Que faire en cas d’arrestation lors d’une manifestation
Le site du Syndicat de la Magistrature :
www.syndicat-magistrature.org
Guide du parfait manifestant
publié le 30 juillet 2003
Ce petit guide des droits du manifestant arrêté,
intitulé Que faire en cas d’arrestation lors d’une
manifestation ? a été élaboré à partir des formations
données par le Syndicat de la magistrature en juin et
juillet 2003, aux manifestants de l’anti G8 et au
collectif des intermittents du spectacle.
1. Lors d’un contrôle d’identité
Vos droits
Si vous êtes de nationalité française, vous pouvez
établir votre identité par tout moyen, il n’est pas
obligatoire d’avoir sur vous une pièce d’identité.
Si vous êtes de nationalité étrangère, vous devez,
en principe, toujours avoir avec vous le titre ou les
documents vous autorisant à circuler ou à séjourner en
France (une carte de séjour, un passeport avec un visa
datant de moins de 3 mois, un récépissé de demande de
titre de séjour ou encore une convocation à la
préfecture etc.). En effet, la police peut à tout
moment contrôler la régularité du séjour en France des
étrangers. Les mineurs étrangers peuvent prouver par
tout moyen leur identité, ils sont donc inexpulsables
du territoire français.
Les motifs du contrôle d’identité (article 78-2 du
code de procédure pénale) : outre les contrôles
spécifiques des étrangers, les forces de l’ordre
peuvent contrôler votre identité s’il existe des
raisons plausibles de soupçonner que vous avez commis
ou tenté de commettre une infraction, que vous vous
préparez à commettre un crime ou un délit, que vous
êtes susceptible de fournir des renseignements sur une
enquête pénale en cours ou que vous faites l’objet de
recherches judiciaires. Mais le Procureur peut aussi
requérir des contrôles d’identité pour les infractions
qu’il précise (recherche de stupéfiants, port d’armes
par exemple).
Enfin l’identité peut être contrôlée pour « prévenir
une atteinte à l’ordre public ». Les motifs du
contrôle sont donc très larges, mais ils doivent
répondre à l’un de ces critères, sous peine de nullité
du contrôle. Par exemple, le fait de porter un
auto-collant (ou une banderole), avec un sigle
syndical ou associatif, ou une inscription licite
quelconque, ne justifie en aucun cas un contrôle
d’identité. La police n’a pas le droit de vous
demander de retirer l’auto-collant, car c’est une
atteinte à la liberté d’expression. Autre exemple :
vous avez le droit de photographier ou de filmer une
manifestation, et rien n’interdit de filmer les
policiers dans des lieux publics. Ils n’ont pas le
droit de confisquer votre matériel ou le film.
La rétention en vue de vérifier votre identité
(article 78-3 du code de procédure pénale) : Si vous
n’avez pas de preuve de votre identité, vous pouvez
être retenu par la police qui souhaite vérifier votre
identité pendant 4 heures maximum à partir de début du
contrôle. Ne tentez pas de vous soustraire par la
force à un contrôle d’identité, c’est un délit de
rébellion. Restez toujours calme et poli.
Conseils pour les contrôles d’identité
Vous avez le droit de faire aviser le procureur de la
république de votre rétention. Si vous êtes mineur, le
procureur de la République doit être informé dès le
début de la rétention. Exercez votre droit de le faire
prévenir. Une copie du procès-verbal de contrôle
d’identité doit vous être remise après 4 heures (s’il
n’y a pas de garde à vue à la suite). Exigez-ce
document. Vous avez le droit de prévenir votre famille
ou toute personne de votre choix. Si vous êtes mineur,
vous devez être assisté par votre représentant légal .
