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 Cuba n'est pas un fragment de l¹URSS oublié aux Caraïbes II

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Tite Prout
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Tite Prout


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Cuba n'est pas un fragment de l¹URSS oublié aux Caraïbes II Empty
17042006
MessageCuba n'est pas un fragment de l¹URSS oublié aux Caraïbes II

Analyse : Cuba n¹est pas un fragment de l¹URSS oublié aux Caraïbes (Dernière partie) (4/17/2006)


6. Ce qui s¹est érigé de grand, de beau à Cuba l¹a été par le sang et la sueur de son peuple. Un peuple métissé, qui s¹est peu à peu constitué en nation, dans l¹exploitation capitaliste et la résistance à cette exploitation, dans la violence de la colonisation et les guerres de libération nationale. Dans la guerre de dix ans entre 1868 et 1878, puis dans celle de 1895-98, guerre des patriotes cubains contre l¹Espagne ‹300 000 soldats espagnols, un soldat pour 6 habitants, record mondial dans l¹histoire de la répression à l¹époque. Guerre dans laquelle les États-Unis allaient intervenir, en 1898, pour ³ confisquer ² l¹indépendance de Cuba. Depuis 1800, tous les présidents états-uniens, ou presque, avaient considéré l¹annexion de l¹île comme dans la ³ nature des choses ², comme par une loi d¹³attraction gravitationnelle ², ce qui traduisait, dans l¹expansion territoriale même des États-Unis, après l¹extermination des Indiens et la guerre contre le Mexique (1845), l¹importance géopolitique/géostratégique de Cuba. L¹île donne sur l¹embouchure du Mississipi ‹axe tournant de la conquête de l¹Ouest‹, mais aussi sur le canal interocéanique de Panama, à partir du début du XXe siècle. Les États-Unis occupèrent donc Cuba en 1898, plus Porto Rico, les Philippines, Guam, après HawaïŠ Ils s¹emparèrent de Guatanamo, qu¹ils refusent toujours de restituer à Cuba. Ils s¹autorisèrent par l¹amendement Platt à intervenir militairement dans l¹île quand ils estimaient leurs intérêts menacés. Cuba fut dollarisée. A l¹époque, le capitalisme états-unien était dominé par la finance, par les grands propriétaires du capital qui avaient opéré la fusion entre banque et industrie. L¹impérialisme était né ‹conquista des temps modernes. Nouveau pillage. Et c¹est cette finance états-unienne qui allait partir à l¹assaut de Cuba, et d¹abord du sucre.
7. Avant 1959, la grande finance états-unienne ‹Morgan de 1914 à 1929-33, Rockefeller de 1933 à 1958 (les deux groupes Rockefeller, celui de William Rockefeller structuré autour de la National City Bank et celui de John Rockefeller autour de la Standard Oil et de la Chase Manhattan Bank)‹ contrôle à Cuba tout ce qui crée du profit. Absolument tout : la production sucrière (Cuba, premier exportateur de sucre brut au monde, en était réduit vers 1930 à importer du sucre raffiné des États-Unis), les mines (nickel), l¹énergie, les chemins de fer, les transports urbains, le téléphone, le tabac, les fruits tropicaux, la consommation (Coca Cola, Propter & Gamble étaient là, de même que Goodyear), la banque bien sûr (jusqu¹à la Banque centrale), la terre... Cuba était une propriété des États-Unis. L¹essor des exportations de sucre fut prodigieuse. En 1920, les exportations par tête de Cuba étaient supérieures à celles de l¹Angleterre. Mais, désormais, les travailleurs étaient des salariés, formant au sens strict du terme un ³ prolétariat ² sucrier, employé les trois ou quatre mois de zafra (récolte), réduits à la misère le reste du temps, fixés sur des terres qu¹ils travaillaient, mais ne possédaient pas, sans emploi alternatif. Cet essor amena de nouveaux déplacements de main d¹¦uvre saisonnière, par dizaines de milliers : des Haïtiens, des Jamaïcains, reproduisant ainsi la division capitaliste du travail selon un critère de nationalité cette fois ; en même temps que le développement du sous-développement, le chômage, la misère, la désindustrialisation, dans une économie hyper-spécialisée, mono-exportatrice, vulnérable aux fluctuations de cours et totalement dépendante, malgré les vertus prêtées aux traités de libre-échange et aux quotas sucriers des États-Unis. C¹est dans cette perspective du temps long que peut être appréhendée ‹si l¹on veut la comprendre‹ l¹adhésion de Cuba au projet socialiste.
8. La Révolution, à partir du 1er janvier 1959, après une guerre de guérilla de trois ans, dirigée par Fidel Castro. En un temps historique très bref, Cuba a connu une transformation sociale radicale, qui la fit rompre avec le capitalisme et engager la construction d¹une société socialiste. 1959-1960 furent des années de libération nationale et de mesures prises en faveur du peuple. Des mesures de justice sociale, de démocratisation : lutte contre la corruption, contre la mafia, contre le trafic de drogue, contre la prostitution ; récupération des biens mal acquis ; suppression des appareils répressifs d¹État aux ordres de l¹oligarchie ; baisses des prix de l¹électricité, des médicaments, des loyers, des livres ; fin de la ségrégation raciale (toujours en vigueur aux États-Unis à l¹époque) ; grands travaux publics et création d¹emplois ; disparition de la mendicité et du travail des enfants ; priorité accordée à la santé et à l¹éducation publiques, instauration de la sécurité sociale, des retraites, d¹une éducation universelle, campagne d¹alphabétisation, développement de la recherche, de la culture, du sport ; réforme agraire... Puis à partir de 1960-65, les grandes transformations socialistes, avec les nationalisations et la mise en ¦uvre d¹une planification, avec l¹aide soviétique. Bien sûr, il y eut des insuffisances ‹une diversification insuffisante du pays dans les années 60‹, des excès ‹un certain dogmatisme dans les années 70‹, des erreurs ‹on a trop vite considéré que le socialisme était ³ achevé ², que toutes les dépenses étaient permises dans les années 80‹ ; mais il y eut surtout, dans ce processus de libération d¹un peuple, des contraintes, extrêmement fortes, qui ont pesé sur la Révolution cubaine : le poids de l¹histoire, des rigidités structurelles qui ont empêché la sortie de la spécialisation sucrière, le manque de ressources naturelles, de devises, de cadresŠ Mais la plus contraignante d¹entre ces contraintes a été la guerre non déclarée des États-Unis contre Cuba.
