Race
Groupe humain qui serait distinct des autres par des
caractéristiques biologiques particulières. Le mot race n'est plus
de mise aujourd'hui dans les sciences. A posteriori, on a baptisé
racialisme, la croyance persistante en l'existence de races.
Pendant longtemps, on a cru que l'humanité avait été divisée en
quatre races de différentes couleurs qui n'auraient connu les
métissages que de façon accidentelle et relativement récente.
« (...) dans les années soixante-dix , l'accumulation de données a
permis de mesurer à grande échelle ce qu'on appelle la diversité
générale entre de grands groupes de population correspondant aux
races de l'anthropométrie classique. Le résultat montrait que la
quasi-totalité de ces gènes (85 %) étaient présents dans tous les
groupes, dans des proportions variables. C'est pourquoi on dit
aujourd'hui que la variabilité générale est plus grande à
l'intérieur des « races » qu'entre elles.
Pourquoi parler d'une « race » caucasienne, mongole ou juive, si la
diversité biologique y est aussi grande que dans n'importe quel
échantillon de popnlation pris au hasard sur la planète ? Il est
parfaitement possible aujourd'hui d'étudier les variations
génétiques entre des groupes humains pour en reconstituer l'histoire
lointaine, par exemple, comme le fait Luca Cavalli-Sfotza - sans
faire appel à l'idée qu'ai jamais existé une race ou un type pur de
ces groupes. Bien sûr, il peut arriver que la fréquence élevée d'un
marqueur coïncide plus ou moins avec une aire linguistique (Basques)
ou culturelle (Amérindiens) : appellera-t-on cette population une
race ? La plupart des anthropo-biologistes s'abstiennent, car ils ne
considèrent pas ces marques comme des propriétés éternelles des
populations qu'ils étudient, mais comme le produit d'une évolution :
ce sont des étiquettes léguées par le passé biologique, sans autre
signification. Certains sont carrément opposés à la notion, afin de
bien se démarquer de l'anthropologie raciale. D'autres conviennent
que le mot race peut être employé dans un sens neutre, pour désigner
des groupes humains partageant des traits d'adaptation au milieu,
comme la couleur de la peau.
Bien entendu, aucune de ces considérations n'empêchera personne de
penser que la Terre est peuplée de Blancs, de Jaunes et de Noirs.
Tous les peuples du monde disposent de stéréotypes pour nommer les
étrangers, et leur usage péjoratif traduit une forme répandue
d'arrogance. Toutefois, l'anthropologie raciale porte la lourde
responsabilité d'avoir produit ce que Pierre-André Taguieff appelle
le « racialisme », qui cautionne scientifiquement la division de
l'humanité en variétés biologiquement distinctes, inégales en
performances culturelles et profondément étrangères l'une à l'autre.
On peut aussi l'accuser d'avoir incité à la recherche d'un type «
pur », à l' eugénisme et à la détestation du mélange. Il y a un
rapport direct entre le racialisme, l'impérialisme politique de
l'Occident et la théorisation du racisme en Europe. Le discrédit
actuel jeté sur le mot « race » en français n'est, après tout, qu'un
juste retour de balancier.
Si la catégorie de race représente un concept malheureux de
l'anthropologie, son utilisation à d'autres fins que la taxinomie
scientifique est significatif de sa vocation profonde : celle
d'exprimer les différences culturelles perçues par un groupe
dominant ou conventionnellement admises dans une société donnée.
L'exemple des Etats-Unis est parlant : les statistiques officielles
utilisent des catégories raciales (Aborigènes américains,
Caucasiens, Asiatiques, Hispaniques et Afroaméricains), qui
reflètent l'existence de formes de ségrégation et de communitarisme
culturel. L'assignation à un groupe résulte d'ailleurs des
déclarations des intéressés. La persistance de cet usage motive la
longévité de l'intérêt pour les races dans certains secteurs de la
communauté scientifique américaine, comme en térnoignent les
recherches sur les différences de QI entre les Blancs, les Noirs et
les Asiatiques. Certains anthropologues, plutôt opposés aux
conceptions héréditaristes, suggèrent de garder le mot, mais en lui
donnant un autre sens : celui d'ethnie ou de minorité culturelle.
