Les choses semblent se précipiter concernant les enquêtes française et ivoirienne sur les événements de Bouaké de novembre 2004 :
L’AFP signalait il y a quelques jours que «l'avocat des parties civiles dans l'affaire du bombardement du camp français de Bouaké (Côte d'Ivoire) en novembre 2004 a demandé l'audition de la ministre de la Défense Michèle Alliot-Marie et du ministre de l'Intérieur de l'époque, Dominique de Villepin.
"On est dans une affaire criminelle avec des assassinats et des meurtres. On cache beaucoup d'élèments à la justice qui ne peut pas travailler", a expliqué samedi Me Balan.
"Je demande à ce que les autorités s'expriment pour expliquer pourquoi elles n'ont rien transmis d'essentiel à la justice et pourquoi la juge d'instruction a dû batailler pour obtenir des informations déterminantes", a-t-il ajouté.
Cette requête révélée samedi dans Le Parisien a été adressée à l'unique juge d'instruction du Tribunal aux armées de Paris Florence Michon "il y a deux semaines", a précisé l'avocat.
Outre la demande d'audition des deux ministres, Me Balan a également demandé que soient entendus le procureur du tribunal aux armées de Paris (TAP), Jacques Baillet et le chef d'état major des armées françaises, le général Henri Bentégeat, a-t-il indiqué.»
Parallèlement le procureur militaire ivoirien Ange Kessi a lancé un mandat d’arrêt international contre le Gal Matthias Doué, Chef d’Etat Major des Armées ivoiriennes de l’époque.
Il semble certain à présent qu’il y ait eu rétention d’information dans cette affaire. La question est : dans quel but ? Pour couvrir qui ? On se souvient de l’hypothèse de L’Express d’il y a quelques semaines : pour l’hebdomadaire français, la France aurait voulu couvrir Gbagbo ! Un problème toutefois : l’incohérence d’une telle attitude française, sachant que par ailleurs, on a tout fait pour le couler !
D’où la recherche d’autres explications dont l’hypothèse qu’émet Le Courrier l’Abidjan, et que je livre telle quelle :
«
Le bombardement de Bouaké commandité par Doué et ChiracLe Courrier d’Abidjan — Parution N° 732 du Mercredi 7 Juin 2006 — http://news.abidjan.net/presse/courrierabidjan.htm
Par Sylvie Kouamé :
Novembre 2004 - La piste la plus probable sur les événements de Bouaké, le 6 novembre 2004. A l’heure où l’avocat des parties civiles, en France, se plaint de la protection que l’Elysée a accordée aux Biélorusses accusés d’avoir bombardé le camp de Licorne, Ange Kessi nous apprend que des conversations secrètes avaient lieu entre Doué et ces assistants techniques de l’armée ivoirienne.
Le Courrier d’Abidjan l’écrivait hier, au sujet de la «sortie» de l’avocat des parties civiles du bombardement du camp français de Bouaké, qui accusait les autorités françaises de tout faire pour cacher la vérité au sujet de ce qui s’est vraiment passé ce fameux 6 novembre 2004. «Une grave affaire d’Etat va bientôt être révélée».
Les derniers propos du procureur militaire ivoirien Ange Kessy vont sans doute précipiter les choses. Il a déclaré à l’AFP qu’«une réquisition internationale a été lancée afin de retrouver le général Mathias Doué pour le faire comparaître».
Ange Kessi explique cette réquisition par le besoin d’élucider une «conversation sécrète» entre le général Mathias Doué et les pilotes biélorusses aux commandes des aéronefs de guerre ivoiriens qui ont bombardé le camp français.
«Le parquet militaire veut établir une liaison entre le fait que les pilotes biélorusses soient pris et relâchés et un certain nombre de conversations secrètes qu'il y a eu entre le général Doué et ces pilotes», a précisé Ange Kessi.
Ainsi, Mathias Doué avait eu des conversations secrètes avec les Biélorusses que le président français Jacques Chirac a aidé à faire disparaître dans la nature, alors qu’ils avaient été arrêtés d’abord par le général Henri Poncet, puis par le ministre togolais de l’intérieur d’alors, François Esso Boko. Les témoignages de ces Biélorusses n’ont pas été déclassifiés, malgré les demandes insistantes de la justice militaire française. Qui est-ce qu’ils mettraient donc en cause ? Assurément le président français. Dans ce cas, on comprend mieux pourquoi Paris a tout fait pour exfiltrer le général Mathias Doué après son limogeage en novembre 2004, après avoir échoué à le convaincre de renverser le président Gbagbo. On comprend mieux, de la même manière, pourquoi la boîte noire du Sukhoï incriminé n’a jamais été remise à la juge d’instruction militaire en France, malgré ses demandes répétées et sa lettre adressée à Henri Bentégeat, chef d’Etat-major des armées françaises, qui n’a pas hésité à répondre que l’avion avait été abattu en vol et que Licorne n’a pas pu entrer en possession de la boîte noire – un énorme mensonge !
En tout cas, selon nombre de ses proches, le président Gbagbo, qui passe et repasse dans sa tête un certain nombre d’informations en sa possession, est persuadé que certains assistants techniques biélorusses ont été retournés par Mathias Doué et les Français, afin de provoquer une bavure – seul moyen pour la France de stopper l’opération Dignité.
Que se passera-t-il maintenant ? Tout dépendra du pays dans lequel Mathias Doué se trouve actuellement, et de la bonne disponibilité de ses dirigeants à le remettre à la justice militaire ivoirienne. On peut également imaginer que l’avocat des parties civiles françaises, qui a déjà réclamé Dominique de Villepin et Michèle Alliot-Marie à la barre, en fasse de même pour l’ancien patron de l’armée ivoirienne. A moins que ce dernier ne se «suicide» opportunément dans son pays d’exil…