9. Cette guerre non déclarée prit des formes multiples. Des attentats terroristes menées par la CIA agissant de concert avec les exilés cubains contre-révolutionnaires (attentats qui firent de nombreux morts, notamment le 4 mars 1960 lors de l¹explosion du bateau La Coubre dans le port de La Havane). Et même des agressions de type biologique destinés à infecter les cultures, le cheptel et la population de Cuba (comme l¹épidémie de dengue hémorragique en 1981, dont il a été prouvé que la souche alors inconnue avait été élaborée en laboratoire aux États-Unis pour être propagée intentionnelle à Cuba (158 enfants cubains en moururent) ‹des organisations anti-cubaines ont publiquement reconnu aux États-Unis avoir participé à de telles actions. Il y eut aussi la tentative d¹invasion militaire de la Baie des Cochons en 1961, puis la crise des fusées en 1962, qui fit peser sur le monde un risque de guerre nucléaire entre les États-Unis et l¹URSS, qui aidait à défendre Cuba ‹et Fidel a dit, à plusieurs reprises, la dette à l¹égard de l¹Union soviétique ³ qui ne s¹effacera jamais du c¦ur des Cubains ². Il y a surtout l¹embargo (un blocus), depuis 45 ans, qui n¹est pas une fiction, mais une réalité, aux effets terriblement néfastes sur Cuba, et qui peut être tenu, en tant qu¹il porte atteinte à l¹intégrité physique d¹un peuple, pour un crime contre l¹humanité. Il est à ce titre condamné par tous (ou presque) les pays membres de l¹ONU. Ce blocus a été récemment durci par Bush, en faisant peser une menace de guerre réelle sur Cuba. Un exemple de cette logique de guerre : le gouvernement des États-Unis accorde à tout Cubain arrivé sur son sol, y compris illégalement (même s¹il a commis des actes de violence), la nationalité états-unienne ‹contrairement au sort réservé aux autres étrangers‹, mais ce même gouvernement ne respecte pas les accords migratoires signés avec Cuba sur l¹octroi de visas légaux pour entrer aux États-Unis ; ce qui constitue une incitation à l¹immigration illégale (y compris à des actes de violence). Dans le même temps, le gouvernement des États-Unis a récemment déclaré que l¹arrivée de flux migratoires non contrôlés en provenance de Cuba représentait une menace contre leur sécurité nationale et pourrait justifier une guerre ‹une guerre qu¹ils cherchent !
10. Peut-être comprendra-t-on maintenant un peu mieux pourquoi le peuple cubain résiste toujours, fait vivre sa révolution, soutient son État-nation et ses leaders révolutionnaires. Les Cubains ont tenus le choc extrêmement dur qu¹a représenté la disparition de l¹URSS et du CAEM. Disparition qui a fait chuté ses exportations et ses importations de près de 80% et son PIB de 35% en 3 ans. Disparition qui l¹a obligé à mettre en ¦uvre un système de double circulation monétaire dans son économie, mais aussi à changer de moteurs de croissance de cette économie, en passant du sucre au tourisme, à l¹investissement étranger, aux rapatriements de devises (en plus du nickel, du tabacŠ). Et ce, pour préserver coûte que coûte son indépendance nationale et les acquis de la Révolution : la santé et l¹éducation publiques, l¹alimentation à prix modiques (libreta), les services publics, la recherche scientifique, mais aussi les missions internationalistes (celles des médecins cubains notamment, qui exercent leur métier dans de nombreux pays pauvres, gratuitement pour leurs patients). La crise des années 1990, la ³ période spéciale ² comme on dit à Cuba, a été très dure, pour tous les Cubains. Mais ils se tiennent toujours debout. Depuis 1994-95, l¹économie s¹est même redressée, au point que Cuba enregistre depuis 10 ans l¹une des plus fortes croissances du PIB de toute l¹Amérique latine. Du pétrole a été découvert. La dé-dollarisation a récemment été engagée, depuis novembre 2004, pour réduire les inégalités observées depuis 1990 ‹inégalités qui avaient beaucoup reculé jusqu¹en 1990 (mais même aujourd¹hui, Cuba reste, de très loin, le pays le plus égalitaire d¹Amérique (États-Unis compris). Des relations ont été établies avec le Venezuela ‹où une révolution populaire est également en marche, avec laquelle Cuba vient de signer le traité d¹ALBA (Alternative bolivarienne pour les Amériques et les Caraïbes), alternative à l¹ALCA (Zone de Libre-Échange des Amériques, sponsorisé par le président Bush) ; avec la Chine, l¹Inde, l¹Afrique du Sud, le Brésil, les grands pays du Sud, mais aussi avec la Russie. Ce qu¹il faut souligner ici, c¹est que les mécanismes de marché ont certes progressé à Cuba, mais il n¹y a pas eu de retour au capitalisme à Cuba ‹et encore moins à un capitalisme néo-libéral, tourné contre le peuple, comme c¹est le cas dans d¹autres pays dits ³ en transition ². Il n¹y a pas ou peu de propriété privée du capital à Cuba, pas ou peu de salariat privé, pas ou peu de marché financier. Cuba est restée socialiste. Peut-être est-ce parce que Cuba est restée socialiste qu¹il n¹y a pas là-bas, comme ailleurs dans tous les autres pays d¹Amérique latine, d¹enfants des rues, laissés sans soins ni éducationŠ

