Mon antisionisme
Je m’oppose à l’idéologie sioniste parce que la création, en Palestine, d’un « Etat-refuge » pour les Juifs du monde entier s’est faite aux dépens du peuple palestinien alors que, dans les faits, l’existence de cet Etat ne met absolument pas les Juifs, qu’ils soient israéliens ou non, à l’abri des persécutions antisémites.
Je m’y oppose aussi parce que sa seule réponse à l’antisémitisme est le repli sur soi, concrétisé par l’appel au « retour » de tous les Juifs en « Terre promise ». Cette position s’accorde parfaitement aux discours xénophobes prônant le « chacun chez soi ».
Je ne suis pas opposé à l’existence de l’Etat d’Israël mais partisan de sa « désionisation ». Ceci implique qu’il renonce à être l’Etat des Juifs du monde entier pour devenir, comme toute démocratie digne de ce nom, un Etat traitant tous ses citoyens de la même manière.
Si je combats l’idéologie sioniste c’est parce qu’elle sert à justifier une politique contraire aux Droits de l’Homme qui a provoqué et aggrave sans cesse l’interminable malheur du peuple palestinien tout en conduisant à terme le peuple juif israélien tout droit vers l’abîme.
Michel Staszewski janvier 2006
[1] Ce ne fut pas toujours le cas. A l’époque de la décadence de l’Empire romain, le judaïsme se trouva en concurrence avec le christianisme mais aussi avec l’arianisme et le culte de Mithra. D’après Pierre Stambul (« Judaïsme : retour à quelle identité ?, conférence donnée à Marseille le 16 mai 2003, http://www.bibliotheque-sonore.org/... - n’est plus activée [ndp]), il y eut également un mouvement non négligeable de conversions au judaïsme en Afrique du Nord, en Espagne et, plus tard au sein d’un peuple turc, les Khazars.
[2] Consistoires : organismes, généralement reconnus par les pouvoirs publics, chargés de gérer les affaires religieuses.
[3] En Belgique, par exemple, une ordonnance allemande du 28 octobre 1940 déterminait qui était considéré comme juif de la manière suivante :
1. "Est Juif, toute personne issue d’au moins trois grands-parents de race juive.
2. Est regardée comme Juif, toute personne issue de deux grands parents juifs si elle :
- a) adhère au moment de l’entrée en vigueur de la présente ordonnance au culte juif ou y affecte son adhésion ultérieurement ou
- b) si son conjoint est Juif ou si elle contracte mariage avec un Juif ultérieurement.
3. Dans les cas de doute, est regardée comme Juif toute personne adhérant ou ayant adhéré au culte juif. Un grand-parent est regardé, sans condition ni réserve, comme Juif, lorsqu’il a adhéré au culte juif. " (GERARD-LIBOIS, J. et GOTOVITCH, J., L’An 40. La Belgique occupée, CRISP, Bruxelles, 1971, p. 460). Voir aussi, sur ce sujet, STEINBERG, M., L’Etoile et le fusil. La question juive 1940-1942, Vie Ouvrière, Bruxelles, 1983, en particulier les pages 65 à 67.
[4] Le Nouveau Petit Robert, Paris, 1995, p. 2096.
[5] CHARBIT, D., Sionismes. Textes fondamentaux, Albin Michel/Menorah, Paris 1998.
[6] Eretz Israël : « Terre d’Israël » ou « Pays d’Israël » : Ce terme couvre tous les territoires qui ont à un moment ou l’autre fait partie d’un des Royaumes juifs à l’époque du Premier et du Second Temple, c’est-à-dire en plus de la Palestine, une partie importante de l’actuelle Jordanie. Aujourd’hui, rares sont cependant les sionistes qui revendiquent encore l’ensemble de ces territoires.
[7] CHARBIT, D., op. cit., pp. II-III.
[8] Il en est de même pour le Petit Larousse et pour le Littré.
[9] Article 6 du programme de l’O.L.P. de janvier 1969, cité in PICAUDOU, N., Les Palestiniens. Un siècle d’histoire, Editions Complexe, 2003, p. 152.
[10] 02<- Ibidem.
[11] Torah : nom hébreu du Pentateuque, ensemble des cinq premiers livres de la Bible et base principale de la religion juive.
[12] Cf. RABKIN, Y. M., Au nom de la Torah. Une histoire de l’opposition juive au sionisme, Les Presses de l’Université de Laval, 2004.
[13] Ibidem, pp. 245-246.
[14] En 1894, le capitaine Alfred Dreyfus, issue d’une famille juive alsacienne, fut injustement condamné à la déportation pour haute trahison par un tribunal militaire. Il apparut rapidement qu’il était innocent mais il ne sera réhabilité qu’en 1906. Une des causes principales de ce déni de justice fut assurément l’antisémitisme virulent régnant dans l’opinion publique française à cette époque.
[15] Diaspora (mot d’origine grecque) : dispersion à travers le monde antique des Juifs exilés de leur pays d’origine ; par extension : dispersion d’une communauté à travers le monde ; ensemble des membres dispersés.
[16] En 70 après J.C., après la chute de Jérusalem, un important groupe de révoltés juifs se réfugièrent dans la forteresse de Massada bâtie sur un éperon rocheux dominant la rive ouest de la Mer morte. Après avoir défié les armées romaines durant plus de deux années, sur le point d’être vaincus, les derniers combattants juifs et leurs familles se suicidèrent plutôt que de se rendre.
