y ait de libanais dans cette guerre. Alors qui meurent sous le feu israélien ? Le
Hezbollah. Et si nous posons des questions sur les libanais ? La réponse est toujours qu'Israël n'a aucun conflit avec le
Liban. C'est encore là une illustration de notre unilatéralisme, le cri tonitruant israélien des champs de bataille depuis des
années : peu importe ce qui se passe autour de nous, nous avons le pouvoir et donc nous pouvons appliquer la logique. Si
seulement les israéliens pouvaient voir le mal fait durant toutes ces années de pensée unilatérale. Mais nous ne le pouvons pas
à cause de l'armée – qui a toujours été au cœur de l'état – déterminant la forme prise par nos vies et la nature de nos
souvenirs, et les guerres comme celle-ci effacent tout ce que nous croyions connaître, créant une nouvelle version de
l'histoire à laquelle nous ne pouvons que souscrire. Si l'armée gagne, ses succès deviennent une partie de notre « héritage ».
Les israéliens ont assimilé la logique et le langage de l'armée – et dans ce processus, ils ont perdu leurs souvenirs. N'est pas
la meilleure façon de comprendre pourquoi nous n'avons jamais appris de l'histoire ? Nous n'avons jamais mis en question
l'armée, dont la mémoire – la mémoire officielle israélienne- est martelée par les intellectuels au service de l'armée et de
l'état, et qui est au centre de notre culture.
L'armée est l'institution la plus puissante dans la société israélienne, et qu'on nous décourage de critiquer. Peut on étudier le
rôle dominant qu'elle joue dans l'économie israélienne. Alors même qu'ils sont toujours en service, nos généraux deviennent
amis avec des sociétés américaines qui vendent des armes à Israël, puis ils prennent leur retraite, les poches remplies
d'argent, et deviennent directeurs de multinationales. L'armée est le plus grand client pour tout en Israël. En plus, le
personnel de nos industries de haute technologie est un mélange de militaires et d'ex militaires qui travaillent en étroite
collaboration avec le complexe militaro industriel de l'occident. L'actuelle guerre est la première à devenir une opportunité
publicitaire pour l'une de nos plus grandes compagnies de téléphones portables, qui l'utilise pour mener une vaste campagne
publicitaire. La deuxième plus grande banque d'Israël, Bank Leumi, utilise des placards publicitaires dans trois des journaux
à plus grand tirage pour distribuer des autocollants disant « Israël est puissant ». L'armée et les universités sont étroitement
liées par des projets de recherche communs, et toute une flopée de bourses de l'armée.
Il n'y a pas d'institution en Israël qui puisse concurrencer la capacité de l'armée à disséminer des images et des
informations ou former une classe politique nationale et une élite universitaire, ou produire de la mémoire, de l'histoire, des
valeurs, de la richesse, du désir. C'est de cette façon que l'identification s'installe durablement : non pas par une dictature,
ou une législation draconienne, mais par la vertu du fait que l'institution la plus puissante du pays met la main sur tout
citoyen à l'âge de 18 ans. La majorité des israéliens s'identifient avec l'armée et l'armée le leur rend en consolidant leur
identité, spécialement quand elle – ou nous – menons une guerre.
L'armée n'a joué aucun rôle ni dans la guerre du golfe ni dans l'éventuelle guerre de Bush contre l'Iran, mais elle est en
alerte permanente, pour la vraie guerre qui nous attend toujours au coin de la rue. Pendant ce temps, elle harasse les
palestiniens en Cisjordanie et à Gaza, avec des effets très destructeurs. (En juillet, elle a tué 176 palestiniens, la plupart de
la même zone de Gaza, dans une opération de « police » qui incluait la destruction de maisons et d'infrastructures). Ils
tirent. Ils kidnappent. Ils utilisent leurs avions de combat F16 contre des camps de réfugiés, des tanks contre des cabanes et
des taudis. Pendant des années, ils ont opérés de cette façon contre des gangs et des groupes d'adolescents armés et
d'enfants, et ils appellent cela une guerre, une « guerre juste », vitale pour notre existence. Le pouvoir de l'armée à
produire du sens, des valeurs, du désir s'illustre parfaitement par sa façon de se comporter avec les palestiniens, mais cela
ne serait pas possible sans le soutien de la gauche en Israël.