Si les policiers sont agressifs lors d’un contrôle
d’identité, restez polis, ne les tutoyez pas, même
s’ils vous tutoient, ne faites aucun geste violent à
leur égard, car cela peut entraîner des procédure
d’outrage, de rébellion, ou de violences sur personne
dépositaire de l ’autorité publique ; des peines
d’emprisonnement sont encourues et vous pouvez être
jugés en comparution immédiate (flagrants délits).
Prenez les coordonnées de toutes les personnes qui
peuvent témoigner de la scène. Si vous êtes emmenés au
commissariat, demandez à tout témoin de prévenir vos
proches ou un avocat. Si vous refusez de collaborer à
la vérification de votre identité (en faisant des
déclarations manifestement fausses, par exemple), vos
empreintes et une photo peuvent être prises. Et si
vous refusez de vous soumettre à cette mesure, vous
pouvez être punis de 3 mois de prison et 3 750 euros
d’amende (article 78 -5 du Code de procédure pénale
[CPP]).
Avant de signer un procès-verbal, relisez-le
attentivement. Si vous n’êtes pas d’accord avec le
contenu des procès-verbaux, (documents rédigés par les
policiers et décrivant l’interpellation ou la
vérification d’identité) vous pouvez refuser de les
signer. Si vous estimez que le procès-verbal contient
des erreurs ou des imprécisions, vous devez demander
au policier qui l’a tapé de le rectifier ; s’il
refuse, vous pouvez vous-même faire des ajouts
manuscrits à la fin du procès-verbal, suivis de votre
signature.
Lors de l’interpellation, la police peut seulement
accomplir sur vous une palpation de sécurité. Il
s’agit d’une recherche extérieure, à travers les
vêtements, d’objets dangereux pour la sécurité du
porteur ou d’autrui. Cela ne peut en aucun cas
consister en des attouchements ou une fouille à corps.
Ayez toujours les coordonnées d’un ou plusieurs
avocats sur vous.
2. Lors de la garde à vue
Un officier de police peut décider de vous retenir au
poste 48 heures maximum s’il soupçonne que vous avez
commis ou tenté de commettre une infraction. Si la
garde à vue fait suite à un contrôle d’identité, la
durée de la garde à vue (48 heures) se calcule à
partir de l’heure de votre interpellation par la
police (les 4 heures de rétention pour le contrôle
d’identité incluses). Vous devez être immédiatement
informé de vos droits dans une langue que vous
comprenez (article 63-1 du CPP). Si l’interprète ne
peut se déplacer, cela se fera par les moyens de
télécommunications autorisés.
Vos droits
Dès le début de la garde à vue, le procureur doit être
informé par l’officier de police judiciaire. Vous
pouvez être retenu au maximum 48 heures (96 heures
lorsque des stupéfiants sont en cause, selon l’article
63-1 du CPP). La prolongation d’une garde à vue de 24
heures à 48 heures doit être autorisée par le
procureur. Un mineur, s’il a plus de 13 ans, ne peut
être retenu que 24 heures. Vous avez le droit de
savoir quelle infraction vous est reprochée. Vous
devez demander que ce soit écrit sur le procès-verbal.
Vous avez le droit de voir un avocat que vous avez
choisi ou un avocat qui est mis à votre disposition si
vous n’en connaissez pas. Vous devez rencontrer votre
avocat immédiatement au début de la garde à vue et à
la 20ème heure (72ème heure en cas de stupéfiants),
pendant 30 minutes de manière confidentielle (article
63-4 du CPP). En cas de prolongation de la garde à vue
au delà de 24 heures, vous pouvez encore voir l’avocat
à la 36ème heure.
Dès le début de la garde à vue « sans délai », vous
pouvez faire prévenir, par l’intermédiaire d’un
policier ou par téléphone, un proche (la personne avec
qui vous vivez habituellement, l’un de vos parents,
l’un de vos frère ou soeur, un ami, votre employeur,
etc. (article 63-2 du CPP).