Bref, du fait qu'il est susceptible de recevoix toute sorte de
contenus, faute d'en avoir un précis, ce concept a la vie dure, et
son usage est difficilement neutre. »
Nicolas Journet, « La notion de race », Sciences Humaines, n°103,
mars 2000.
Lire : Luca et Francesco Cavalli-Sforza, Qui sommes-nous ? Une
histoire de la diversité humaine, Albin Michel, 1994
Alberto Piazza, « Un concept sans fondement biologique », La
Recherche, octobre 1997.
Racialisme
Croyance persistante en l'existence de races. Le terme est
fréquemment employé par Pierre-André Taguieff et repris après lui
par les sciences humaines. Un lecteur anonyme de L'Union a récemment
dénoncé l'emploi de néologismes qui ne figurent pas dans le
dictionnaire. On lui répondra que les termes scientifiques sont
rarement dans le dictionnaire courant.
La législation antiraciste entretient elle même une certaine
ambiguïté maladroite sur la notion de race employé dans une
constitution et dans une législation qui refusent le racisme tout en
admettant l'existence de races. Le sentiment de cette ambiguïté se
traduit également dans les expressions trouvées dans les documents
produits par des magistrats ayant participé aux testings : "
personne de type européen supposé ".
Le fait de désigner une personne comme étant de telle ou telle race
plutôt que simplement de telle ou telle couleur est une marque de
racialisme. Le fait de désigner des gens par leur couleur, quand
l'information ne s'impose pas à la compréhension d'un récit peut
être également considéré comme racialiste. Le fait pour quelqu'un de
voir un noir ou un blanc, plutôt que simplement des gens traduit une
conception racialiste du monde. Il en va ainsi du journaliste
métropolitain qui désigne un automobiliste comme un automobiliste de
race noire alors que l'information ne s'impose pas. Idem pour le
celui qui rapporte une catastrophe aérienne en opérant un comptage
des corps repêchés divisés en trois catégories : métis, blancs et
noirs. Idem pour les contribuables de telle commune campagnarde
guadeloupéenne qui désignent l'une des fonctionnaires de la
Perception municipale comme " la blanche ", plutôt que comme Madame
Untel.
Cf Races
Racisés
Expression employée par Ariane Chebel d'Appolonia pour tenter de
désigner les victimes potentiels du racisme. On peut ajouter que les
caractéristiques des racisés changent selon la société. Si en
France, le racisé est plutôt d'origine africaine, antillaise ou
nord-africaine, le blanc métropolitain devient à son tour un racisé
lorsqu'il arrive en Guadeloupe.
Racisme
Idée qui, ajoutée à celle qu'il existe des races (racialisme),
postule que celles-ci peuvent être classées selon une hiérarchie des
aptitudes. Si les idées racistes s'expriment en général avec
hostilité, il ne faut pas sous-estimer la portée et les implications
de croyances populaires comme par exemple celle qui postule que,
pour des raisons héréditaires, c'est à dire biologiques et non
culturelles, les noirs danseraient mieux que les blancs. On peut
pourtant élever un petit Martiniquais dans une famille suédoise en
Suède. Il risque d'avoir plus de mal à danser le zouk qu'un Suédois
élevé en Martinique dans une famille martiniquaise...
« Dans un ouvrage récent, Pierre-André Taguieff présente une
typologie des différentes interprétations qui ont été données du
racisme. Deux grandes thèses contradictoires peuvent être
distinguées.