Le courant principal de la gauche n'a jamais sérieusement essayé de s'opposer à l'armée. L'idée que nous n'avions pas
d'autre choix que d'attaquer le Liban et que nous ne pouvons pas arrêter tant que nous n'avons pas terminer le travail : ce
sont les vérités de la propagande de l'armée, décidée par l'armée et articulées par les intellectuels de l'état et les
commentateurs. Ainsi en est-il de presque toutes les autres descriptions de la guerre, tel la déclaration de l'universitaire de
Tel Aviv Yossef Gorni dans Haaretz, que « c'est notre deuxième guerre d'indépendance ». Le même type de non sens a été
écrit par le même type de personnes quand l'Inti fada de 2000 a commencé. Elle était aussi une guerre pour notre droit à
exister, notre second « 1948. Ces descriptions n'auraient pas tenu la route si nos intellectuels sionistes de gauche –
pourvoyeurs solennels de la justification « morale de la guerre » - ne les avaient pas reprises à leur compte.
La pensée militaire est devenu notre seule façon de penser. Le désir de supériorité est devenu le besoin de maîtriser
complètement chaque aspect de nos relations avec nos voisins. Les arabes doivent être paralysés socialement et
économiquement, et écrasés militairement, et bien sûr ils doivent nous être montrés dans l'état dégradé auquel nous les avons
réduits. Notre façon de penser habituelle est empruntée à nos services de renseignements, qui les « traduit » et les
interprètent, mais ne peut pas les reconnaître en tant qu'êtres humains. Les israéliens ont cessé depuis longtemps d'être émus
par les images de femmes en pleurs portant des foulards blancs, cherchant ce qui restait de leurs maisons dans les
décombres laissés par nos soldats. Nous les considérons de la même manière que nous considérons les poulets et les chats.
Nous nous détournons sans problème et considérons les vrais problèmes : l'ennemi. Les Katiouchas qui ont touché le nord du
pays sont lancés sans « discrimination »* et en cela le Hezbollah est coupable de crimes de guerre, mais les récentes pluies
de katioushas étaient une réponse à un assaut frénétique sur le Liban. Cependant, pour une grande majorité des israéliens,
tous les katouishas sont la preuve que c'était une bonne chose, et nécessaire, ce que nous avons fait de détruire de nouveau
nos voisins : l'ennemi est effectivement très dangereux, c'est donc bien que nous soyons partis en guerre. La pensée devient
circulaire, et les prophéties s'accomplissent d'elles-mêmes. On trouve les israéliens disant : « Le Moyen Orient est une
jungle, ou seul la force parle. » Voir Qana, Gaza, ou Beyrouth.
Les défenseurs d'Israël et leurs dirigeants peuvent toujours avancer que les Us et la Grande Bretagne se comportent de la
même façon en Irak. (C'est vrai qu'Olmert et ces collègues n'airaient pas agi de façon aussi éhontée si les Us n'avaient pas
été derrière. Si Bush leur avait dit de s'abstenir de tirer, ils n'auraient pas osé bouger un seul tank). Mais il y a une
différence majeure. Les Us et la Grande Bretagne ont mené leur guerre en Irak sans le soutien de l'opinion publique. Israël a
mené sa guerre contre le Liban, avec le soutien écrasant des israéliens, inclus les membres de ce que le bureau de presse
européen appelle « le camp de la paix. »
Amos Oz, le 20 juillet, quand la destruction du Liban était déjà bien avancée, a écrit dans l' » Evening Standard » : « cette
fois, Israël n'envahit pas le Liban. Il se défend des harassements quotidiens et bombardements de nos villes et villages en
essayant d'écraser le Hezbollah où qu'il apparaisse. » Rien dans cet écrit qui ne soit différent des discours de l'état
israélien. David Grossman a écrit dans The Guardian, aussi le 20 juillet, comme s'il n'était pas au courant des bombardements
sur le Liban. : « il n'y a pas de justification pour une telle magnitude de violence que le Hezbollah a déclenché cette semaine
du territoire libanais sur des douzaines de villes et villages israéliens pacifiques. Aucun pays au monde ne pourrait rester
silencieux et abandonner ses citoyens quand les voisins frappent sans provocation. ». Nous pouvons bombarder mais s'ils
