«prima inter pares»
Il y a comme un air de campagne électorale en France en ce moment. Une sorte d'agitation frénétique, d'accélération du
mouvement qui donne l'impression que l'élection présidentielle, c'est déjà demain, ou alors très bientôt; dans tous les cas pas
si loin que ça dans le temps. Un peu comme si on n'allait pas attendre 365 jours pour voter. Un peu comme s'il allait y avoir
une scrutin anticipé. Une démission de Jacques Chirac qui, pour les raisons que l'on sait, jetterait le gant avant terme après
11 années passées à l'Elysée.
C'est, paradoxalement, le rêve de certains dans la majorité. Mais, pas celui des responsables du Parti Socialiste qui, s'ils ont
demandé et demandent toujours le départ de Dominique de Villepin, ne considèrent pas que le moment est venu pour une
confrontation nationale. Trop de boulot à faire. Il faut finir la rédaction du projet. Il faut désigner le candidat. Il faut
trouver une dynamique de victoire. Et surtout, il faut convaincre les Français qu'hors de la gauche pas de salut possible, ce
dont ils ne sont pas persuadés, du moins si l'on en croit les sondages.
Bref, il faut bosser. Bosser encore et toujours, comme si la vie en dépendait, comme si le monde venait de naître. Et non pas
se déchirer, ce qui est devenu une spécialité de nos élus.
A croire qu'ils pensent que la politique se résume uniquement à un concours qui servirait à désigner la plus belle d'entre
toutes ainsi que l'ont méchamment fait remarquer certains. A qualifier le moins médiocre, ce qui est une maigre consolation.
Ou tout simplement à confirmer ce que disent déjà les sondages : dans le cas présent, que demain nous aurons un deuxième
tour avec Sarkozy et Royal.
Un face à face annoncé depuis plusieurs mois, ce qui a le don de faire bondir dans les états-majors. Nicolas Sarkozy en qui
la gauche feind de voir un agité et un dangereux extrêmiste. Ségolène Royal à qui le New York Times trouve un air d'Audrey
Hepburn, ce qui suffirait presque pour l'expédier à l'Elysée, pour en faire la «prima inter pares», c'est dire avec quels yeux
nos amis américains nous observent... Mais, plus sérieusement, le New York Times cite tout de même Alain Touraine, le
sociologue, et son affirmation selon laquelle voter pour une femme, c'est affirmer symboliquement que vous voulez vous
débarrasser des autres parce que le système est trop masculin...
N'en déplaise à messieurs Fabius, Strauss-Khan et Lang, il faudra soit faire avec Ségolène Royal pendant au moins 365
jours, ou un peu moins ou beaucoup plus si elle est désignée. Soit convaincre qu'elle n'est pas à sa place dans la course
présidentielle ce qui risque de s'avèrer une entreprise plus difficile, car Ségolène Royal a bien compris qu'on ne revendique
rien aujourd'hui, mais que l'on prend tout simplement. Donc elle a décidé de prendre...
par Patrice Biancone
http://www.rfi.fr/actufr/articles/077/article_44054.asp