Le racisme est :
- soit un phénomène inhérent à la nature humaine, c'est ce que
suggérent des auteurs comme le paléontologue Stephen Jay Gould ou
l'historien Joel Kovel, qui considèrent que la haine raciale est
présente depuis la nuit des temps au sein de l'espèce humaine;
- soit un phénoméne moderne d'origine européenne. Le généticien
William David Hamilton avance même l'hypothèse d'une base génétique
de la discrimination raciale. Théorie qui présente elle-même trois
variantes :
· le racisme est le successeur immédiat des classifications des
races humaines élaborées par les premiers
naturalistes-anthropologues (Linné, Buffon, Blumenbach, etc.) ;
· le racisme est un terme qui désigne, au sens restreint, la
doctrine du déterminisme racial des aptitudes et des conduites,
censée donner un fondement scientifique la thése de l'inégalité des
races hurnaines (Gobineau, etc.) ;
· le racisme est la continuation de formes de " protoracisme "
apparues aux débuts de l'âge occidental moderne, où la référence à
la race traduisait les hiérarchies sociales. Ces modèles de
protoracisme sont les suivants : le mythe du " sang pur " dans
l'Espagne et le Portugal des XVe et XVIe siècles ;
les légitimations européennes, par la couleur de la peau, de
l'esclavagisme et de la colonisation ;
la doctrine aristocratique française dite des deux " races "("
Gaulois " et " Germains ") où le mot race signifie " lignage ". »
Repris de « Qu'est-ce que le racisme ? », Sciences humaines, n°81,
mars 1998,
d'après Pierre-André Taguieff, Le Racisme, Flammarion, 1997.
Wuilhelm, Charlie Hebdo, mercredi 19 février 1997 + les Racisme à
l'envers / racisme à rebours
Mot employé dans le langage courant pour désigner un racisme
antiblanc ou antifrançais comme si on pouvait opérer une distinction
entre différents types de racismes. S'il y a effectivement
différents types de manifestations de racisme, il n'y a qu'un seul
racisme. Il n'a donc par conséquent jamais existé de racisme à
rebours.Pancho, Le Monde, mardi 18 avril 2000
Le concept de racisme à rebours est en fait utilisé et dilué dans le
langage courant par le discours raciste. Il l'est depuis que,
comprenant qu'elles ne pouvaient plus paraître s'opposer aux lois
antiracistes, les organisations racistes, ont au début des années
80, décidé de les utiliser en dénonçant à leur tour le racisme
anti-français.
Alors que l'antiracisme exclut tout type de manifestation raciste et
intègre parfaitement la dénonciation d'une manifestation raciste
d'un individu noir à l'encontre d'un individu blanc, le discours
raciste ne voit dans l'antiracisme qu'une revendication catégorielle
de non-blancs contre des Français blancs. Il est d'ailleurs
significatif que chez des gens qui se défendent d'être racistes,
pointent fréquemment un sentiment d'animosité à l'endroit de
l'antiracisme. Comment peut-on être opposé à la dénonciation du
racisme tout en se défendant d'être raciste ?
Il est clair que quand un patron de discothèque ou un parti
politique dénoncent les méthodes des antiracistes, le discours est
d'autant plus virulent qu'il est impossible de clamer ouvertement
que la dénonciation du racisme revêt pour eux la dimension d'une
intolérable obscénité.
Rastafarianisme
Philosophie largement inspirée de la rhétorique biblique et élaborée
au début du siècle par le Jamaïcain Marcus Garvey. Postulant que
tous les noirs devaient retourner vers la terre promise : leur mère
l'Afrique. Garvey décida que le ras tafari, Haïlé Sélassié, futur
empereur d'Ethiopie (1931-1975), alors un des rares chefs d'Etats
noirs, était un dieu vivant pour tous les hommes noirs du monde.
Ayant émigré aux Etats-Unis, Garvey acheta un navire destiné à
ramener les gens noirs en Afrique et pris même contact avec le
Klu-Klux-Klan compte tenu d'une certaine communauté d'objectifs. Il
participa aux Etats-Unis et en France (1921) à des congrès qui
visaient à défendre la " Race Noire ". Ses théories furent rejetées
par Blaise Diagne et Gratien Candace, lesquels avaient fort à faire,
entre leur foi en la France coloniale et la discrimination qui y
était de mise.
Le chanteur jamaïcain Bob Marley lui même fils d'un officier
britannique et d'une Jamaïquaine, contribua à répandre et peut être
à édulcorer ce qui au, départ n'était qu'une nouvelle théorie
raciste. Le succès du rastafarianisme ou rastafarisme peut témoigner
du traumatisme de l'esclavage sur plusieurs générations de
descendants d'Africains déportés pendant quatre siècles.
Lun 22 Mai - 12:45 par mihou