Bienvenue à Erez
Gruda, Agnès
Il y a 10 ans, Erez était un point de passage grouillant de vie, où des marchands de bananes et de pistaches vantaient leur marchandise dans le bruit des klaxons des taxis.
D'attentat en attentat, les mesures de sécurité ont été resserrées. Le passage entre Gaza et Israël a été élargi d'une sorte de no man's land d'environ 800 mètres qui, il y a encore trois ans, séparait Palestiniens et étrangers.
Les premiers traversaient le passage dans un couloir bordé d'une clôture de métal. Les seconds marchaient sur une surface asphaltée large comme une autoroute. C'est l'image que j'avais gardée de mon dernier passage, il y a trois ans: celle d'une autoroute de béton longée par une sorte d'enclos réservé aux " autochtones ".
Cette séparation n'existe plus, sans doute parce que les Palestiniens qui peuvent circuler entre Israël et Gaza ne sont pas assez nombreux. Tous doivent marcher dans un seul et même couloir, où l'on a aménagé plusieurs grilles métalliques. Parfois, on doit attendre plusieurs minutes avant que la grille ne s'écarte.
Au retour de Gaza, après avoir traversé deux détecteurs de métal, on pénètre dans un cylindre transparent; des traces au sol nous indiquent où placer les pieds. " Mains en l'air ", ordonne une voix venue d'on ne sait où. Pardon? Le temps de comprendre, la porte se referme sur nous et un lecteur ultramoderne- un scanner?- fait en grinçant le tour de notre corps à la recherche d'objets suspects.
De station en station, on ne voit jamais personne. Une voix sans visage nous ordonne de placer notre sac, ou de le reprendre, ou encore de vider nos poches.
Et ce n'est pas fini: un véritable terminal qui, de l'extérieur, a des allures d'aérogare, est en construction à la sortie de Gaza. L'affiche qui, à notre arrivée, nous souhaite " Bienvenue à Erez " sonne presque comme une mauvaise blague.