Les cours du poivre se redressent
Tous les dix ans, le prix du poivre flambe. C’est une constante qui se vérifie depuis trente ans. Sachant que le dernier pic a
été enregistré en 1997, on est en droit d’imaginer une envolée des cours pour 2007. L’agitation actuelle des marchés semble
d’ailleurs préfigurer ce mouvement de hausse. Indonésie, Malaisie ou Vietnam, toutes origines confondues, blanc comme noir,
tous les cours progressent d’une semaine à l’autre, de dix, cinquante voire une centaine de dollars. Pour l’instant rien de
spectaculaire, on est loin des 8 000 dollars la tonne atteint par le poivre blanc en 1997. Il vaut 2 850 dollars coût et fret
compris pour un embarquement depuis l’Indonésie. Et les traders se bousculent pour acheter car la disponibilité de la
marchandise est limitée.
La perspective d’une petite récolte indonésienne rend le marché nerveux. Cette information est connue depuis le début de
l’année mais comme l’explique un négociant, tant qu’un vendeur ne se retrouve pas en face d’un acheteur, il n’y a pas de prix,
donc pas de tension palpable. Pourtant le scénario est écrit depuis belle lurette. Après le firmament de 1997, les cours sont
retombés au plus bas. Une chute qui décourage la production, c’est le propre de tous les cycles baissiers. L’île de Bangka en
Indonésie, qui fournissait encore il y a cinq ou six ans 80% de la production mondiale de poivre blanc, a divisé ses volumes
par 10. On attend cette année au maximum 5 000 tonnes de cette région.
Le phénomène concerne aussi le poivre noir. En Indonésie, en Inde, au Brésil, en Malaisie, la production s’est étiolée, les
paysans passant à des cultures plus rémunératrices ou quittant leurs terres pour aller travailler à la mine. Un vide en grande
partie comblé par la montée en puissance du Vietnam. Après le café, ce pays s’est spécialisé dans le poivre pour devenir
l’incontestable premier producteur exportateur. Un premier rôle qu’il joue avec dextérité, ayant appris avec le robusta les
règles du commerce international. Il y a deux ans il a enregistré une récolte record qu'il est parvenu à écouler sans plomber
le marché. C’est à ce moment que le marché a commencé à réaliser que la situation pourrait s’inverser dans les prochains
années car malgré le dynamisme de l’offre vietnamienne, le niveau de la production baisse depuis quatre ans alors que la
demande s’améliore, notamment celle des Etats-Unis. Depuis, les industriels, qui avaient coutume de se couvrir pour trois ou
six mois, prennent les devants et se couvrent pour six à douze mois. Du coup l’offre se raréfie, ce qui complique la tâche des
courtiers. L’offre parvient encore à satisfaire la demande mais il faut compter avec la stratégie du plus gros producteur, le
Vietnam, pas toujours enclin à vendre ces précieux grains.
par Dominique Baillard
[26/07/2006]
http://www.rfi.fr/actufr/articles/079/article_45263.asp