A tout moment lors de la garde à vue, à votre demande
ou à celle d’un membre de la famille, vous avez le
droit de demander d’être examiné par un médecin qui
vient sans délai. Après 24 heures de garde à vue, vous
avez le droit de demander une seconde fois à voir un
médecin. Si vous avez moins de 16 ans, un médecin est
désigné dès le début de la garde à vue pour vous
examiner. Lorsque l’infraction concerne les
stupéfiants, un médecin doit vous examiner dès la
première heure de garde à vue, puis toutes les 24
heures, en plus des examens que vous pouvez
personnellement demander, durant la garde à vue qui
peut ici durer 96 heures. Il est possible que vous
subissiez une fouille à corps afin de rechercher des
indices en rapport avec l’infraction flagrante qui
vous est reprochée. Il s’agit alors non seulement de
fouiller vos vêtements mais aussi l’intérieur de votre
corps. Mais la fouille à corps ne peut être effectuée
que par un policier de même sexe que vous.
Conseil lors des gardes à vue
Relisez très attentivement le procès verbal. Vous
pouvez choisir de vous taire lors des interrogatoires.
Attendez d’avoir demandé conseil à votre avocat avant
de répondre aux questions posées par les policiers.
Vous pouvez refuser de signer le procès-verbal
(documents décrivant les conditions de garde à vue et
des auditions). Si vous n’êtes pas sûr de son contenu,
mieux vaut ne pas le signer ou ajouter vous-même des
précisions à la fin du document, avant de le signer.
Si vous n’avez pas les moyens de payer les frais d’un
avocat, vous pouvez demander à l’État français de
prendre en charge totalement ou partiellement ces
frais selon le montant de vos revenus mensuels. C’est
l’aide juridictionnelle.
Les policiers n’ont pas le droit de vous faire subir
des violences, ni physiques, ni morales (article
222-13 du CP et article 3 de la Convention européenne
des droits de l’homme). Si vous subissez des violences
(coups, insultes, humiliations, refus de repas...)
parlez-en à votre avocat et demandez un examen médical
afin que ces violences soient constatées dans un
établissement hospitalier et qu’un certificat médical
précisant la durée de l’arrêt de travail soit établi.
La solution la plus efficace est de porter plainte
devant un juge d’instruction avec constitution de
partie civile. Une somme d’argent vous sera demandée à
titre de consignation, sauf si vous avez l’aide
juridictionnelle.
Si des violences contre des biens ou des personnes
vous sont reprochées, il est très important d’avoir
pris les coordonnées des personnes pouvant témoigner
en votre faveur. Avant de manifester, ayez sur vous
des petits papiers où vous avez écrit votre nom et
votre téléphone, pour pouvoir les distribuer en
urgence aux témoins, au moment où la police vous
emmène, et tâchez de prendre les coordonnées des
témoins.
Vous avez des droits que les policiers ne peuvent vous
refuser, comme ceux de voir un interprète, un avocat ,
un médecin. S’ils vous ont été refusés, faites noter
sur le procès-verbal que vous les avez demandés ou
bien noter le vous-même avant de le signer. Parlez- en
impérativement à votre avocat, car le non respect de
vos droits rend toute la procédure nulle.
Si les policiers vous ont dit que vous figuriez sur le
STIC (Système de traitement des infractions
constatées), il s’agit d’un fichier de police (ou de
gendarmerie) sur lequel sont inscrites des personnes «
mises en cause » dans une précédente procédure (sans
pour autant avoir été condamnée). Demandez aux
policiers de vous lire les mentions du fichier qui
vous concernent, et si vous n’êtes pas d’accord, vous
pouvez écrire au Procureur de la République pour faire
rectifier ou effacer ces informations.
3. Lors de la comparution immédiate
La comparution immédiate est une procédure qui permet
de faire juger quelqu’un à la suite de la garde à vue
devant le tribunal correctionnel. C’est le procureur
qui décide si on vous juge immédiatement, ou si on
vous relâche pendant la garde à vue, ou à la fin de la
garde à vue : en ce cas la police peut vous remettre
une convocation devant le tribunal, avec une date
d’audience.