[17] « Le Septième Million traite de la manière dont les amères vicissitudes du passé continuent à modeler la vie d’une nation. Si le Génocide a imposé une identité collective posthume à six millions de victimes, il a aussi façonné l’identité collective de ce nouveau pays, non seulement pour les survivants arrivés après la guerre, mais pour l’ensemble des Israéliens, aujourd’hui comme hier. » (Tom SEGEV, Le Septième Million, Editions Liana Levi, Paris, 1993, p. 19). Dans son livre La Nation et la mort. La Shoah dans le discours et la politique d’Israël (La Découverte, Paris, 2004), l’historienne israélienne Idith ZERTAL, confirme les thèses défendues par Tom Segev.
[18] Notons toutefois que l’enquête n’est pas clause et qu’à ce jour l’auteur du coup de couteau n’a pas été arrêté.
[19] Mais l’Union des Progressistes Juifs de Belgique (U.P.J.B.), seule association juive de ce pays refusant toute allégeance à l’Etat d’Israël, pour cette raison, n’en fait pas partie.
[20] 03<- Cf. les déclarations en ce sens du Président iranien Mahmoud Ahmadinejad.
[21] La traduction exacte du titre original, Der Judenstaat donné par Herzl à l’ouvrage qui fut à la base du projet politique sioniste n’est pas L’Etat juif mais bien L’Etat des Juifs. C’est une nuance non négligeable car cela laisse entendre que cet Etat devait être celui de tous les Juifs du monde et non pas seulement de certains d’entre eux.
[22] WARSCHAWSKI, M. A tombeau ouvert. La crise de la société israélienne, La Fabrique, Paris, 2003, p. 103
[23] CHARBIT, D., Le sionisme et les Palestiniens, in U.E.J.F., Le sionisme expliqué à nos potes, Editions de la Martinière, s.l., 2003, p. 150.
[24] « Ligne verte » : seule frontière reconnue internationalement, depuis les accords d’armistice de 1949, entre l’Etat d’Israël et la Cisjordanie. Elle a été respectée par l’Etat d’Israël jusqu’au 4 juin 1967, date à laquelle a commencé la « Guerre des Six Jours ». A l’issue de celle-ci, toute la Cisjordanie fut occupée par Israël, ainsi que la bande de Gaza, le plateau syrien du Golan et le désert égyptien du Sinaï.
[25] Je me permets ici l’usage de guillemets parce que ce mot de « gauche » n’a pas le même sens en Israël qu’en Europe : on verrait mal, en Europe, des partis de gauche soutenir une politique ségrégationniste et prôner la séparation physique entre ethnies
[26] L’« Accord de Genève » fut signé à Genève le 1er décembre 2003. Ses principaux artisans en étaient l’ancien ministre israélien Yossi Beilin et l’ancien ministre palestinien Yasser Abed Rabbo. Il s’agit d’une initiative privée n’engageant pas les autorités officielles. Pour une lecture critique de ce plan de paix : STASZEWSKI, M., « L’Initiative de Genève : une chance pour la paix ? » in Points Critiques (mensuel de l’Union des Progressistes Juifs de Belgique) n° 242, janvier 2004, pp. 23 à 25.
[27] Cf. ZERTAL, I., La Nation et la Mort ..., op. cit.
[28] Cf. SHAHAK, I., Le Racisme de l’Etat d’Israël, Ed. Guy Authier, Paris, 1975.
[29] Extrait des statuts de Brit Shalom (rédigés en 1925), cité in ARON, J., Le sionisme n’est pas le judaïsme. Essai sur le destin d’Israël, Didier Devillez, Bruxelles, 2003, p. 151.
[30] 04<- L’obsession démographique a récemment amené le parlement israélien à amender la loi sur la citoyenneté et l’entrée en Israël en créant trois filières séparées d’acquisition de la citoyenneté en Israël : la filière pour les Juifs, la filière pour les Arabes, et la filière pour les « étrangers ». La filière arabe n’impose pas seulement une procédure échelonnée sur des années, comme pour les « étrangers », mais elle interdit, avec des exceptions des plus réduites, l’unification des familles quand un des conjoints est arabe palestinien et réside dans les territoires occupés. Par contre, la filière juive offre à tout Juif d’acquérir la citoyenneté israélienne d’une manière automatique, conformément à la « Loi du Retour ». Cette loi, votée par le parlement israélien le 27/7/2005, a été condamnée publiquement dès le lendemain par Amnesty International, pour son caractère discriminatoire. Un article récent offre un large aperçu des discriminations dont les Arabes israéliens sont victimes : ALGAZY, J., « Le traumatisme persistant des Arabes israéliens », in Le Monde Diplomatique, octobre 2005, pp. 16-17.
[31] Lire, à ce sujet, « La Palestine sous la botte » (in Revue d’Etudes Palestiniennes n° 83, printemps 2002, pp. 3-19) ; la journaliste israélienne Amira HASS y décrit en détails l’évolution de la politique de « bouclage » des territoires palestiniens et ses conséquences de plus en plus dramatiques pour leurs habitants, depuis ses débuts en 1991.
[32] Cf., par exemple, VIDAL, D., Le péché originel d’Israël. L’expulsion des Palestiniens revisitée par les « nouveaux historiens » israéliens, Editions de l’Atelier / Editions Ouvrières, Paris-Bruxelles, 1998 et GRESH, A. Israël, Palestine. Vérités sur un conflit, Fayard, Paris, 2001, pp. 102-103.
professeur d’histoire dans le secondaire, membre de l’Union des Progressistes Juifs de Belgique, co-auteur du "Manifeste pour un juste règlement du conflit israélo-palestinien. Des Juifs de Belgique s’impliquent et s’expliquent." (décembre 2000 - voir http://www.israel-palestine.be)
mel : michel.staszewski@skynet.be
Article (janvier 2006) paru dans Les Cahiers du Libre Examen, revue du Cercle du Libre Examen de l’Université Libre de Bruxelles n° 43 - mars 2006, pp. 15 à 34.
http://www.france-palestine.org/article3524.html