Le participe passé des verbes pronominaux
Roux, Paul
Quelle est la règle à suivre pour l'accord des participes passés des verbes pronominaux? On m'a expliqué qu'il faut distinguer entre les verbes qui sont toujours employés à la forme pronominale et ceux qui le sont à l'occasion. Pourtant, j'ai l'impression que cette règle n'est pas totalement claire. Pouvez-vous m'aider? - Louis Samson
Réglons d'abord le cas le plus facile, celui des verbes qui sont toujours pronominaux: se suicider, s'évanouir, s'enfuir, etc. Le participe passé de ces verbes s'accorde toujours avec le sujet du verbe, à l'exception du participe passé de s'arroger.
Elles se sont évanouies, elles se sont enfuies, etc.
C'est que le sujet de ces verbes désigne le même acteur que le pronom réfléchi se.
Dans le cas du participe passé des verbes occasionnellement pronominaux, la façon la plus simple de procéder est de remplacer (mentalement) l'auxiliaire être par l'auxiliaire avoir et de se demander si le pronom se est complément d'objet direct.
Elles se sont retrouvées.
C'est-à-dire: elles ont retrouvé qui? Elles.
En revanche, on écrira:
Elles se sont succédé.
C'est-à-dire: elles ont succédé à qui? À elles.
Le participe passé des verbes transitifs indirects employés pronominalement est toujours invariable.
Ils se sont plu à jouer ensemble.
Ces quelques règles permettent de résoudre la presque totalité des cas. Cela dit, je sais bien qu'elles ne sont pas simples, mais j'espère qu'elles seront un peu plus claires.
Olympiques ou olympiades?
L'utilisation du termeolympiquecomme nom est-elle correcte? Ne faut-il pas direles olympiadesoules jeux olympiques, lesinstallations olympiques, etc., et non pas lesolympiques?
Qu'en pensez-vous?
- André Malouin
Le terme olympique est un adjectif, non un substantif. On ne peut donc parler des Olympiques. On peut par contre employer la locution Jeux olympiques ou le mot olympiades (au singulier, olympiade désigne la période de quatre ans entre deux jeux olympiques).
Les Jeux olympiques auront lieu à Athènes cet été.
Il s'entraîne pour les olympiades.
Par ailleurs, il est préférable d'écrire Jeux olympiques plutôt que jeux Olympiques, car l'usage veut qu'on écrive les noms des grandes manifestations sportives, commerciales ou artistiques avec une majuscule initiale au premier substantif. Quant à l'adjectif, il ne prend une capitale que s'il précède le premier substantif.
Une après-midi?
Après m'être fait dire et redire à l'école, que c'est UN après-midi et non pas UNE après-midi que l'on dit, voilà que j'apprends que les deux termes sont acceptés. Est-ce bien vrai?
- Francine Sanscartier, Piedmont
Le mot après-midi était féminin jusqu'à la septième édition du Dictionnaire de l'Académie, qui date tout de même de 1878. Aujourd'hui, le féminin est très rare, sauf peut-être au Québec. Compte tenu de l'usage contemporain, le masculin est nettement préférable.
Faire du sens
On entend souvent dans la bouche de nos compatriotes l'expression " faire du sens ". J'ai toujours cru que c'était une forme fautive de " avoir du sens ", calquée de l'anglais " to make sense ". Il me semble qu'on devrait dire: " Cette histoire n'a pas de sens " plutôt que " ne fait pas de sens ".
Or, quelle ne fut pas ma surprise, il y a quelques mois, de lire sous la plume de Maurice Druon dansLes Rois maudits: " Il savait bien que cela ne faisait pas de sens. " Tout de même... Maurice Druon, de l'Académie française... Par la suite, il m'est arrivé de l'entendre dans la bouche de certains Français à TV5. Serait-ce que cette expression est française après tout?
