Abdel-Hakim BOUFRIOUA
Ancien Vice-Président du mouvement REPERES
http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=8420
JE SUIS ANTISIONISTE
Le vocabulaire est explicite : l'antisionisme découle du sionisme, et non l'inverse.
Il faut donc comprendre le sionisme, pour comprendre l'antisionisme. Examinons cela de plus près.
Le sionisme actuel comprend trois systèmes successifs et emboîtés.
Au cœur, se trouve le sionisme d'Herzl : mouvement d'émancipation nationale du peuple Juif, se retrouvant dans un Etat : l'Etat des Juifs. Ce premier sionisme a d'entrée de jeu, à la fin du XIXe siècle, engendré les premiers antisionistes : d'une part tous ceux qui mettaient en doute l'existence d'un peuple Juif, d'autre part tous ceux qui n'étaient pas partisans de la création d'un Etat, mais qui préféraient la voie de l'intégration. Antisionismes de première espèce : « opposition au concept d'un Etat des Juifs »
Un deuxième sionisme s'est emboîté autour du premier, dès lors qu'une localisation précise a été choisie : la Palestine, et que les modalités d'appropriation de ce territoire au profit des Juifs se sont précisées. Ce second sionisme, dans son exécution, a montré les limites du premier : ce ne sont pas tous les Juifs qui ont désiré venir s'établir en Palestine. Aussi, au fil des ans, le deuxième sionisme (Palestine, Etat des juifs), s'est-il mué en un deuxième sionisme amoindri (Palestine, Etat pour les juifs). Ce second sionisme, même amoindri, a engendré un antisionisme de seconde espèce, recrutant d'une part chez les Palestiniens de souche qui se sont vus spoliés, d'autre part chez tous ceux qui s'en sont indignés. Antisionisme de seconde espèce : « opposition à la spoliation des Palestiniens ».
Un troisième sionisme s'est emboîté autour du second, visant à contrer l'antisionisme de seconde espèce, en justifiant par des raisons supérieures et divines la présence des Juifs en Palestine (rebaptisée Israël, à cette fin) et rejetant, par principe, toute légitimité à la présence de non-juifs sur le terrain, et même au débat. La négation du droit au retour, et même de l'existence de Palestiniens de souche, fait partie de ce système. Ce troisième sionisme a engendré un antisionisme de troisième espèce, réunissant tous ceux qui s'indignent des entorses aux principes même des droits de l'homme et du négationnisme historique qu'il implique. Antisionisme de troisième espèce : « défense des droits de l'homme contre l'idée qu'il existerait des droits d'ordre supérieur, pour certains ».
Il est remarquable de constater que le premier sionisme est un échec complet : l'Etat des Juifs ne sera pas instauré, l'intégration fonctionne pour la majorité de la diaspora. Aussi l'antisionisme de première espèce, le seul sur lequel des soupçons d'antisémitisme auraient pu porter, est-il éteint.
Le second sionisme, celui de la création et de la pérennisation d'un Israël purement juif par la seule force, est à la peine, l'affrontement sur le terrain est terrible et tragique. La paix ne semble pas pour demain. Personnellement, je suis un opposant de ce sionisme que je considère comme injuste : je suis un antisioniste de seconde espèce.
Le troisième sionisme, celui d'un caractère divin, surhumain et exceptionnel d'Israël, justifiant révisionnisme et atteinte aux droits des personnes humaines, est tellement en contradiction avec toutes les normes internationales qu'on ne peut que prédire son effondrement. Au nom de la défense des droits de l'homme, et de la raison, je suis un antisioniste de troisième espèce.
Mercredi 10 Mai 2006
Source :
http://www.alterinfo.net