répondent ils sont à la fois responsables pour leur souffrance et la notre. Et c'est important de se rappeler que « notre
souffrance » est celle de pauvres gens dans le nord qui ne peuvent pas quitter leurs maisons facilement et rapidement. «
Notre souffrance » n'est pas celle due aux décideurs et à leurs amis dans les médias. Oz a aussi écrit qu'« il ne peut y avoir
d'équation morale entre le Hezbollah et Israël. Le Hezbollah vise les civils israéliens où qu'ils se trouvent, alors qu'Israël
vise essentiellement le Hezbollah ». A ce moment là, plus de 300 civils libanais avaient été tués et 600 blessés. Oz continuait
en disant : «le mouvement de la paix en Israël devrait soutenir la tentative d'Israël pour se défendre, purement et
simplement, tant que cette opération vise principalement le Hezbollah et épargne, autant que possible, les vies des civils
libanais (Ceci n'est pas toujours facile, car les lanceurs de roquettes du Hezbollah utilisent souvent les civils libanais comme
boucliers humains. »
La vérité qui se cache derrière cela c'est qu'Israël doit toujours être autorisé à faire comme cela lui plait même si cela
implique de marquer au fer rouge sa suprématie dans les corps des arabes. Cette suprématie est au-delà de toute discussion
et c'est simple jusqu'à la folie. Nous avons le droit d'enlever. Ils ne l'ont pas. Nous avons le droit d'arrêter. Ils ne l'ont pas.
Vous êtes des terroristes. Nous sommes vertueux. Nous sommes souverains. Vous ne l'êtes pas. Nous pouvons causer votre
ruine. Vous ne pouvez pas causer la notre, même lorsque vous
menez des représailles, parce que nous sommes liés à la nation la plus puissante sur la terre. Nous sommes des anges de la
mort.
Les libanais ne se souviendront pas de tout sur cette guerre. Combien d'atrocités une personne peut-elle garder en mémoire,
qu'elle impuissance peut elle ou il accepter, combien de massacres un peuple peut-il raconter à ses enfants, combien de
fuites sous la terreur de maisons qui brûlent, sans devenir l'esclave de la mémoire ? Un enfant devrait-il conserver un tract
de l'armée israélienne écrit en arabe, où il lui est demandé de quitter sa maison avant qu'elle ne soit bombardée ? Je ne
peux pas presser mes amis libanais de se souvenir de tous les crimes que mon pays et son armée ont commis au Liban.
Les israéliens cependant n'ont aucun droit d'oublier. Trop de gens ici ont soutenu cette guerre. Ce n'était pas seulement les
colons nationalistes religieux. C'est toujours facile de blâmer les suspects habituels, pour nos délits. Le bouc émissaire
qu'est le groupe de religieux fanatiques nous a permis d'ignorer le rôle de l'armée et de ses défenseurs au sein de la gauche
sioniste. Cette fois, nous avons vu combien les « modérés » ont épousé l'immodération, alors même qu'ils savaient, avant que
cela ne commence, que cela serait une guerre contre les banlieues et zones peuplées des villes, contre de petites villes et des
villages sans défense. Le modèle en était les actions récentes de notre armée à Gaza : Les modérés en Israël ont trouvé cela
parfaitement acceptable.
Cela a été une erreur pour ceux d'entre nous qui ont poussé un soupir de soulagement après que notre armée se soit retirée
du Liban en 2000. Nous pensions que le nom de Sabra et Chatila servirait à faire tout le travail de mémoire devant être fait,
et qu'ils se dressaient, métonymiquement, pour les crimes commis au Liban par Israël. Mais, avec le retrait de Gaza, beaucoup
d'israéliens qui devraient s'opposer à cette guerre ont commencé à penser d'Ariel Sharon, le génie de Sabra et Shatila, que
c'était un champion de la paix. La logique de l'unilatéralisme – que Sharon symbolisait- avait enfin prévalu : les israéliens
sont les seules personnes qui comptent au Moyen Orient, nous sommes les seuls qui méritent de vivre ici.
Cette fois, nous devons faire encore plus d'efforts pour essayer de nous souvenir. Nous devons nous souvenir des crimes
d'Olmert, et de notre ministre de la justice, Haim Ramon, qui s'est fait le champion de la destruction des villages libanais
après l'embuscade de Bint Jbeil, et nous devons nous souvenir de Dan Halutz. Leurs noms devraient être transmis à la Haye
afin qu'ils soient jugés.
Mer 23 Aoû - 0:46 par mihou