Le procureur peut aussi décider de vous faire juger le
jour-même, en comparution immédiate, si vous risquez
une peine de prison égale ou supérieure à 6 mois,
c’est-à-dire pour la plupart des délits commis lors
d’une manifestation.
Conseil très important
Vous avez le droit de refuser d’être jugé le jour-même
lorsque le juge vous demande si vous acceptez la
comparution immédiate (article 397 du CPP). Mais vous
risquez d’aller en prison pendant 2 à 6 semaines en
attendant. Parlez en à votre avocat. Le risque d’aller
en prison en attendant d’être jugé, même si vous avez
une famille ou un travail, est réel.
Attention : devant le tribunal, soyez calme et poli.
Écoutez les conseils de votre avocat, dont la présence
est obligatoire, sur l’attitude à avoir et surtout sur
les déclarations à faire au juge. Vous avez le droit
de faire appel contre la décision du juge qui vous
condamne. Vous pouvez demander l’aide juridictionnelle
pour payer les frais d’avocat et les frais de justice,
si vos revenus sont très faibles (en gros, inférieurs
au SMIC).
4. Lors d’une rétention administrative d’un étranger
Si vous êtes étranger en situation irrégulière, le
préfet peut décider de vous reconduire à la frontière.
Dans ce cas, le préfet peut vous placer en rétention
administrative pendant 48 heures pour préparer votre
renvoi. Au delà de ces 48 heures, vous pouvez être
maintenu en rétention pendant encore 10 jours au
maximum sur décision du juge des libertés, soit 12
jours dans un centre de rétention au total. Si vous
êtes demandeur d’asile, retenu par la police (4 jours)
à l’entrée du territoire français, vous pouvez être
ensuite placé en rétention pendant 16 jours sur
décision du juge, soit 20 jours au total en rétention.
Vos droits
Vous devez être informés de vos droits dès le début de
votre rétention dans une langue que vous comprenez.
Vous avez le droit de faire un recours contre la
décision de reconduite à la frontière mais le recours
n’est pas suspensif (vous restez en rétention). Vous
avez le droit de demander l’assistance d’un médecin,
d’un avocat, d’un interprète et de communiquer avec
votre consulat et avec une personne de votre choix.
Vous avez le droit de faire appel contre la décision
du juge de prolonger la durée de votre rétention.
Comme en garde à vue, vous devez être bien traité en
rétention (ne subir aucun violence ni physique, ni
morale).
Conseils pour la rétention d’un étranger
Une association, la CIMADE, se trouve sur certains
lieux de rétention afin de pouvoir vous aider,
notamment à contester la décision de reconduite à la
frontière. Demandez à la rencontrer au plus vite. Pour
une information sur les droits des étrangers,
contacter aussi le GISTI ou l’ANAFE.
5. Lors de la fouille d’un véhicule
Sauf lorsqu’il s’agit d’un véhicule d’habitation
(caravanes par exemple), la police peut fouiller un
véhicule, y compris le coffre, si elle a des raisons
plausibles de soupçonner qu’un crime ou un délit
flagrant a été commis par l’un des occupants. La
police peut aussi immobiliser un véhicule pendant 30
minutes et le fouiller avec l’accord du conducteur (ou
à défaut le procureur) pour prévenir d’une atteinte
grave à la sécurité des personnes et des biens.
6. Les vigiles
Sur arrêté du préfet, dans les lieux et à des dates
précisées dans cet arrêté, les vigiles peuvent
procéder à des palpations de sécurité (donc sur les
vêtements), en cas de menaces graves pour la sécurité
publique. Ces palpations sont faites par une personne
du même sexe que l’intéressé. Les vigiles peuvent
aussi faire ouvrir un sac à main, et ne peuvent le
fouiller qu’avec le consentement de la personne.