- Normand Lefebvre
Le fait que cette locution est employée en France ne la rend pas plus française. Faire du sens est bel et bien un calque de to make sense. En français correct, il faut plutôt dire d'une chose qu'elle a du sens ou qu'elle n'a pas de sens, qu'elle est logique ou illogique, qu'elle est sensée ou insensée, qu'elle est intelligible ou inintelligible, qu'elle a du bon sens ou qu'elle est sans bon sens.
J'ai écouté ses explications; cela avait du sens.
En revanche, la locution faire sens est tout à fait française, mais elle est rare et un peu littéraire.
À travers le monde
Il me semble qu'en français on ne peut utiliser l'expressionà traversdans le sens géographique. Nos journalistes (même àLa Presse), animateurs, chroniqueurs, lecteurs de nouvelles, etc., nous servent abondamment duà travers le Québec, le Canada, l'Amérique du Nord, l'Europe, le monde... au sujet d'une tournée, d'une campagne, d'une renommée. Me trompai-je?
- Alain Gervais, Saint-Hyacinthe
Le Colpron considère la locution à travers le comme un calque de around ou de across. C'est pourquoi on ne dira pas qu'une personne est connue à travers le Québec, par exemple, mais dans toute la province, partout au Québec, ou encore, aux quatre coins du Québec. Pour la même raison, on ne dira pas de quelqu'un qu'il voyage à travers le monde, mais dans le monde entier ou autour du monde.
Cela dit, ce calque est très répandu, particulièrement au Québec, mais aussi en France. Cependant, ce n'est pas une raison pour l'employer, les solutions de rechange étant nombreuses. Notons enfin que la locution à la grandeur de, employée au sens de partout au, est un québécisme inutile.
L'orthographe et l'Office
L'OQLF vient de faire connaître sa position par rapport à la réforme de l'orthographe. " Dès 1991, peut-on lire dans un communiqué, l'Office québécois de la langue française s'est déclaré, de façon générale, favorable à l'application des rectifications de l'orthographe, mais, étant donné les réticences, voire l'opposition, qu'elles soulevaient dans divers milieux en France et ailleurs, il n'a pas voulu faire cavalier seul et imposer cette nouvelle norme au public québécois."
" Depuis lors, l'Office suit l'évolution de l'accueil réservé aux rectifications dans la documentation ainsi que dans la société québécoise et la francophonie, et il les prend en considération dans ses travaux et dans les services qu'il offre au public."
" Dans Le Grand Dictionnaire terminologique (GDT), l'Office applique déjà les graphies nouvelles dans le cas des néologismes et des emprunts. Dans ses autres travaux et publications, il donnera désormais priorité aux nouvelles graphies dans la mesure où elles sont attestées dans les dictionnaires usuels. L'Office estime qu'en cette période de transition
ni les graphies traditionnelles ni les nouvelles graphies proposées ne doivent être considérées comme fautives. "
Je me réjouis de cette prise de position sage et prudente.
Petits pièges
La semaine dernière, les phrases suivantes contenaient chacune une erreur:
À prime abord, cette solution est attrayante.
Elle est allée sur Nice.-
L'expression à prime abord est incorrecte. On dira plutôt de prime abord ou au premier abord. Il aurait donc fallu écrire:
De prime abord, cette solution est attrayante.-
La locution aller sur (une ville) appartient à la langue familière et son emploi est critiqué à juste titre. Il aurait donc fallu écrire:
Elle est allée à Nice.
Voici les pièges de cette semaine. Les phrases suivantes contiennent chacune deux fautes. Quelles sont-elles?
La lutte à la pauvreté pourrait être un des enjeux de l'élection fédérale.
L'équipe manque sa vedette, au rancart en raison d'une blessure.
Les réponses la semaine prochaine.
Faites parvenir vos questions à Paul Roux par courriel à proux@lapresse.ca ou par la poste au 7, rue Saint-Jacques, Montréal (QC), H2Y 1K9.
Illustration(s) :
AP
Au singulier, le mot olympiade désigne la période de quatre ans entre deux jeux olympiques.