Rémy Herrera est chercheur
au CNRS et enseigne à l¹Université
de Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

Bibliographie

Herrera, R. (dir.) (2006), Cuba révolutionnaire ­ Économie et planification, tome 2, ouvrage collectif avec E. Olvarez, E. Molina, A. González, J.-L. Rodríguez et O. Martínez, L¹Harmattan, collection Forum du Tiers-Monde, à paraître, Paris.
Herrera, R. (dir.) (2003), Cuba révolutionnaire ­ Histoire et culture, tome 1, ouvrage collectif avec I. Monal, O. Miranda, O. Pino Santos, O. Zanetti et J. Cantón, 250 p., L¹Harmattan, collection Forum du Tiers-Monde, février, Paris.
Herrera, R. (2005a), ³ Where is the Cuban Economy Heading? ², International Journal of Political Economy, vol. 34, n°. 4, pp. 3-11, hiver, à paraître, New York.
Herrera, R. (2005b), ³ When the Names of the Emperors were Morgan and Rockefeller ², International Journal of Political Economy, vol. 34, n°. 4, pp. 25-49, hiver, à paraître, New York.
Herrera, R. (2004a), ³ Why Lift the Embargo? ², Monthly Review, vol. 55, n°. 8, pp. 49-54, janvier, New York.
Herrera, R. (2004b), ³ New Curtailment of Freedoms ², rapport pour l¹Organisation des Nations unies, Conseil économique et social, 56e session de la Sous-Commission des Droits de l¹Homme, juin, Genève.
Herrera, R. (2003), ³ The Effects of the U.S. Embargo against Cuba ², rapport pour l¹Organisation des Nations unies, Conseil économique et social, 55e session de la Sous-Commission des Droits de l¹Homme, juillet, Genève.
Herrera, R. et P. Nakatani (2005), ³ De-dollarizing Cuba ², International Journal of Political Economy, vol. 34, n°. 4, pp. 86-97, hiver, à paraître, New York.
Herrera, R. et P. Nakatani (2004), ³ Dollarization in Cuba ², International Finance Review, Elsevier, vol. 5, pp. 115-134, décembre, Oxford.
Herrera, R. et P. Nakatani (2003), ³ Dolarización y desdolarización en Cuba ², Revista Venezolana de Análi
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